La blanchisseuse Gervaise visite la fabrique de boulons où travaille l'ouvrier boulonnier Goujet, surnommé la Gueule d'Or et observe ce dernier au travail
Publié le 14/02/2011
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C'était le tour de la Gueule d'Or : Avant de commencer, il jeta à la blanchisseuse un regard plein d'une tendresse confiante. Puis, il ne se pressa pas, il prit sa distance, lança le marteau de haut, à grandes volées régulières. Il avait le jeu classique, correct, balancé et souple. Fifine 1, dans ses deux mains, ne dansait pas un chahut de bastringue, les guibolles emportées par-dessus les jupes; elle s'enlevait, retombait en cadence, comme une dame noble, l'air sérieux, conduisant quelque menuet ancien. Les talons de Fifine tapaient la mesure, gravement; et ils s'enfonçaient dans le fer rouge, sur la tête du boulon, avec une science réfléchie, d'abord écrasant le métal au milieu, puis le modelant par une série de coups d'une précision rythmée. Bien sûr, ce n'était pas de l'eau-de-vie que la Gueule d'Or avait dans les veines, c'était du sang, du sang pur, qui battait puissamment jusque dans son marteau, et qui réglait la besogne. Un homme magnifique au travail, ce gaillard-là ! Il recevait en plein la grande flamme de la forge. Ses cheveux courts, frisant sur son front bas, sa belle barbe jaune, aux anneaux tombants, s'allumaient, lui éclairaient toute la figure de leurs fils d'or, une vraie figure d'or, sans mentir. Avec ça, un cou pareil à une colonne, blanc comme un cou d'enfant; une poitrine vaste, large à y coucher une femme en travers; des épaules et des bras sculptés qui paraissaient copiés sur ceux d'un géant, dans un musée. Quand il prenait son élan, on voyait ses muscles se gonfler, des montagnes de chair roulant et durcissant sous la peau ; ses épaules, sa poitrine, son cou enflaient; il faisait de la clarté autour de lui, il devenait beau, tout-puissant comme un bon Dieu. ZOLA 1. Fifine. Nom donné à l'une des masses de l'atelier. Vous présenterez de ce texte un commentaire composé; vous pourrez en particulier montrer comment la réalité, présente dans cette page, s'anime et se transfigure sous la plume de l'écrivain. CORRIGÉ Remarques préalables Les candidats étaient invités à étudier, dans cet extrait de l'Assommoir, le passage de la réalité au mythe, surprenant chez un écrivain qui prétend faire œuvre scientifique, et se déclare « naturaliste «.
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- Marx • "Dans la manufacture et le métier, l'ouvrier se sert de son outil ; dans la fabrique il sert la machine. Là le mouvement de l'instrument de travail part de lui ; ici il ne fait que le suivre. Dans la manufacture les ouvriers forment autant de membres d'un mécanisme vivant. Dans la fabrique ils sont incorporés à un mécanisme mort qui existe indépendamment d'eux." > Karl Marx, Le Capital (1867), Livre I, IVe section, chapitre XV, IV (La fabrique). Commentez cette citation.
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