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Les Oraisons funèbres de Bossuet et l'Histoire.

Publié le 13/02/2012

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bossuet

Montrez, par quelques exemples, comment Bossuet, dans ses Oraisons funèbres, respecte la vérité historique.

L'un des mérites de Bossuet, dans ses Oraisons funebres, est d'avoir ramené ce genre un peu faux au vrai but de tout discours chrétien, l'édification des auditeurs. En esquissant la vie de Michel Le Tellier, des deux Henriette, de la reine Marie-Thérèse, de la Palatine et de Condé, c'est l'histoire de tout le xviie siècle qu'il raconte avec l'ampleur de vues, la puissance de synthèse, la perspicacité qu'il porte partout. Mais s'il propose à la reconnaissance des fidèles les vertus et les talents d'un mort illustre, il veut faire sentir à toutes les conditions, surtout aux courtisans épris de la vie brillante, le néant des grandeurs humaines et la nécessité de ne songer qu'à Dieu (1).

bossuet

« Dans la mort de Charles Pr, it voit le resultat des troubles dont Pheresie anglicane est la cause.

Sans doute - et nous apporterons des restrictions a ce jugement - ce ne fut pas le seul motif de la chute du roi; mais e'en a ete la raison initiale; et Bossuet, qui voit les choses du point de vue le plus Neve, neglige volontiers les causes gull estime secondaires.

D'ailleurs, la bienseance, la delicatesse lui en faisaient -elles ici un devoir. Plus tard it loue I'integrite de Michel Le Tellier; mais qui done, dans son auditoire, n'a pas souscrit a cette louange? Pendant la Fronde et sous le grand regne, Le Tellier s'est montre mimstre intelligent, excellent eleve de Mazarin, avec l'integrite, la probite en plus.

Quant au recit de la Fronde, Bossuet en a caracterise, avec une sobriete nette et vigoureuse, les ambi- tions coalisees qui faillirent arreter a ses debuts une administration qui allait se montrer intelligente a tant d'egards. Le .portrait de la Palatine ne doit pas davantage a l'imagination, a la fantaisie : elle fut telle qu'il la montre, brillante d'attraits et de talents, supe- rieure en vigueur d'esprit, en prudence politique, en dexterite; insatiable de plaisirs, longtemps degagee du frein des croyances chretiennes, puis enfin pleinement convertie, adonnee a toutes les austerites. Marie-Therese, si effacee dans l'histoire, a, chez Bossuet, sa physionomie bien ressemblante; Porateiir a dit l'obscurite de cette vie royale a qui la pudeur fit une solitude au milieu de Versailles.

S'il parle moms de la de- funte que du roi qui la meconnut, n'est-ce pas un trait de ressemblance de plus avec l'insignifiance du role politique de l'une et Pegoisme de I'autre, qui avouait que le trepas de la reine etait t le premier chagrin qu'elle lui efit donne? ) Deux portraits surpassent tous les autres par la .precision du dessin et Pintensite de la couleur : celui de Madame et celui du prince de Conde. ' Bossuet les a peints avec amour, et la vivacite de ses souvenirs l'emportait. Puis son time repondait a ces deux Ames et d'intimes sympathies les lui faisaient penetrer.

Ce qu'il y avait en lui de tendresse profonde etait remue par la mort cruellement precoce de Madame; la gloire et le vaste genie du prince de Conde interessaient les, plus hautes parties de son intelligence et tout ce qui, en lui, tendait a Vachon et aux grands efforts.

Aussi les a-t-il fait revivre tous deux avec un egal bonheur : Madame, illuminant les palais de sa jeunesse et de son visage riant, vive d'esprit, mais serieuse et sensee, juge excellente de tous les ecrits, toute spirituelle, toute gracieuse et toute bonne, discrete, modeste, sensible, d'une liberalite exquise, d'une incom- parable douceur qu'elle garda meme envers la mort; le prince de Conde, avec ses regards etincelants, sa haute et fiere contenance, d'une valeur tome- rake et d'une prudence consommee, grand homme de guerre et bon pore de famille, tendre a ses amis, ennemi de la flatterie, civil, obligeant, sociable, connaisseur delicat et protecteur &claire des arts et des lettres, d'une humeur vive et s'emportant en soudaines saillies, fougueuse et indomptable nature que les obstacles irritaient jusqu'a la fureur, et, par un etrange contraste, sables; tour a tour par les voles les plus detournees et les plus lentes, ou par les plus brusques et les plus hardies.

I1 excellait pareillement & gagner ou li dominer les hommes dans les relations personnelles et intimes, a organiser et It conduire une armee ou un parti.

Il avait Pinstinct de la popularite et le don de Pautorlte, et it sut, avec la meme audace, dechalner et dompter les factions.

Mats, ne dans le sein d'une revolution, et porte de secousse en secousse au pouvoir supreme, son genie etait et demeura toujours essen- tiellement revolutionnaire; tl avait apprisis connaitre les necessites de l'ordre et du gouvernement; it n'en savait ni respecter ni pratiquer les lois morales et permanentes.

Que ce fat le tort de sa nature ou le vice de sa situation, 11 manquait de regle et de serenite dans i'exercice du pouvoir, recourait sur le champ aux moyens extremes, comme un homme toujours assailli par des perils mortels, et perpetuait ou aggravait, par la violence des remedes, les maux violents qu'il voulait guerir.

La fondation d'un gouverne- ment est une oeuvre qui exige des procedes plus reguliers et plus conformes aux lois eternelles de l'ordre moral.

Cromwell put asservir la revolution qu'il avait I aite, et ne parvint point a la fonder.

