ESPRIT ET MATIERE
Publié le 29/08/2014
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ESPRIT ET MATIÈRE
La réalité du monde extérieur
Chacun sait qu'il y a dans la réalité des choses qu'on peut voir, toucher, mesurer dans l'espace : nous les appelons communé¬ment matérielles. Mais il en est d'autres comme nos idées, nos souvenirs, nos sentiments que nous ne pouvons ni voir ni tou¬cher; ce sont nos représentations, ou dans un sens tr�s large, nos pensées. Le présent chapitre cherche à préciser les relations entre les choses matérielles et les pensées. Sa difficulté réside dans l'emploi qu'il fait de mots en « isme � dont la plupart vous effraient parce que leur sens ne vous est pas précisément connu.
Essayons donc pour commencer de définir clairement ces mots : idéalisme, réalisme, spiritualisme, matérialisme.
Le mot idéalisme vous est familier dans un contexte esthétique ou moral. L'art réaliste veut refléter, « photographier � la nature. Au contraire, l'art idéaliste « embellit � la réalité ou exprime les rêves de l'artiste. En morale, l'« idéalisme� c'est le dévouement à de nobles fins, à des buts généreux, désintéres¬sés. Vous voyez qu'en art ou en morale l'usage des mots « réa¬lisme �, « idéalisme � implique la croyance en deux mondes, le
monde de la mati�re, du «réel �, et le monde des idées, de l'idéal rêvé par l'esprit. Souvent, le mot idéalisme est pris dans une acception élogieuse : l'homme d'idéal s'él�ve « au-dessus � du réel. Parfois aussi le mot idéalisme est utilisé avec une nuance péjorative : un idéaliste, c'est un homme perdu dans ses songes, qui ne tient pas assez compte des réalités concr�tes. En métaphysique, le terme idéaliste a un sens plus radical : un idéaliste, ce n'est pas seulement un homme tr�s attaché aux pensées, au monde des idées ; c'est un homme qui croit que le monde réel, le monde des choses lui-même est en définitive constitué par de pures idées, par des états de conscience. L'être même serait idée, pensée, conscience, ou si vous voulez, il n'existe pas de monde matériel, il n'y a rien en dehors des idées, des pensées, de la conscience. Le Vocabulaire de Lalande propose la définition suivante : «On entend par idéa¬lisme la tendance philosophique qui consiste à ramener toute existence à la pensée, au sens le plus large du mot pensée 1. � Nous définirons le « réalisme � par le refus de cette hypoth�se. Le mot « réalisme �, assez ambigu, a pris dans l'histoire de la philosophie des acceptions diverses. Nous nous référerons ici encore au Vocabulaire philosophique de Lalande et nous enten¬drons par « réalisme � non seulement «la doctrine d'apr�s laquelle l'être est indépendant de la connaissance actuelle que peuvent en prendre les sujets conscients �, mais plus précisé¬ment encore «la doctrine d'apr�s laquelle l'être est, en nature, autre chose que la pensée et ne peut être tiré de la pensée �. On appellera dans cette perspective « mati�re � la réalité objective qui existe en dehors de mon esprit et de tout esprit et qui n'a besoin d'aucun esprit pour exister.
Vous voyez donc le premier probl�me qui va se poser à nous : l'être du monde se réduit-il à la pensée ou bien existe-t-il une « mati�re � extérieure à la pensée, différente d'elle en nature ?
A côté de ce débat entre le réalisme et l'idéalisme, nous traite¬rons de l'opposition du matérialisme et du spiritualisme. Le
1. Lalande utilise à dessein le mot «pensée� dans un sens tr�s large. En effet on peut considérer comme idéalistes des doctrines différentes de celle de Platon qui n'accorde l'Être qu'aux Idées, aux essences, celle de Leibniz qui pense que la réalité est composée de substances simples, d'âmes vivantes, les nomades, celle de Berkeley qui réduit la réalité à des images perçues par les consciences, et quantité d'autres. Nous étudierons en détail la doctrine de Berkeley.
