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JÉSUITE (littérature)

Publié le 30/12/2018

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JÉSUITE (littérature) [xvie -xviiie siècle]. De sa création par Ignace de Loyola (1540) à sa dissolution temporaire en 1774, la Compagnie de Jésus a pris une part importante à la vie religieuse et culturelle. La production littéraire de ses membres culmine au xviie siècle, et son influence se prolonge par l’éducation, puis par la presse. On ne saurait donner ici que les lignes principales de son action, en tenant compte de son rôle international et des attaques violentes qu’elle a suscitées.

 

Le combat et la Contre-Réforme

 

La Compagnie de Jésus a été fondée pour restaurer la catholicité en Europe, où elle est attaquée par le protestantisme, et la diffuser en terre païenne (missions au Japon, en Chine, au Canada). Plusieurs moyens de lutte contre l’hérésie sont simultanément employés :

 

l’élaboration d’ouvrages théologiques clairs et précis, qui serviront longtemps de référence; ils sont écrits en latin, par ex. les Controversiae du cardinal Bellarmin, le catéchisme (Summa doctrinae christianae) du P. Canisius;

 

des travaux érudits abondants sur la tradition catholique, appuyant la théologie moderne sur l’histoire et les textes anciens : Fronton du Duc, Sirmond, Maim-bourg, Pétau...;

 

la controverse orale et imprimée, surtout pendant les règnes d’Henri IV et de Louis XIII : Auger, Coton et surtout Véron, qui, le premier, utilise systématiquement la Bible pour combattre les protestants sur leur propre terrain.

Durant la période initiale de la Contre-Réforme, et bien que les jésuites français célèbrent à l’envi la monarchie, l’ordre est suspect de favoriser le pape et le roi d’Espagne (controverse sur le tyrannicide, dont les jésuites espagnols Mariana et Sa soutiennent la légitimité contre un roi hérétique), et l’action des prédicateurs et des confesseurs royaux jésuites est souvent jugée néfaste par les milieux gallicans et surtout les parlementaires (Pasquier, Arnauld, Servin).

 

Le militantisme religieux donne ensuite aux jésuites d’autres adversaires : les libertins (le P. Garasse obtient l’ouverture de poursuites contre Théophile de Viau) [voir Libertins], puis les jansénistes (dont Pascal, qui écrit contre eux ses Lettres à un provincial) [voir Jansénisme, Pascal]. Leurs doctrines théologiques, marquées d’un certain optimisme (doctrine de Molina sur l’efficacité de la Grâce) et du souci de l’individu (casuistique qui juge de la gravité des péchés selon leur contexte), les font accuser d’immoralité par les partisans de l’augustinisme, plus austère. Ils sont enfin condamnés (1715) dans la « querelle des rites chinois », où, à propos des Chinois nouvellement baptisés, le problème des relations entre le catholicisme et les habitudes de culte de chaque civilisation était posé.

 

Spiritualité, imagination, langage : le « style jésuite »

 

Encore qu’ils n’en soient pas les initiateurs, les jésuites semblent avoir consciemment suivi les lignes de force de la sensibilité baroque : une spiritualité exigeante, aidée par l’imagination, guidée par la séduction et la force du langage. Le goût du pathétique (culte des martyrs, du Sacré-Cœur) s’allie au sens du lyrisme et de l’ornement. Les Exercices spirituels d’Ignace de Loyola, écrits en espagnol, servent de modèle à une littérature qui use de l’imaginaire pour une pédagogie du sacré (méditations sur la Passion, par ex.) — tendance générale qui est perceptible dans les livrets édifiants (variations sur les Artes moriendi de Costerius, d’Alvarez 

« Durant la période initiale de la Contre-Réforme, et bien que les jésuites français célèbrent à l'envi la monar­ chie, l'ordre est suspect de favoriser le pape et le roi d'Espagne (controverse sur le tyrannicide, dont les jésui­ tes espagnols Mariana et Sa soutiennent la légitimité contre un roi hérétique), et 1' action des prédicateurs et des confesseurs royaux jésuites est souvent jugée néfaste par les milieu x gallicans et surtout les parlementaires (Pasquier, Arnauld, Servin).

