Devoir de Philosophie

L'art modifie-t-il notre rapport à la réalité ?

Publié le 02/01/2005

Extrait du document

Mise en question.La forme incisive de l'écriture nietzschéenne l'amène souvent à privilégier Inélégance de l'expression par rapport à la profondeur de la pensée. Plutôt une pensée vive mais inexacte qu'une réflexion totalisante rendant compte de la complexité du vrai.Nietzsche prétend que l'art est expression des pulsions de vie. Mais il en est de même de toutes les activités de l'homme. Il ne dit pas ce qui fait la spécificité de l'art par rapport à d'autres aspects de la socialisation qui ont aussi à faire avec les fonctions vitales: les rituels, la guerre, les révolutions.Et si l'art était plutôt expression des pulsions de mortConclusion.Dans ce texte, Nietzsche interprète l'art à la lumière d'une théorie générale selon laquelle l'ensemble des activités humaines doit se comprendre comme expression des pulsions vitales. Le secret de l'art échappe à l'art; seul le philosophe peut le révéler. Cette thèse de Nietzsche annonce la découverte freudienne qui fera de l'art la sublimation des pulsions libidinales.

« défini comme un pseudo-producteur, comme un producteur aveugle de pures et simples apparences.

Car, ditGlaucon, il est certes possible de «produire» avec un miroir, mais ce seront des apparences, et non pas des étants«en vérité» (alètheia).

Le peintre produit un lit «apparent », c'est-à-dire inconsistant.

Et le menuisier ? « Il neproduit pas une Forme, ou ce qu'est le lit, mais seulement un lit particulier » (597 a).

Il ne produit pas la vérité ensoi du lit, c'est-à-dire un lit parfaitement clair, car le bois du lit, le style, la facture, ne font qu'introduire del'obscurité dans la clarté de l'essence du lit.

Cependant il produit vraiment un lit.D'où la hiérarchie des trois lits, qu'établit le texte: le premier lit, l'unique qui soit existant « par nature », lePrototype, l'aspect essentiel établi ou contrôlé par le dieu lui-même ; le second, fabriqué par le menuisier; letroisième, peint par le peintre.

Ici le terme « nature », phusis, signifie bien entendu, l'essence, ce qui se montre desoi-même, par opposition à ce qui est produit par le moyen d'autre chose.

Imitation de la nature veut dire pourPlaton, imitation de l'eïdos, de l'Idée.

L'Idée n'est pas véritablement produite par le dieu.

Il la laisse s'épanouir etveille seulement sur son identité et unicité éternelle.

Car s'il y en avait deux, elles auraient nécessairement unenature commune, et se réduiraient à une troisième.

Ainsi il y a trois sortes de «préposés » à trois modes deprésence de l'être: «Le peintre, l'artisan, le dieu sont ces trois préposés qui président à trois modes de l'eïdos dulit.»Platon distingue donc trois degrés de « production », c'est-à-dire de « venue à la présence », et trois types de «producteurs » : 1.

Le dieu - « il laisse surgir la nature » (phusisphuei).

Dieu seul est artiste, dira Schelling.

Il est nommé phutourgos:celui qui prend soin de la présentation du pur Aspect des choses ;2.

L'artisan - « l'ouvrier du lit » (dèmiourgos klinés), celui qui laisse apparaître dans le bois cet objet disponible, àchaque fois singulier, qui correspond vraiment à l'idée du lit;3.

Le peintre - il ne fait paraître ni le pur Aspect du lit, ni un lit utilisable, mais il obscurcit lourdement l'eïdos par lamatière de la couleur et de la surface peinte, ainsi que par l'angle unique, réducteur, sous lequel est présentél'objet.

Le tableau est ainsi la «troisième production», la troisième « à partir de la nature », dit le texte (597 e),c'est-à-dire à partir de l'Idée.

L'« imitateur » (mimètès) est celui qui préside à ce troisième degré d'éloignement parrapport à la vérité.

Il mérite le nom d'«ouvrier de l'image », car il se propose non pas de représenter le lit tel qu'ilest, mais tel qu'il paraît.L'artiste a-t-il de cette apparence fantomatique le moindre savoir ? Peut-on apprendre d'un peintre la façon de faireun lit ? Peut-on apprendre d'un poète qui chantera une guérison la manière de guérir ? Les poètes ne savent pas dequoi ils parlent.

