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Jean Grémillon, metteur en scène de cinéma ( mort en 1959), a écrit: « Le cinéma dispose d'une puissance de conviction jamais encore égalée... On ne pourrait inventer un instrument de connaissance plus convaincant ». L'écrivain Georges Duhamel semble d'un avis totalement opposé, lorsqu'il affirme, dans les Scènes de la vie future, que le cinéma « est un passe-temps d'illettrés ». Que pensez-vous de ces deux assertions ?

Publié le 17/01/2022

Extrait du document

Introduction


• Origines du cinéma,
• Sa confirmation lente comme art et culture,
• Plan annoncé.


Première partie : Cinéma « passe-temps d'illettrés « ?


• Formule à replacer dans son contexte d'époque.
• Voyage aux Etats-Unis de Duhamel.
• Cinéma : Technique, muet, burlesques ; d'où méfiance des intellectuels.
• Le « ciné « de l'Entre-Deux-Guerres.
• Le phénomène des « Stars «.
• Circuits commerciaux (vulgarité, érotisme...).
• Impact de l'image sur la sensibilité.


Deuxième partie : Instrument de Connaissance ? Puissance de conviction inégalée ?


▪ Reconnu de façon certaine de nos jours comme instrument culturel. Niveau artistique indéniable.
• Du Surréalisme ... à nos jours : le bon cinéma : son « avènement définitif parmi les Beaux-Arts «.
• Documentaires. Adaptations et transpositions.
• Grands problèmes humains, politiques, sociaux...
• Le film a plusieurs niveaux ; l'émotion est décuplée par les images et procédés.
• Synthèse des structures du théâtre et du roman.
• Le mouvement.


Conclusion

« doute d'autres raisons de cette incompréhension injurieuse viennent-elles de la façon même dont se développent lesorigines du cinéma.

Œuvre technique, c'est sa technique même qui éloigne d'abord de lui les partisans de la culturetraditionnelle, car elle le rabat à leurs yeux dans un autre circuit, volontiers méprisé.

De plus le cinéma commencepar être muet, or rien n'est plus important pour l'homme cultivé traditionnel que le langage.

Ensuite toutes lespremières bandes ou presque sont burlesques ; de là à les assimiler à Guignol ou aux clowns, il n'y a qu'un pas.Relisons les souvenirs de Sartre et de ses premières séances cinématographiques (Les mots) : les spectaclesdoivent sembler bien primaires à l'intelligentzia, lorsqu'ils consistent en « tartes à la crème » lancées de figures enfigures en gestes un peu granguignolesques traduisant amour ardent ou mélodrames appuyés, en coursesprécipitées, grimaces absurdes...

Puis un certain type de public s'y retrouve : populaire ou d'avant-garde : les «femmes en cheveux » évoquées par Jean-Paul devaient constituer aux yeux de Mme Sartre une promiscuité assezinquiétante.

Ajoutons que même après le passage au « parlant » une légende se forme et persévère, dans l'entre-Deux-Guerres, autour du « ciné », qui semble une distraction facile, à laquelle on se rend pour se rendre, sansdiscernement, en sortie collective ou le Samedi Soir.

A peine le niveau du Théâtre de Boulevard de 2e qualité ! LeCulte des idoles, des « Stars », leurs excès, leur publicité tapageuse n'arrangent rien.

De Rudolf Valentino à JamesDean, en passant par Shirley Temple ou Greta Garbo, que d'éclats, souvent artificiels, et d'une fascination parfoisinquiétante ! Après 40/45 surtout, ce seront d'autres reproches — souvent fondés — qui seront adressés au 7e Art: circuits commerciaux de la vulgarité, facilité, violence, érotisme...

Diffusion abusive et dangereuse pour la jeunessed'images d'horreur ou de surhommes qui exaltent les bas instincts du public.

Ne précise-t-on pas que le crime quicoûta la vie à 8 personnes dont la femme du cinéaste Roman Polanski suivit de très près le scénario d'un film passépeu auparavant ? Car le cinéma agit fortement sur nos sens, touche notre sensibilité ; et la puissance de l'image,supportée passivement en salle noire persiste en ondes prolongées sur notre système sensible.

On va aussi trèssouvent au cinéma pour se perdre dans la masse, « devenir une ombre au milieu d'autres ombres », uniquementattaché à la féérie des images qui défilent.

C'est ce défilé même qui semble à Duhamel inquiétant : «Le dynamismedu cinéma nous arrache les images sur lesquelles notre songerie aimerait à s'arrêter », regrette-t-il, persuadé que lerythme des images est un obstacle à l'attention sérieuse et au rêve, « tare de tout art mécanique », ajoute-t-il. * * * La sévérité de son jugement, même si elle s'explique en partie par le fait que le cinéma était alors en son enfance,se trouve confirmée par les statistiques sur les films médiocres ou mauvais dont le nombre s'est accru avecl'extension cinématographique.

