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Blaise PASCAL: la vérité et le coeur

Publié le 01/04/2005

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Nous connaissons la vérité non seulement par la raison, mais encore par le coeur ; c'est de cette dernière sorte que nous connaissons les premiers principes, et c'est en vain que le raisonnement, qui n'y a point de part, essaye de les combattre. Les pyrrhonien? qui n'ont que cela pour objet, y travaillent inutilement. Nous savons que nous ne rêvons point ; quelque impuissance où nous soyons de le prouver par raison, cette impuissance ne conclut autre chose que la faiblesse de notre raison, mais non pas l'incertitude de toutes nos connaissances, comme ils le prétendent. Car la connaissance des premiers principes, comme qu'il y a espace, temps, mouvement, nombres, est aussi ferme qu'aucune de celles que nos raisonnements nous donnent. Et c'est sur ces connaissances du coeur et de l'instinct qu'il faut que la raison s'appuie, et qu'elle y fonde tout son discours. Le coeur sent qu'il y a trois dimensions dans l'espace, et que les nombres sont infinis ; et la raison démontre ensuite qu'il y a point deux nombres carrés dont l'un soit double de l'autre. Les principes se sentent, les propositions se concluent ; et le tout avec certitude, quoique par différentes voies. Et il est aussi inutile et aussi ridicule que la raison demande au coeur des preuves de ses premiers principes, pour vouloir y consentir, qu'il serait ridicule que le coeur demandât à la raison un sentiment de toutes les propositions qu'elle démontre, pour vouloir les recevoir. [...] Blaise PASCAL

QUESTIONNAIRE INDICATIF    • Par quoi, selon Pascal, sont connus « les premiers principes «?  • Que sont « ces premiers principes «?  • Différences, selon Pascal, entre « les principes « et « les propositions «?  — Par quoi sont appréhendés « les principes «?  — Par quoi sont appréhendées « les propositions « ?  — Les différences sont-elles, si l'on peut dire, de « méthodologie « ou d'ordre de « certitude « ?  • Importance de la notation selon laquelle « c'est sur ces connaissances du cœur et de l'instinct qu'il faut que la raison s'appuie et qu'elle y fonde tout son discours «?  • En quoi, si l'on suit Pascal, peut-on soutenir — comme lui — que « les pyrrhoniens qui n'ont que cela pour objet, y travaillent « inutilement «?  • Quel est l'enjeu de ce texte ?  • Que pensez-vous du raisonnement développé dans la dernière phrase du texte proposé ?  • Que pensez-vous de l'affirmation de Pascal selon laquelle « le cœur sent qu'il y a trois dimensions dans l'espace «?  • Peut-on « prouver « autrement que « par raison «? (Pascal dit « quelque impuissance où nous soyons de le prouver par raison «.)  • Que pensez-vous de la position et de l'argumentation de Pascal ?  • En quoi ce texte a-t-il un intérêt philosophique ?

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« preuve en est que la plupart des hommes de science et des philosophes ont dû mener une lutte serrée aux XVI etau XVII ièmes siècles pour imposer la reconnaissance du « principe de raison » et de libre examen dans le domainede l'explication des phénomènes réels (cf.

Copernic, Galilée, Descartes, Pascal, et surtout Spinoza, qui est alléjusqu'à revendiquer la possibilité d'une étude critique des textes sacrés).La dissociation de la connaissance immédiate « des premiers principes » et des conceptions qui, sous couvertd'initiation, maintenaient l'obscurantisme, a conduit les philosophes à remettre en chantier le problème de l'évidence,à réélaborer sa signification.

Ainsi, chez Descartes, la fonction première du doute est de balayer les faussesévidences, les intuitions aveugles, la précipitation propre au préjugé, et ce afin d'ouvrir la voie à une évidencerationnelle.

L'intuition devient alors vision de l'évidence rationnelle, saisie claire et distincte des principesfondamentaux de toute vérité.

Sur elle vient s'articuler la déduction, qui enchaîne les raisons selon un ordrerigoureux, permettant tout à la fois de déployer et d'« inventer » (c'est-à-dire trouver) les vérités (cf.

sur ce pointRègles pour la direction de l'esprit, III).Pour approfondir cette analyse, on pourra réfléchir sur la distinction que propose Descartes entre les deux typesd'évidence : « Car enfin, soit que nous veillions, soit que nous dormions, nous ne nous devons jamais laisserpersuader qu'à l'évidence de notre raison.