Le mili ta n tisme religieux donne ensuite aux jésuites d'autres adversaires : les libertins (le P.

Garasse obtient l'ouverture de poursuites contre Théophile de Viau) [voir LIBERTINS], puis les jansénistes (dont Pascal, qui écrit contre eux ses Lettres à un provincial) [voir JANSÉ­ NISME, PASCAL].

Leurs doctrines théologiques, marquées d'un certain optimisme (doctrine de Molina sur l'effica­ cité de la Grâce) et du souci de l'individu (casuistique qui juge de la gravité des péchés selon leur contexte), les font accuser d'immoralité par les partisans de l'augusti­ nisme, plus austère.

Ils sont enfin condamnés ( 1715) dans la «querelle des rites chinois », où, à propos des Chinois nouvellement baptisés, le problème des relations entre le catholicisme et les habitudes de culte de chaque civilisation était posé.

Spiritualité, imagination, langage : le cc style jésuite ,, Encore qu'ils n'en soient pas les initiateurs, les jésui­ tes semblent avoir consciemment suivi les lignes de force de la sensibilité baroque : une spiritualité exigeante, aidée par 1' imagination, guidée par la séduction et la force du langage.

Le goût du pathétique (culte des mar­ tyrs, du Sacré-Cœur) s'allie au sens du lyrisme et de l'ornement.

Les Exercices spirituels d'Ignace de Loyola, écrits en espagnol, servent de modèle à une littérature qui use de l'imaginaire pour une pédagogie du sacré (méditations sur la Passion, par ex.) -tendance générale qui est perceptible dans les livrets édifiants (variations sur les Artes moriendi de Costerius, d'Alvarez de Paz), dans les prédications en milieu populaire (Bourdaloue, Jean-François Régis), comme dans la plus haute spiritua­ lité (Lallemant).

Les œuvres mêlées de travaux érudits, polémiq ues et littéraires des PP.

Binet, Pétau et Le Moyne montrent le lien qui unit alors l'héritage de l'hu­ manisme dé'vot (celui de François de Sales, du P.

Richeome) et le style orné, foisonnant de figures et de descriptions symboliques: «Je n'ai pas suivi, dans ce traité des cho'Ses divines, le chemin battu de la vieille école; j'ai pris un chemin nouveau et, je puis le dire sans orgueil, un chemin où jusqu'ici personne n'avait encore posé le pied.

Mettant de côté cette théologie subtile qui marche, à 1 'e xemple de la philosophie, à travers je ne sais quels dédales obscurs, j'en ai fait une simple, agréable, sortant comme un fleuve rapide de ses sources pures et natives qui sont l'Ecriture, les conciles et les Pères, et, au lieu d'un visage hérissé et presque barbare qui fait peur, je lui ai donné une physionomie polie et aimable qui attire» (lettre du P.

Pétau présentant en 1644 ses Dogmata catholica).

Contre la sobriété du classicisme naissant, contre le style érudit enrichi de citations prôné par les parlemen­ taires, les jésuites choisissent de prolonger l'érudition disparate de la fin du xvie siècle et préfère nt l'art de cour.

Pour les nécessités de l'enseignement et de la prédic a­ tion, ils deviennent les auxiliaires d'un renouveau de la rhétorique, ce dont témoig nent les traités latins du P.

Caussin (Eloquentiae sacrae et humanae parallela, 1619), du P.

de Cressolles (Theatrum veterum rhetorum, oratorum et sophistarum, 1620), du P.

Pelle tier (Reginae palatium eloquentiae, 1640) et du P.

Josset (Rhetorica, 1650).

