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Apprendre à être libre, est-ce seulement apprendre à se passer d'autrui ?

Publié le 01/04/2004

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A travers la question de la légitimité de la réduction de la liberté au fait de savoir se passer d’autrui, c’est au fond la question de l’essence même de la liberté qui est à la question. Il s’agit donc de se demander s’il suffit de se passer d’autrui, autrement dit être totalement autonome, pour définir ce que c’est qu’être libre pour un homme. Il s’agit aussi de s’interroger plus spécifiquement sur l’apprentissage de la liberté : car si la liberté réside dans le fait de savoir se passer d’autrui, alors elle relève de l’apprentissage. Apprendre à être autonome, est-ce encore apprendre à se passer totalement d’autrui ? L’apprentissage de notre liberté ne se fait-il qu’en se coupant des autres, comme si l’homme devait, pour se faire, être auto-suffisant et vivre de manière totalement autarcique ? Peut-on réduire l’être libre au seul fait de savoir se passer d’autrui ou est-ce réducteur et donc par essence inapte à saisir l’essence de la liberté humaine ?

A) L'apprentissage de la liberté comme apprentissage de l'indépendance.

B) L'apprentissage de la liberté comme apprentissage d'une sociabilité (positive).

C) Le règne des fins.  

« d'incliner.

Cette situation est appelée liberté d'indifférence que Descartes qualifie de « plus bas degré de la liberté.

Au plus haut degré se situe la liberté rationnelle qui consiste pour la volonté à suivre les motifs que l'intelligence lui propose, de sortequ'avec clarté apparaît qu'un choix s'impose comme meilleur que l'autre.C'est un peu comme si sur la balance, le poids des motifs intellectuelsinclinait nettement vers A et non pas vers B et que je choisissais A entoute connaissance de cause et repoussait B.

La volonté suit ce quel'entendement lui propose, elle est éclairée par l'intelligence.

Cependant,parce que la liberté de la volonté suppose un pouvoir original qui estindépendant des ressources à la fois de la séduction sensible autant quedes motifs intellectuels, il est tout à fait concevable que nous puissionsaussi choisir délibérément le pire tout en connaissance le meilleur.

C'estun peu comme si, l'un des plateaux de la balance penchait nettementd'un côté A, parce que toutes les raisons nous y inclinent, et quepourtant, en vertu de notre liberté, nous décidions de choisir B.

On peuttoujours dire que c'est ridicule, mais nous pouvons le faire, estimeDescartes, ne serait ce que pour nous prouver à nous-mêmes notreliberté.

Si tel est le cas, nous disposons alors d'un libre-arbitre absolu. Le libre-arbitre humain est donc la capacité de se décider en dépit detoutes les déterminations, que celles-ci soient des mobiles sensibles oudes motifs intellectuels. L'acte gratuit et la liberté : Une fois admis cette hypothèse d'un libre-arbitre absolu, on dira que la liberté est capable du meilleur commedu pire.

D'où le problème de l'acte gratuit.

L' acte gratuit , c'est l'acte qui est accompli sans raison, par seul effet de la liberté.

Prenons un exemple célèbre, celui du héros de Gide dans les Caves du Vatican, Lafcadio. Lafcadio se rend à Rome par le train et se retrouve seul dans la nuit, ne partageant son compartiment qu'avecun vieux monsieur, Amédée Fleurissoire.

Lafcadio se prend d'une pensée folle.

Là sous ma main, la poignée.

Ilsuffirait de la tirer et de le pousser en avant.

On n'entendrait même pas un cri dans la nuit.

Qui le verrait...

uncrime immotivé, quel embarras pour la police ».

Lafcadio pense ne pas pouvoir être soupçonné, il n'y a pas derelation entre lui et Amédée Fleurissoire.

L'enquête devra s'orienter ailleurs pour trouver un coupable.

Lafcadioprend un soin tout particulier à renforcer la gratuité du crime : il remet tout au hasard et se met à compterpour soumettre sa décision à l'apparition d'un feu dans la nuit.

