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Blaise Pascal, Pensées: La justice et la force

Publié le 31/01/2020

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Blaise Pascal, Pensées

Il est juste que ce qui est juste soit suivi, il est nécessaire que ce qui est le plus fort soit suivi. La justice sans la force est impuissante ; la force sans la justice est tyran-nique. La justice sans force est contredite, parce qu’il y a toujours des méchants ; la force sans la justice est accusée. Il faut donc mettre ensemble la justice et la force ; et pour cela faire que ce qui est juste soit fort, ou que ce qui est fort soit juste.

■ La justice est sujette à dispute, la force est très reconnaissable et sans dispute. Ainsi on n’a pu donner la force à la justice, parce que la force a contredit la justice et a dit qu’elle était injuste, et a dit que c’était elle qui était juste. Et ainsi ne j pouvant faire que ce qui est juste fût fort, on a fait que ce qui est fort fût juste.

Gallimard, collection « La Pléiade », § 298, 1993, p. 1160.

La justice et la force sont-elles irrémédiablement séparées ou peuvent-elles s'accorder en se prêtant un appui mutuel ? Voilà la question à laquelle répond ce texte, en montrant la confusion profonde que la force introduit délibérément et à son seul profit entre les deux notions.

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« COMMENTAIRE DE TEXTE -2.

Les faits : la justice et la force sont réunies sous la bannière de la force A Une justice sans visibilité : Pascal présente ici une différence entre force et justice qui prépare leur réunion ultime.

La justice peut être « contredite>> (ligne 3), parce qu'elle n'est pas identifiable en elle-même.

Pour se faire reconnaître et triom­ pher, elle aurait besoin de la force, qui est elle,« reconnaissable>> (ligne 7), puisqu'elle est par définition, capable de s'imposer.

B.

La supériorité de la force : face à une justice incapable de se faire recon­ naître comme telle, la force peut revendiquer pour elle-même le nom de justice et le dénier à la justice véritable.

La force a non seulement la capacité de contraindre physiquement, mais aussi de discréditer son opposé.

Elle peut éviter d'être« accu­ sée>> (ligne 4), parce qu'elle peut appeler« tyrannique>> la justice réelle.

Ce qui n'était qu'une simple différence dans les principes devient une opposition radicale dans les faits : force et justice ne sont pas seulement distinctes, elles sont antagonistes C.

En conséquence, force et justice sont apparemment réunies : la force se proclame elle-même juste 1 et qualifie la justice réelle d'injuste.

On assiste en réalité à la confiscation du terme de «justice » par la force et à la disparition corrélative de la justice véritable.

Il n'y a plus de norme extérieure à ce qu'impose la force dans les faits : les textes de lois et le droit ne sont que le reflet de ce qu'impose la vio­ lence et non pas l'expression de la justice ou de l'équité.

Le droit se réduit au fait, car, entre force et justice, le combat est trop inégal.

-Discussion Le but de ce texte est avant tout apologétique : il montre l'inanité des tenta­ tives purement humaines pour atteindre la justice, car c'est !'impuissance de l'homme à reconnaître la justice et à l'imposer que souligne Pascal.

Seul Dieu paraît en mesure d'imposer la justice, car lui seul unit la clairvoyance à la puissance.

On peut toutefois opposer au constat désabusé de Pascal les protestations de Rousseau : la justice est, selon lui, aisément reconnaissable grâce à la voix toute puissante de la conscience.

De plus, il est impossible de réduire le droit au fait sans aboutir à d'insurmontables contradictions (Du Contrat Social, livre 1, chapitre Ill).. »

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