Puis s'amorce la réconciliation de la rhétorique avec le goût classique du «je-ne-sais-quoi » et l'esthéti­ que du sublime, réconciliation marquée par un intérêt nouveau pour les belles-lettres et ce que nous nomme­ rions une > (Bouhours, Entretiens d'Ariste et d'Eugène, 1671; Rapin, Réflexions sur la poé­ tique de ce temps, 1675).

L'enseignement des humanités Utiliser les goûts mondains pour une fin religieuse n'est possible que dans une politique culturelle visant à la conquête des classes dirigeantes par 1 'éducation.

Dès leur installation en France, les jésuites ont placé au col­ lège de Clermont, à Paris, leurs meilleurs professeurs (Maldonat, Fronton du Duc, Sirmond, Pétau).

Favorisés par le déclin de l'Université, ils vont développer un enseignement qui conjugue les visées doctes et les visées mondaines.

Les programmes (Ratio studiorum du P.

Pos­ sevin de 1586 et 1599, revu en 1692 par le P.

de Jou­ vancy) privilégient les lettres anciennes, enseignées sur des textes expurgés et annotés à l'usage des élèves (sou­ vent utilisés jusqu'au xtxe siècle), selon des difficultés graduées.

La Ratio studiorum s·organise en : - cinq ans de studia inferiora : trois ans de grammaire.

un an d·humanitates, un an de rhétorique.

Les exercices de base sont la praelectio ou lecture commentée, la déclama­ tion et la composition en prose et vers latins.

qui.

seule.

peut apprendre le beau style et le goût.

On enseigne à propos des textes !"histoire et la géographie.

Les auteurs profanes sont abordés avant les auteurs chrétiens.

réputés plus difficiles.

Ce cycle d'enseignement est le plus fo rte­ ment suiv i et constitue donc la base de la formation des élites de râge classiq ue; - trois ans de studia superiora, consacrées à la philo­ sophie.

où sont comprises les sciences; - quatre ans de théologie pour les futurs membres de l'ordre.

Vers le début du xvme siècle, on enseigne la culture française en prenant pour modèles des auteurs modernes (Patru, pour l'éloquence judiciaire; Bourdaloue, pour l'éloquence religieuse; Corneille; Racine), inaugurant ainsi le mythe des «grands classiques », et le P.

Porée fait composer ses élèves en français.

On cherc he à su iv re .

la mode plutôt qu'à la contrarier : ainsi, un des aspects originaux est la pratique du théâtre dans les fêtes des collèges.

Alors que l'hostilité au théâtre corrupteur est un lieu commun des universitaires et des théol ogie n s, les jésuites l'encouragent.

Ils ont une grande influence sur leurs élèves (Corneille, Voltaire en font partie) et eux­ mêmes se font auteurs (Stefonio, Delidel, Porée) ou tra­ ducteurs (Brumoy, le Théâtre des Grecs, 1730).

La représentation théâtrale doit développer l'aisance, la mémoire, l'art oratoire et former l'esprit des élèves; les su jets, le plus souvent tragiques, servent à l'instruction religieuse, morale et politique; ils sont choisis dans l'ha­ giographie, mais surtout dans la Bible et dans l'histoire romaine ; ils comportent des ballets, intermèdes dansés en rapport ou non avec le thème de la pièce, à dominante allégorique ou démarqués d'œuvres littéraires (Téléma­ que fournit près de vingt canevas).

L'exemple du collège de Clermont (aujourd·hui lycée Louis-le-Grand).

Entre 1701 et 1761 sont représentées 136 pièces (4 drames.

38 comédies.

94 tragédies) [dont 7 comédies et 22 tragédies en latin] et 48 ballets.

En 1764.

à sa ven te.

la Bib li o th èqu e comprend le théâtre complet de onze auteurs {dont Corneille.

Molière.

Regnard.

Boursault).

42 vol umes d·Anciennes Pièces de théâtre.

et les 13 vo lu ­ mes de !Histoire du théâtre français des frères Parfaict.

Face à la philosophie des Lumières La Compagnie de Jésus a eu le souci du modernisme scientifique, et elle a formé de nombreux savants (Ricci,. »

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