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Le temps de vivre. Anna de Noailles, Le Coeur innombrable (commentaire)

Publié le 12/02/2011

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temps

Déjà la vie ardente incline vers le soir, Respire ta jeunesse, Le temps est court qui va de la vigne au pressoir, De l'aube au jour qui baisse ; Garde ton âme ouverte aux parfums d'alentour, Aux murmures de l'onde, Aime l'effort, l'espoir, l'orgueil, aime l'amour, C'est la chose profonde; Combien s'en sont allés de tous les cœurs vivants Au séjour solitaire Sans avoir bu le miel ni respiré le vent Des matins de la terre, ... Ils n'ont pas répandu les essences et l'or Dont leurs mains étaient pleines, Les voici maintenant dans cette ombre où l'on dort Sans rêve et sans haleine; Toi, vis, sois innombrable à force de désirs De frissons et d'extase, Penche sur les chemins où l'homme doit servir Ton âme comme un vase, Mêlée aux jeux des jours, presse contre ton sein La vie âpre et farouche Que la joie et l'amour chantent comme un essaim D'abeilles sur ta bouche... Anna de Noailles, Le Cœur innombrable.  

SUJET Vous proposerez un commentaire composé de cette pièce tirée du premier recueil de la poétesse Anna de Noailles. Vous pourrez essayer de montrer comment ces vers entremêlent poétiquement les joies ardentes de la vie et l'anxiété du temps qui s'écoule.   

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« alors le sensualisme de surface pour atteindre à une communion avec la nature. Le temps qui passe s'inscrit aussi dans l'ordre naturel : dans le premier quatrain, la vie humaine est comparée aune journée, «le soir», «De l'aube au jour qui baisse», de l'enfance à la vieillesse.

A noter que nous avons là untemps linéaire, alors que très souvent dans la poésie romantique celui-ci est réservé à l'homme, la natureconnaissant un perpétuel renouveau grâce au temps cyclique. La fugacité du temps, «le temps qui court» avec l'emploi du verbe de mouvement exprimant la rapidité, est causeessentielle de la hâte de vivre et de goûter aux plaisirs. Deuxième partie.

L'ordre de l'amour. La communication ne se limite pas aux choses naturelles.

Elle concerne aussi tout ce qui émane de l'être humain :«Aime l'effort, l'espoir, l'orgueil».

Puis le sentiment lui-même importe : plus que l'objet ou l'être, c'est le principe : «...

aime l'amour, C'est la chose profonde.

» Noter à la fin du texte également la dernière image : «...

presse contre ton sein La vie âpre et farouche ». Les défunts eux-mêmes sont désignés par «les cœurs vivants>. La forme même du poème confirme cette impression : les impératifs, l'apostrophe «toi», indiquent que le texte parled'Anna de Noailles, mais aussi interpelle «l'Autre».

Il ne faudrait pas, toutefois, exagérer l'altruisme : l'appel aulecteur n'est peut-être qu'apparent.

Derrière le tutoiement, l'interpellation concerne profondément l'auteur et lepoème épanche essentiellement un lyrisme personnel. Contraste flagrant (toi/les morts) avec les regrets de ceux qui n'ont pas su capter les joies sensibles, « Sans avoir bu le miel ni respiré le vent Des matins de la terre» qui n'ont pas su donner : « Ils n'ont pas répandu les essences et l'or Dont leurs mains étaient pleines». Tout homme possède ces richesses, mais elles sont, dans ce cas, inemployées. Troisième partie.

L'ordre de la vie et de la mort. La menace de la mort est présentée en deux temps : le premier mot du poème «Déjà» marque bien la rapidité aveclaquelle la vie s'écoule.

Les termes indiquant le déclin soulignent l'affaiblissement des forces vitales : « incline vers lesoir », « De l'aube au jour qui baisse ».

Ici, la courbe descendante est ressentie « très tôt, dès la jeunesse »., elleest surtout perçue de l'intérieur.

Puis, l'expérience des autres constitue une mise en garde « Combien s'en sont allés».

La mort, sans être décrite de façon lugubre, effraie pourtant.

Elle se caractérise par la solitude, par le sommeil del'âme et des sensations, alors que le suprême bonheur réside dans la communication avec les êtres et les choses.

Laleçon est alors double : regret de ceux qui n'ont pas su vivre, certitude de la mort. A ce sommeil « Sans rêve et sans haleine», l'auteur oppose le souffle de vie : «Respire ta jeunesse».

La successiondes impératifs accroît le pathétique de la «leçon».

Le début du texte, les parfums, le murmure de l'onde, peut laissercroire à une certaine douceur.

Mais l'impression dominante est plutôt celle d'une fièvre : «à force de désirs»,«frissons» et «extase», «vie âpre et farouche».

L'adjectif «ardente» surtout est à prendre au sens fort : il désignece qui brûle.

En dépit de l'harmonieuse succession des alexandrins et des hexamètres, l'ivresse qui consume etl'exaltation dominent bien le poème. INTRODUCTION — Pour situer le poème, l'élève peut se référer au regain du lyrisme à la fin du XIXe siècle.

Succédant ausymbolisme, un groupe de poètes, parmi lesquels de nombreuses femmes, chante les sentiments, la joie de vivre etson inquiétude. — Si les références historiques manquent, le thème du temps qui passe et la nécessité de profiter de la vie ouvrentconvenablement l'introduction.

CONCLUSION Après avoir repris les grandes lignes du texte, la conclusion compare le lyrisme d'Anna de Noailles à des poèmes bien. »

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