Mais les progrès du cinéma en qualité et en recherches artistiques sont eux aussiindéniables et renvoient les opinions de Duhamel dans un passé bien révolu.

Il n'est plus pensable, semble-t-il, de nepas considérer le cinéma comme un instrument culturel certain, capable d'atteindre un niveau artistique indéniable.Les premiers, les Surréalistes ont reconnu en lui « un miroir du merveilleux », non seulement capable de rivaliseravec la littérature, mais créateur d'expressions aux moyens différents mais d'une profondeur aussi forte, parfoismême plus intense.

C'est une confiance, une foi totales que les Surréalistes portent au cinéma.

«Ce que nous [lui]demandons, écrivait alors Desnos, c'est l'impossible, c'est l'inattendu, le rêve, la surprise, le lyrisme qui effacent lesbassesses dans les âmes et les précipitent, enthousiastes, aux barricades et dans les aventures ; ce que nousdemandons au cinéma, c'est ce que l'amour et la vie nous refusent, c'est le mystère, c'est le miracle ».

Est-ce àdire que le bon cinéma (comme d'ailleurs on dissocie le bon livre de l'infinie production de médiocrités, de paressed'esprit et de bassesses : romans policiers, d'espionnage, d'amour « fleur bleue », d'érotisme...) est « un instrumentde connaissance plus convaincant [que tout autre] » et « d'une puissance de conviction jamais encore égalée » (J.Grémillon) ? A partir des années 60 grâce à des tâtonnements ou des coups de génie (Cocteau par ex.), le cinémaest parvenu à gagner enfin sa véritable place en tant que moyen d'expression, son «avènement définitif parmi lesBeaux-Arts ».

Le véritable cinéma, celui qui parvient à résister aux impératifs commerciaux, n'a pas pour seulefonction le plaisir des yeux ou l'illustration d'un texte, il est une recherche (« instrument de connaissance ») et unmoyen de culture à fort « grande puissance de conviction ».

Cinéma documentaire (Plongées de Cousteau, par ex.,ou cinéma-vérité de Chris Marker) ou littéraire (adaptation de La Symphonie Pastorale de Delannoy, Le Rouge et lenoir d'Autant-Lara..., ou transpositions : d'un épisode de Jacques le Fataliste de Diderot, Bresson fait Les Dames duBois de Boulogne ; partant de Bernanos il monte « Mouchette »...).

Les difficultés de l'homme s'y expriment avec untendre pathétique (Quand passent les Cigognes de Michael Kalatozov ; Les Quatre Cents Coups de Truffaut...), ouune intense angoisse (Le Journal d'un Curé de Campagne, à partir de Bernanos, monté par Bresson ; Le 7e Sceau,ou Les Fraises Sauvages, ou La Nuit des Forains, ou Cris et Chuchotements...

de Bergmann) ; les problèmespolitiques ou sociaux y sont abordés avec courage — pourtant les contraintes politiques pèsent beaucoup plus lourdsur le cinéaste que sur l'écrivain — (La Strada de Fellini, Z de Costa Gavras ; Nous sommes tous des assassins,Sections Spéciales...

de Cayatte).

C'est que les possibilités du film face à celles du livre par ex.

sont celles de lagéométrie dans l'espace par rapport à la géométrie plane.

Le film a plusieurs niveaux ; il nous révèle par ex.

la réalitéà l'état brut (affiches, inscriptions, réclames...) ; une prise de conscience, grâce au montage, de ce que cachecette réalité ; une méditation, souvent, par l'intermédiaire d'un ou des personnages, sur la notion même de réalité.Le langage du cinéma est donc tout à fait original et étendu ; c'est ainsi que « sa puissance de conviction » setrouve décuplée.

Les images ont leur sens propre, la succession des plans le sien.

L'émotion esthétique suscitéepeut être plus profonde que toute autre à cause de la force de ces images.

Elles couvrent tout le champ du monderéel qu'elles mettent à la portée de la main et tout le champ du monde imaginaire « puisqu'il participe aussi bien dela vision du rêve que de la perception de veille » (E.

Morin), cumulant « la qualité magique et la qualité objective»(idem).

L'image est plus encore symbole que signe ; « elle représente donc restitue une présence ».

Surimpression,fondu enchaîné, retours en arrière, gros plan, succession des plans, toutes les techniques de la caméra et dumontage « mettent en action [...] des processus [...] de rationalisation qui vont contribuer à la constitution d'un. »

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