311loins puissants pent-etre par les dons naturels, Guillaume III et Washington ont reussi dans l'entreprise obi Cromwell a &hone : ils ont fixe le sort et fonde le gouver- nement de leur patrie...

C'est que, meme au milieu d'une revolution, ils n'ont jamais accepte ni pratique la politique revolutionnaire; ils se sont trouves ou se sent places eux-m8mes, des leurs premiers pas, dans les voles rAgulieres et dans les conditions permanentes du gouvernement...

s Hist.

de la Renal.

d'Angleterre. Dans la mort de Charles rer, il voit le résultat des troubles dont l'hérésie anglicane est la cause.

Sans doute - et nous apporterons des restrictions à ce jugement - ce ne fut pas le seul motif de la chute du roi; mais c'en a été la raison initiale; et Bossuet, qui voit les choses du point de vue le plus élevé, néglige volontiers les causes qu'il estime secondaires.

D'ailleurs, la bienséance, la délicatesse lui en faisaient-elles ici un devoir.

Plus tard il loue l'intégrité de Michel Le Tellier; mais qui donc, dans son auditoire, n'a pas souscrit à cette louan~e? Pendant la Fronde et sous le grand règne, Le Tellier s'est montré mimstre intèlligent, excellent élève de Mazarin, avec l'intégrité, la probité en plus.

Quant au récit de la Fronde, Bossuet en a caractérisé, avec une sobriété nette et vigoureuse, les ambi­ tions coalisées qui faillirent arrêter à ses débuts une administration qui allait se montrer intelligente à tant d'égards.

Le portrait de la Palatine ne doit pas davantage à l'imagination, à la fantaisie : elle fut telle qu'il la montre, brillante d'attraits et de talentS, supé­ rieure en vigueur d'esprit, en prudence politique, en dextérité; insatiable de plaisirs, longtemps dégagée du frein des croyances ch~étiennes, puis enfin pleinement convertie, adonnée à toutes les austérités.

Marie-Thérèse, si effacée dans l'histoire, a, chez Bossuet, sa physionomie bien ressemblante; l'orateur a dit l'obscurité de cette vie royale à qui la pudeur fit une solitude au milieu de Versailles.

S'il J.>arle moins de la dé­ funte que du roi gui la méconnut, n'est-ce pas un trait de ressemblance de plus avec l'insigmfiance du rôle politique de l'une et l'égoïsme de l'autre, qui avouait que le trépas de la reine était « le premier chagrin qu'elle lui eût donné?» « Deux portraits surpassent tous les autres par la précision du dessin et l'intensité de la couleur : celui de Madame et celui du prince de Condé.

Bossuet les a peints avec amour, et la vivacité de ses souvenirs l'emportait.

Puis son âme répondait à ces deux âmes et d'intimes sympathies les lui faisaient pénétrer.

Ce qu'il ~ avait en lui de tendresse profonde était remué par la mort cruellement precoce de Madame; la gloire et le vaste génie du prince de Condé intéressaient les plus hautes parties de son intelligence et tout ce qui, en lui, tendait à· l'actiOn et aux grands efforts.

Aussi les a-t-il fait revivre tous deux avec un égal bonheur : Madame, illuminant les palais de sa jeunesse et de son visage riant, vive d'esprit, mais sérieuse et sensée, juge excellente de tous les écrits, toute spirituelle, toute gracieuse et toute bonne, discrète, modeste, sensible, d'une libéralité exquise, d'une incom­ parable douceur qu'elle garda même envers la mort; le prince de Condé, avec ses regards étincelants, sa haute et fière contenance, d'une valeur témé­ raire et d'une prudence consommée, grand homme de guerre et bon père de famille, tendre à ses amis, ennemi de la flatterie, civil, obligeant, sociable, connaisseur délicat et protecteur éclairé des arts et des lettres, d'une humeur vive et s'emportant en soudaines saillies, fougueuse et indomptable nature que les obstacles irl"itaient jusqu'à la fureur, et, par un étrange contraste, sables; tour à tour par les voies les plus déto.urnées et les plus lentes, ou par les plus brusques et les plus hardies.

Il excellait pareillement à gagner ou à dominer les hommes dans les relations personnelles et intimes, à organiser et à conduire une armée ou un parti.

Il avait l'instinct de la popularité et le don de l'autorité, et il sut, avec la même audace, déchainer et dompter les factions.

Mais, né dans le sein d'une révolution, et porté de secousse en secousst' au pouvoir suprême, son génie était et demeura toujours essen­ tiellement révolutionnaire; il avait appris à connaitre lés nécessités de l'ordre et du gouvernement; il n'en savait ni respecter ni pratiquer les lois morales et permanentes.

Que ee fût le tort de sa nature ou le vice de sa situation, il manquait de règle et de sérénité dans l'exercice du pouvoir, recourait sur le_ champ aux moyens extrêmes, comme un homme toujours assailli par des périls mortels, et perpétuait ou aggravait, par la violence des remèdes, les maux violents qu'il voulait guérir.

La fondation d'un _gouverne­ ·ment est une œuvre qui exige des procédés plus réguliers et plus conformes aux lois éternelles de l'ordre moral.

Cromwell put asservir la révolution qu'il avait faite, et ne parvint point à la fonder.

« Moins puissants peut-être par les dons nàturels, Guillaume lll et Washington ont réussi dans l'entreprise où Cromwell a échoué : ils ont fixé le sort et fondé le gouver­ nement· de leur patrie ...

C'est que, même au milieu d'une révolution, ils n'ont jamais accepté ni pratiqué la politique révolutionnaire; ils se sont trouvés ou se sont placés eux-mêmes, dès leurs premiers pas, dans les voies régulières et dans les conditions permanentes du gouvernement ...

» Hist.

de la Révol.

d'Angleterre.. »

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