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MISÈRE de l'homme sans Dieu - Liasse 2 : Vanité (Pascal)

Publié le 22/10/2010

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dieu

 

 

Les substituts du mot misère dans le texte sont bassesse, faiblesse et petitesse.

Vanité, misère et ennui sont des liasses liées entre elles. La définition de la vanité est le vide, le néant, qui s’oppose à l’être, l’apparence à la réalité.

Cette liasse met en évidence les incohérences, les contradictions humaines, et qui font toute la vanité des humains, parce qu’ils ne peuvent s’attacher à autre chose. Toutes ces contradictions montrent l’échec de la toute puissance de la raison humaine, qui est en fait vide. 

 

1. La vanité est tout d’abord dans le jugement, et surtout dans l’impossibilité de bien juger : les hommes attachent ainsi beaucoup de valeur à ce qui n’en a pas ou peu. La vanité est aussi dans les choses car elles ne méritent pas l’attention ou l’estime que l’homme leur porte.

Exemples : 

Fragment 11 : expérience des visages semblables qui font rire alors que seuls n’ont rien de risible. Ce fragment est à rapprocher du fragment 37, sur la peinture. Tous deux traitent de la ressemblance. Il n’y a pas de quoi attacher de l’importance à un fait en se fondant sur sa ressemblance : c’est une perte de temps.

L’attitude de l’homme face au temps est tout aussi inconséquente : il semble s’attacher à ce qui n’est plus (le passé ) ou à ce qui n’est pas encore (l’avenir) au lieu de faire attention à ce qu’il a : le présent. C’est le propos du fragment 43 : … et ne pensons point au seul au seul qui nous appartient, et si vains que nous songeons à ceux qui ne sont rien, et échappons sans réflexion le seul qui subsiste. Eventuellement à rapprocher du fragment 29, sur les villes par où l’on passe.

Autre incohérence, le prix attaché à la mort plutôt qu’à la vie, en dépit du bon sens : fragment 27 : Ils aiment mieux la guerre… Même idée dans le fragment 34 : intitulé Métiers, il traite de la douceur de la gloire, qui est si grande qu’on peut l’attacher à la mort même.

Le fragment énigmatique 16 sur les capuchons de moines peut être entendu de la sorte : il peut sous-entendre la vanité des préoccupations des moines :  il fait en tous cas allusion à une véritable querelle qui divisa les Cordeliers, sur la forme de leur capuchon : les Frères spirituels le voulaient plus étroit, et les Frères de la communauté plus large. Les bulles de quatre papes ont tenté de mettre un terme à cette querelle ! Nicole au sujet de cette querelle: « Dieu se plaisant ainsi à humilier l’orgueil des hommes, en permettant qu’ils portent aux plus grandes extrémités les plus grandes bagatelles, pour leur faire voir qu’ils ne sont eux-mêmes que vanité. « 

 

2. Impuissance du jugement : pour bien juger, il faudrait une règle, un étalon, quelque chose qui serve de repère : c’est le fragment 19 qui expose cette idée, avec le leitmotiv du trop ou trop peu ; ce problème est souvent associé à la métaphore du point fixe, empruntée à la géométrie et à la mécanique. Quel point fixe adopter en matière de morale ? 

Cette idée se retrouve également en mathématiques : le centre de  gravité est le point par rapport auquel tous les éléments d’un système sont en équilibre. Ou encore, le fragment prend ici l’exemple de la perspective : pour bien juger d’un tableau, il faut se placer au point de vue ou centre de perspective où convergent toutes les lignes de fuite, point qu’on peut assimiler au sommet d’un cône. C’est à ce point que se réalise l’ordre ; si l’œil s’applique en tout autre point, l’impression sera au contraire celle du chaos.  

D’autres fragments soulèvent cette idée du trop ou trop peu : ainsi du 38, Quand on lit trop vite… , qui se relie ici aux deux infinis. Ou encore le fragment sur le vin, 35 : peut-être une référence aux épices données aux juges par les plaideurs ( ???).  