Ils seraient incapables de « rendre raison » de ce qu'ils imitent.

Ainsi, dit Platon, Homère traite de laguerre, du commandement des armées, du gouvernement des cités, de l'éducation des hommes, mais si onl'interrogeait sur ces techniques, il ne pourrait nous donner aucun principe de ces diverses activités, nous dire parexemple pourquoi une cité est bien ou mal gouvernée.

L'imitation artistique et poétique ne repose sur aucuneconnaissance.

Le poète, l'artiste, n'ont « ni science ni opinion droite » des choses qu'ils imitent (602 a).

Ils seraientincapables d'en exposer les qualités ou les défauts.

Ce sont des ignorants ! Ce réquisitoire, qui exclut l'art de la citécomme inutile, comme incapable d'enrichir tant la pratique que la théorie (l'art ne peut rien enseigner, parce qu'il nerepose sur aucune véritable connaissance), se termine par ce que Platon appelle « le plus grave des méfaits de lapoésie » (il entend ici par la poésie surtout la poésie tragique).

La tragédie, qui nous fait éprouver du plaisir auspectacle du malheur, affaiblit l'élément raisonnable en nous; elle ne nous apprend pas à rester calmes et courageuxsi le malheur nous frappe.

Les poètes flattent l'élément déraisonnable de l'âme et non seulement ne nous apprennentrien sur le monde, mais ne nous apprennent pas à devenir meilleurs.

C'est au nom du réalisme et du bon sens quePlaton condamne l'art en le rattachant à l'inutilité en l'homme («L'imitation n'est qu'une espèce de jeu d'enfant,dénué de sérieux », 602 b - la poésie relève de « cet amour d'enfance qui est encore celui de la plupart des hommes», 608 a ; « Est-il beau, dit-il, d'applaudir quand on voit un homme auquel on ne voudrait pas ressembler ? » 605 c).L'art tragique nous fait aimer l'immoralité, les passions, les crimes, au lieu de nous en donner le dégoût.

Cettecondamnation morale de l'art a pesé plus lourdement dans la tradition que sa condamnation comme ignorance etfabrication d'illusions.L'acharnement antiartistique de Platon est sans doute lié, comme le suggère Nietzsche dans la « Naissance de laTragédie », au chap.

XIV, à une sorte de jalousie et à sa volonté de créer avec ses dialogues une forme littérairenouvelle qui aurait pu éclipser la tragédie...

[II.

L'art, expérience sensible] Ainsi, le goudron n'est pas seulement un revêtement pour chaussées, il est aussi un matériau de peintre, si cedernier s'appelle Dubuffet ; et dès lors il nous révèle des qualités nouvelles : matité ou brillance, rugosité oudouceur, auxquelles nous ne risquons pas d'être attentifs lorsque nous marchons sur un trottoir.

À ceci prèsqu'après avoir vu des oeuvres de Dubuffet, il n'est pas impossible que je regarde le trottoir d'une autre manière.C'est parce que l'art est couvre de culture, au sens général, qu'il modifie les relations avec les données naturelles.Malraux rappelle qu'on apprend à peindre des couchers de soleil, non en les contemplant à la campagne, mais en lesétudiant au musée.

Et ce qui est vrai pour le peintre l'est aussi pour le spectateur, ce qui signifie que c'est à causede la peinture, entre autres, qu'il voit la nature d'une certaine manière : on ne juge de la beauté d'un coucher desoleil qu'après en avoir vu des représentations picturales.

Car le rapport immédiat avec la nature n'a riend'esthétique : il est utilitaire ou fonctionnel, met en jeu des parcours, des gestes, des travaux.

Ce n'est qu'enfonction de l'art que la nature finit par être perçue esthétiquement.Mais la réalité avec laquelle notre rapport se trouve ainsi modifié peut être plus intime.

Elle n'est pas seulement lanature à l'extérieur de nous, mais elle concerne également notre affectivité.

Jean Duvignaud a ainsi établi que lethéâtre du XVII siècle, avec le statut qu'y avaient les acteurs et actrices, a enrichi la vie sentimentale de modèles. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles