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De la démocratie en Amérique de Charles Alexis Clérel de Tocqueville (analyse détaillée)

Publié le 21/10/2018

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De la démocratie en Amérique.
Traité historique et politique de Charles Alexis Clérel de Tocqueville (1805-1859), publié à Paris chez Gosse-lin en 1835 (tome I) et en 1840 (tome II).
 
S'embarquant pour l'Amérique en avril 1831 avec son ami Gustave de Beaumont, le jeune magistrat Tocqueville, investi d'une mission d'examen des institutions pénitentiaires américaines, va découvrir le pays où règne l'égalité, le laboratoire de la modernité. Se pose dès lors la question primordiale : si la marche vers l'égalité est inévitable, quels effets aura-t-elle sur la liberté, valeur aristocratique par excellence ?
 
Après une Introduction, l'ouvrage se compose de six parties divisées en chapitres titrés. Les huit chapitres de la première décrivent les institutions américaines. En dix chapitres, la deuxième partie analyse le principe et le mode de fonctionnement de la démocratie. Une conclusion provisoire réunit « dans un seul point de vue » les éléments de ces deux parties formant le premier tome. À partir d'un tableau synthétique de l’Amérique, Tocqueville annonce son futur développement : « Il arrivera donc un temps où l'on pourra voir dans l’Amérique du Nord des hommes égaux entre eux, qui tous appartiendront à la même famille, qui auront le même point de départ, la même civilisation, la même langue, la même religion, les mêmes habitudes, les mêmes mœurs, et à travers lesquels la pensée circulera sous la même forme et se peindra des mêmes couleurs. »
 
Le deuxième tome, paru cinq ans après, est plus abstrait et consolidera l’image de « Montesquieu du xixe siècle » qui sera désormais celle de Tocqueville. « Influence de la démocratie sur le mouvement intellectuel aux États-Unis » (vingt et un chapitres) détaille le rapport entre égalité et production des idées, littérature, Histoire et éloquence. « Influence de la démocratie sur les sentiments des Américains » (vingt chapitres) analyse les mentalités et le « goût des jouissances matérielles ». « Influence de la démocratie sur les mœurs proprement dites » (vingt-six chapitres) est un grand moment sociologique, où Tocqueville passe en revue tous les aspects des mœurs. Enfin « De l’influence qu’exercent les idées et les
sentiments démocratiques sur la société politique » (huit chapitres) aborde les contradictions de la démocratie, en évoquant la possible dérive despotique de l’égalité.
 
« Les Américains ont un état social démocratique qui leur a naturellement suggéré de certaines lois et de certaines mœurs politiques » : l'Amérique permet l'analyse du principe démocratique à l'œuvre, alors que les nations européennes sont déchirées par la lutte de l'aristocratie et de la démocratie, celle-ci devant ainsi détruire un monde pour s'imposer en France (thèse que Tocqueville développe dans l'Ancien Régime et la Révolution, 1856). Principe qui meut la société civile et politique, modelé par les institutions, la religion et les mœurs.
 
L'ouvrage présente d'éminentes qualités stylistiques : phrases bien rythmées, formules éclairantes, précision lumineuse du propos. D'autant que Tocqueville doit d'une part décrire une réalité neuve, et cerner d'autre part la nature même d'un phénomène global aux implications infinies. La démonstration est particulièrement brillante. L'égalité réside non dans le nivellement, mais dans la circulation de l'argent rendue possible par le libre jeu des capacités individuelles. Surtout, elle façonne les intelligences par une éducation minimale commune. De cette démocratie sociale découle la démocratie politique, produit des mœurs nationales. Un protestantisme pluraliste et républicain, un niveau élevé de culture, l'uniformité égali-tàire : Tocqueville définit ainsi la civilisation américaine, où le politique proprement dit s'efface devant le social, puisque les citoyens égaux sont suffisamment éclairés pour réguler leurs passions.
 
Tocqueville examine également le devenir des deux autres groupes humains qui peuplent l'Amérique.

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« Indien s sont condamnés, les Noirs posent le problème potentielleme nt conflictuel de l'esclavage dans une société égalitaire.

Mais son propos capital demeure l'étude fouillée du concept de démocratie, qui s'imbrique dan s celui d'égalité.

Tocqueville mon­ tre bien que la démo cratie est moins un état social réel que l'inte llectu alisa­ tion, la perception d'un rapport égali­ taire par les individus.

Ainsi l'égalité apparaît-elle comme une norme et non comme un fait.

Mais elle est en même temps passion et idéologie ; dès lors elle aiguise le dési r de distinction et l'envie, et Tocqueville élabore un e « théorie de la production des inégali­ tés symboliques,.

(F.

Fur et).

La religion tempère cette d istorsion , redoublant la tendance des individus à accor der leur ambition au possible.

Ces garde-fous sont justement ce qui man­ que aux sociétés post-révolutionnaires, marquées par la ruptur e et la démesure.

« Les passions que la révo lution avait suggérées ne dispara issent po int a vec e ll e.

Le sentim e nt de l'instabilité se perpé tue au milieu de l'ordre» : m ais la démocratie, constamment remise en question par la pas sion de l'égalité en dépit de la canalisation morale et du gar de-fou des institution s, doit gérer cette instabilit é au mieux des intérêts de la liberté, faute de quoi elle conduit au despotis m e.

De là l'intérê t particu­ lier accordé par Tocqueville au r apport e ntr e la production des représentations intellectuelles et l'état social amé ricain.

Cette analyse des idéologies et de leur interactio n avec le so cial éclaire autant la civili satio n amé ric aine que notre moderni té , puisque nous vivons selon les prin cipes et les comportements dont Tocqu eville a délimité la cohé­ rence, l'efficacit é et la longévité.. »

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