Or le hasard, c'est ce qui est fortuit, ce qui estdépourvu d' intention consciente, donc de motivation intrinsèque. Alors apparaît quelque chose d'étrange et de monstrueux : le jaillissement de l' absurde .

L' absurde de la liberté se donne avec une sensation enivrante de vertige.

Comme si la vie était suspendue au dessus de l'abîme etque nous nous donnions au jeu de l'absurde d'un choix gratuit.

Cette sensation de vertige traverse bien destextes de la littérature existentialiste, dont La Nausée de Sartre.

Si l'existence n'est vue que comme unedéréliction absurde, alors elle est gratuite et sans raison.

Elle n'est que l'improvisation perpétuelle d'une libertéqui se recréée à chaque instant, surgissant de rien pour aller vers quelque chose qui est son projet et son but.L'homme qui dispose d'une telle liberté doit, quand il revient sur lui-même éprouver ce vertige : c'est terrible, jepeux faire ceci ou cela, et rien ne me donne une direction, toute décision est gratuite.

D'où l'importance del'angoisse , car dans l'angoisse la liberté s'angoisse d'elle-même, parce qu'elle n'est déterminée par rien, parce qu'elle est vide.

Dès lors, le vertige de la gratuité ne laisse qu'une porte de sortie, l' engagement .

Il faut donner une forme à la liberté, il faut en faire un projet, il faut lui donner un sens , et ce sens signifie poser sa motivation par rapport aux autres.

En fuyant vers les autres pour me donner un rôle, je me donne uneconsistance momentanée, puisque dans la conscience abyssale de la liberté, je ne suis rien et que ma libertén'est qu'une gratuité laissée à elle-même.

C'est aussi pour la même raison que l'ennui me guette : si rien ne medétermine du fond de moi-même, je suis obligé de tout tirer de moi-même et si ma volonté reste sansmouvement, je retombe aussitôt dans l'ennui qui est la liberté désoeuvrée . Telle est la justification que l'on donne du « sentiment vif » de liberté, interprété comme gratuité, vu d'un côtécomme un jeu dangereux, de l'autre comme un statut existentiel de la liberté.

Mais ce sentiment vif constitue-t-il une preuve ? Le vertige de la liberté est-il la meilleure preuve que nous puissions avancer de l'existence du libre arbitre ? L'acte de Lafcadio est-il réellement dépourvu de motivation ? Il y en avait au moins une : le désirde s'évader d'un comportement ordinaire, le désir d'un acte excentrique et original.

Il est tout à faitcompréhensible qu'un désoeuvré qui s'ennuie, puisse éprouver le besoin, pour se sentir exister un temps soitpeu, de commettre un acte qui le distingue.

L'absence de motivation d'un acte peut n'être qu'apparente.

Derrière un acte humain, il y a toujours des raisons que celles-ci soient conscientes ou qu'elles soientinconscientes.

L'activité de la conscience placée dans l'état de veille est intentionnelle .

Nous poursuivons des visées intentionnelles à travers chacun de nos actes conscients, supposer une absence d'intention, c'est entrer en contradiction avec la nature de l'état de veille.

Même si la vigilance est affaiblie, il n'en reste pasmoins que le mouvement de l'intention reste là.

L'écervelé est seulement quelqu'un qui ne se rend pas comptede ses propres motivations, qui n'en n'a pas conscience.

A la différence, l'homme lucide fait attention et enveloppe dans son champ de conscience une conscience réelle de ses motivations et un sens de chaquesituation d'expérience.

Le vertige de l'acte gratuit traduit une confusion mentale, une attitude velléitaire, uneincapacité de se décider, de vouloir.

Cela n'a rien à voir avec une preuve de la liberté.

Un esprit lucide estsuffisamment conscient des situations d'expérience de la vie et de leur urgence pour ne pas se permettre leluxe d'un vertige métaphysique.

La vraie liberté selon Sartre sera non pas dans le choix, mais dans le projet .

et. »

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