spiritualisme n'est pas l'idéalisme ; on peut tr�s bien être spiri¬tualiste et croire fermement qu'il existe un monde extérieur indépendant de la pensée. Le spiritualisme affirme seulement «l'indépendance et la primauté de l'esprit�. Être spiritualiste, c'est penser que l'esprit n'est pas produit par la mati�re. Ainsi les dualistes qui croient à l'existence de la mati�re et de l'esprit indépendant de la mati�re sont des spiritualistes. Lalande pro¬pose par exemple du spiritualisme une définition qui paraît concerner particuli�rement la philosophie cartésienne. C'est «la doctrine d'apr�s laquelle il existe deux substances, radica¬lement distinctes par leurs attributs, dont l'une, l'esprit, a pour caract�res essentiels la pensée et la liberté, dont l'autre, la mati�re, a pour caract�res essentiels l'étendue et la communi¬cation toute mécanique du mouvement �. Au contraire, le maté¬rialisme refuse l'indépendance de l'esprit, des pensées. La mati�re serait la réalité premi�re dont nos sensations, nos pen¬sées ne sont que le produit. En définitive, «le matérialisme est la doctrine d'apr�s laquelle il n'existe d'autre substance que la mati�re �. On saisit ici que le matérialisme s'oppose directe¬ment à l'idéalisme'.

«
monde de la matière, du «réel», et le monde des idées, de
l'idéal rêvé par l'esprit.
Souvent, le mot idéalisme est pris dans
une acception élogieuse: l'homme d'idéal
s'élève« au-dessus»
du réel.
Parfois aussi le mot idéalisme est utilisé avec une
nuance péjorative: un idéaliste,
c'est un homme perdu dans ses
songes, qui ne tient pas assez compte des réalités concrètes.
En
métaphysique, le terme idéaliste a un sens plus radical : un
idéaliste, ce
n'est pas seulement un homme très attaché aux
pensées, au monde des idées;
c'est un homme qui croit que le
monde réel, le monde des choses lui-même est
en définitive
constitué par
de pures idées, par des états de conscience.
L'être même serait idée, pensée, conscience, ou si vous voulez,
il n'existe pas de monde matériel, il n'y a rien en dehors
des idées, des pensées, de la conscience.
Le Vocabulaire de
Lalande propose la définition suivante :
«On entend par idéa
lisme la tendance philosophique qui consiste à ramener toute
existence à la pensée, au sens le plus large du mot pensée
1
• »
Nous définirons le «réalisme» par le refus de cette hypothèse.
Le mot
«réalisme», assez ambigu, a pris dans 1 'histoire de la
philosophie des acceptions diverses.
Nous nous référerons ici
encore au Vocabulaire philosophique de Lalande et nous enten
drons par
« réalisme » non seulement « la doctrine d'après
laquelle l'être est indépendant de la connaissance actuelle que
peuvent en prendre les sujets
conscients», mais plus précisé
ment encore
«la doctrine d'après laquelle 1 'être est, en nature,
autre chose que la pensée et ne peut être tiré de la
pensée».
On
appellera dans cette perspective «matière» la réalité objective
qui existe en dehors de mon esprit et de tout esprit et qui
n'a
besoin d'aucun esprit pour exister.
Vous voyez donc
le premier problème qui va se poser à nous :
l'être du monde se réduit-il à la pensée ou bien existe-t-il une
«matière» extérieure à la pensée, différente d'elle en nature?
A côté de ce débat entre
le réalisme et l'idéalisme, nous traite
rons de l'opposition du matérialisme et du spiritualisme.
Le
1.
Lalande utilise à dessein le mot dans un sens très large.
En effet
on peut considérer comme idéalistes des doctrines différentes de celle de Platon qui n'accorde l'Être qu'aux Idées, aux essences, celle de Leibniz qui pense que la
réalité est composée de substances simples, d'âmes vivantes, les nomades, celle de Berkeley qui réduit la réalité à des images perçues par les consciences, et
quantité d'autres.
Nous étudierons en détailla doctrine de Berkeley..
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