 

3. La vanité est dans les institutions, les coutumes, les rapports sociaux. Cet aspect sera développé et complété dans la liasse suivante. Beaucoup de fragments traitent de ce thème et soulignent les incohérences, les contradictions a priori des coutumes humaines :  

le fragment 17, elliptique Il a quatre laquais émet une idée qui reviendra souvent par la suite : les distinctions hiérarchiques entre les hommes, qui fondent et régissent les rapports sociaux ; le fragment 30 soulève aussi cette absurdité a priori, à savoir qu’on marque son respect pour autrui en « s’incommodant. «  le fragment 23 met en évidence l’origine du respect pour les rois, dévoilant les raisons de leurs attributs surnaturels. Au contraire, dans le fragment 46, les Suisses honnissent l’idée de noblesse, ce qui en montre la toute relativité, la variabilité. Et d’ailleurs, l’orgueil des hommes ramené à l’échelle de l’univers est vite rabaissé : c’est sans doute de cette façon qu’il faut entendre le fragment 39 : « Combien de royaumes nous ignorent. « 

 

D’autres fragments soulignent l’incohérence des coutumes, lois, usages qui régissent la justice : ainsi le fragment 47, où l’on est assassin ou brave selon la personne qu’on tue. On peut y relier le fragment elliptique 18 : Il demeure au-delà de l’eau. Autre référence : « Plaisante justice qu’une rivière borne. « 

 

De même, des fragments soulignent la part de hasard qui décide des conditions, des métiers des uns et des autres : c’est le cas du fragment 32, le talon de soulier : le choix d’un métier, d’une condition, tient aussi et surtout à ce qu’on en a entendu étant enfant et qui a défini notre jugement : cf fragment 541 : « Le chose la plus importante à toute la vie est le choix du métier, le hasard en dispose. (…) A force d’oüir louer en l’enfance ces métiers et mépriser tous les autres, on choisit. « Voir également fragments 671 et 59. Le fragment 34, intitulé Métiers, semble aller dans ce sens : c’est la douceur de la gloire et non notre nature véritable, notre être, qui nous pousse à prendre une condition plutôt qu’une autre.

 

Enfin, les incohérences sont aussi apparentes dans le choix des dirigeants, des gouverneurs : ainsi le fragment 28 : On ne choisit pas pour gouverner un vaisseau celui des voyageurs qui est de la meilleure maison. Enoncée telle quelle, cette remarque met en évidence l’incohérence des systèmes politiques qui désignent leurs dirigeants par la naissance plutôt que par les compétences. 

 

La vanité des hommes réside donc dans leur folie apparente, c’est-à-dire dans leur incapacité à bien juger ou du moins à juger d’une façon qui résiste à l’examen : les rapports entre sagesse et folie sont examinés par plusieurs fragments : le fragment 24 conclut le fragment 23 sur les origines du respect conféré aux souverains. Leur puissance est fondée d’une part sur la raison mais surtout sur la folie du peuple.

Cependant, le fragment 12 note que Les vrais chrétiens obéissent aux folies néanmoins, non parce qu’ils respectent les folies, mais l’ordre de Dieu qui pour la punition des hommes les a asservis à ces folies. On donne ici un début de réponse chrétienne : la condition de l’homme est misérable à cause de la chute.

 

4. Un autre signe de la vanité des hommes est mis en valeur dans les effets de disproportion, qui semblent à chaque fois remettre les hommes à leur place, leur montrer leur petitesse, leur bassesse : ainsi le fragment 20, sur la puissance des mouches, parfois plus puissantes que les hommes. Ou encore le fragment 40 Peu de chose nous console parce que peu de chose nous afflige. Le fragment 42 esquisse aussi cette idée, qui sera développée par ailleurs : Les causes et les effets de l’amour. Cléopâtre, développé en 392 : Qui voudra connaître à plein la vanité de l’homme n’a qu’à considérer les causes et les effets de l’amour. La cause en est un je ne sais quoi. Corneille. Et les effets en sont effroyables. Ce je ne sais quoi, si peu de chose qu’on ne peut le reconnaître, remue toute la terre, les princes, les armées, le monde entier. Le nez de Cléopâtre, s’il eût été plus court, toute la face du monde aurait changé. Enfin, le fragment 44 tourne en ridicule l’esprit des souverains, dérangé par bien peu. 

 

Dans cette perspective, les divertissements des hommes, et au premier titre ceux des lois, semblent bien futiles : cf fragment 36 : Les hommes s’occupent à suivre une balle et un lièvre.

 

5. Pour empirer encore la situation de l’homme et son incapacité à bien juger, il est inconstant : le fragment 25 : La nature de l’homme n’est pas d’aller toujours. Elle a ses allées et venues. L’inconstance entraîne donc son ennui et son inquiétude : il en est encore plus malheureux. (fragment 22)

 

6. Fragment Imagination 41 : fragment central : explique comment fonctionnent les capacités humaines pour être si totalement inefficaces.

 

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