Et il est à remarquer que je dis de notre raison, et non point de notreimagination ni de nos sens : comme encore que nous voyons le Soleil très clairement, nous ne devons pas juger pourcela qu'il ne soit que de la grandeur que nous le voyons » (Discours de la méthode, quatrième partie), cf.

aussi lesRègles pour la direction de l'esprit (douzième règle) : « J'entends par intuition, non la croyance au témoignagevariable des sens ou les jugements trompeurs de l'imagination, mauvaise régulatrice, mais la conception d'un espritsain et attentif, si facile et si distincte qu'aucun doute ne reste sur ce que nous comprenons.

»L'ensemble de l'argumentation de Pascal sera reconsidéré, dans le commentaire, à partir des remarques quiprécèdent.

Notons que dans le domaine de la pensée mathématique et de son évolution, la question des premiersprincipes a pris une importance toute particulière, notamment en raison d'une exigence de démonstration intégraledes relations utilisées.

Lors de la crise de la géométrie euclidienne (liée au fait qu'Euclide s'était contenté de poserdans son livre Les Éléments le fameux postulat de la parallèle), les mathématiciens ont été conduits à prendreconscience des limites d'une telle exigence.

Ils ont donc redéfini le statut des mathématiques : celles-cifonctionnent comme des « axiomatiques ». [Axiomatiques : ensembles de relations déduites rigoureusement les unes des autres à partir d'un certain nombred'axiomes de départ, qui ne sont pas autre chose que des propositions non démontrées, et choisies explicitementcomme hypothèses initiales.] Que les axiomes choisis par Euclide aient pu apparaître longtemps comme les seuls possibles ne tient pas à leur plusgrande évidence rationnelle ou logique, mais tout simplement au fait qu'ils correspondaient avec la perceptionempirique de l'espace.

Ainsi, le raisonnement semble toujours se donner des points de départ qu'il ne peutdémontrer.

Cela est vrai de la mathématique (axiomatique) mais aussi de toute entreprise de réflexion.

Laphilosophie, par exemple, récuse toute affirmation arbitraire (non démontrée), mais doit toujours, à un moment ou àun autre, « remonter » à des thèses premières, c'est-à-dire à des positions affirmées et explicitement formulées(l'ensemble de ces thèses et la façon dont, en se combinant, elles définissent les problèmes, constituent la «problématique » particulière d'une philosophie).

PASCAL (Biaise). Né à Clermont-Ferrand en 1623, mort à Paris en 1662. Enfant précoce, il écrivit à onze ans un traité des sons, et retrouva tout seul, à douze ans, la trente-deuxièmeproposition du premier livre d'Euclide.

A dix-neuf ans, il inventa une machine arithmétique.

En 1646, il entre enrelations avec Port-Royal et fait sa première expérience sur le vide.

A partir de 1652, commence ce que l'on aappelé la « vie mondaine » de Pascal.

Ami du duc de Roannez, il fréquente les salons et les femmes, s'adonne aujeu, mais poursuit cependant la réalisation de ses travaux mathématiques : il se révèle le promoteur de l'analyseinfinitésimale et du calcul des probabilités.

Insatisfait de la vie qu'il mène, las du monde, le cœur vide, il éprouve lanostalgie de Dieu.

Pascal a une illumination dans la nuit du 23 novembre 1654, et trace quelques lignes sur unmorceau de papier, qu'il conservera cousu à l'intérieur de son vêtement.

Il se retire à Port-Royal-des-Champs, etparticipe avec ardeur à la polémique qui oppose les Jansénistes et les Jésuites, prenant la défense de Port-Royal(1656-1657).

La guérison de sa nièce, à la suite de l'attouchement d'une épine de la couronne de Jésus, le rendencore plus convaincu dans sa foi chrétienne.

Il abandonne ses recherches de mathématiques et de géométrie, etvit désormais dans l'humilité et la souffrance.

Il imagine la création de carrosses à cinq sols pour le déplacement despauvres, voitures qui sont à l'origine des transports publics en commun.

Il meurt le 17 août 1662.

— Bien entendu, iln'y a pas de système philosophique de Pascal, que Bayle a appelé « un individu paradoxe de l'espèce humaine ».Malade et las, Pascal a cherché en souffrant.

Il s'est approché de l'univers invisible, à tâtons.

Dieu est pour lui « ladernière fin, comme lui seul est le vrai principe ».

Polémiste, géomètre, physicien, Pascal est l'un des plus grands. »

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