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Extrait : Les Conquérants (3e partie, pp 311-313, Livre de Poche) © Grasset

Publié le 30/03/2015

Extrait du document

Nicolaïeff regarde la lampe entourée d'éphémères, fatigué, et fume. Les ventilateurs ne tournent pas ; la fumée monte, droite.

 

.../...

 

 Tandis que le prisonnier parle, d'une voix haletante, Nicolaïeff chasse, en soufflant, les éphémères morts qui tombent sur ses notes.

La victoire du Kuomintang est complète à Canton. Le décret asphyxiant Hong-Kong est promulgué. Garine, le chef de la section cantonaise, apprend l'arrestation de deux suspects. En compagnie du narrateur, il se rend à la Sûreté où Nicolaïeff, responsable de la police politique, les interroge.

« L E C T U R E S MÉTHODIQUES La victoire du Kuomintang est complète à Canton.

Le décret asphyxiant Hong-Kong est promulgué.

Garine, le chef de la section cantonaise, apprend l'arrestation de deux suspects.

En compagnie du narrateur, il se rend à la Sûreté où Nicolaïeff, responsable de la police politique, les interroge.

1 -UNE SCÈNE RAPIDE ET INTENSE Une accélération de l'action La scène débute avec le « marché » proposé par Garine aux prisonniers : cinq minutes pour parler.

La durée se resserre, plus tendue : une, puis deux minutes.

L'action s'accélère lorsque Garine écourte le délai accordé(« Assez!»).

La décision de tirer, le corps qui tombe sont des durées qui se comptent en secondes : une, puis deux.

Le second suspect devance alors toute nouvelle demande et se met à parler dans l'instant, accentuant encore l'impression de rapidité.

Une écriture « minimale » L'art de Malraux repose sur l'économie des moyens.

Dans la narration, tout d'abord, ne sont fournis que les éléments indispensables à la compréhension.

Le meurtre n'est annoncé que par la brève phrase nominale:« La détonation.» Le nar­ rateur ne fait que de brefs commentaires à caractère purement explicatifs : il expli­ cite le mouvement d'épaule sceptique de Nicolaïeff, fait une hypothèse sur son geste de recul après le coup de feu ( « Est-il blessé ? » ), note que le Chinois a compris le message de Gari ne ( « Il comprend, en effet»).

Aucun avis personnel n'est fourni.

Le dialogue, très présent, est entièrement dominé par les ordres très secs de Gari ne ou par ces injonctions sans répliques («Fous-moi la paix », « Tais-toi »).Le laconisme des paroles est l'exact parallèle de la narration minimale : esthétique du dépouillement total.

Le langage de Garine est « performatif» : ses mots ne sont pas des descriptions mais des actes, qui frappent aussi sûrement que des coups.

Il -UNE SCÈNE IMPRÉVISIBLE ET BRUTALE Une descript!?n à« focalisation externe» Toute la scène est vue par le narrateur, personnage qui ne participe à l'action que par I' « emprunt » de son revolver effectué par Garine.

En voyant la scène par ses yeux, nous sommes contraints de n'en percevoir que ce que lui-même en saisit.

Jamais nous ne sommes admis à pénétrer dans la conscience de Garine.

Nous le voyons de l'extérieur selon une technique empruntée au roman américain, récit « behaviouriste » ou « à focalisation externe ».

Nous ne pouvons donc ni com­ prendre, ni anticiper ses actions, ce qui rend imprévisible son comportement et crée un effet d'attente intense.

Une violence glacée Le romancier donne du meurtre une vision distanciée : aucune émotion n'est perceptible (sauf la surprise de Nicolaïeff et celle exprimée par le visage incrédule de la victime).

Malraux emprunte au cinéma ses techniques : « ralenti » pour le corps qui tombe, « gros plan » sur le visage stupéfait du mort.

La mort est théâtra­ lisée par des postures qui ont leur correspondant du côté du meurtrier (regard vide vers le mur, arme à demi baissée qui fume).

Les rares éléments de décor extérieur LES ROMANS DE MALRAUX~. »

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