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Commentez et appréciez ce texte de Kant : « La morale n'est pas à proprement parler la doctrine qui nous enseigne comment nous devons nous rendre heureux, mais comment nous devons nous rendre dignes du bonheur. »

Publié le 27/02/2008

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Ce bonheur, nous pouvons chercher à l'obtenir, à la condition de rester fidèles à nos devoirs, et KANT s'insurge contre ceux qui lui font dire « que l'observation de la loi morale, sans aucun égard au bonheur, est pour l'homme l'unique but final, et qu'elle doit être regardée comme la seule fin de la créature ». Non seulement nous tendons spontanément et pouvons tendre au bonheur, mais le bonheur est un élément indispensable du souverain bien dans la recherche duquel consiste la moralité. KANT, en effet, combat l'opinion des Stoïciens, d'après lesquels seule la vertu doit compter. Avec la vertu, il faut le bonheur, c'est-à-dire « l'état dans le monde d'un être raisonnable, à qui, dans le cours de son existence, tout arrive suivant son souhait et sa volonté ». Et c'est précisément parce que la nature ne réalise pas cette nécessaire conjonction de la vertu et du bonheur que l'auteur de la critique conclut à l'existence, au-dessus de la nature, d'un être qui assurera cette conjonction indispensable pour assurer la cohérence rationnelle de la morale; l'existence de Dieu est un postulat de la raison pratique, et elle est exigée pour garantir le bonheur aux vertueux. On ne peut donc pas reprocher à KANT de faire fi du bonheur. Bien plus, il admet une certaine obligation de chercher à être heureux sur cette terre : « Assurer son propre bonheur, dit-il (Fondements, p. 97-98), est un devoir (au moins indirect); car le fait de ne pas être content de son état, de vivre pressé par de nombreux soucis et au milieu de besoins non satisfaits pourrait devenir aisément une grande tentation d'enfreindre ses devoirs., » Mais, on le voit, dans ce cas, ce n'est pas pour lui-même que le bonheur est cherché, mais seulement comme condition nécessaire à l'accomplissement du devoir : « Le bonheur n'est pas le but, dit-il ailleurs, c'est le moyen nécessaire pour écarter les obstacles qui s'opposent à la moralité du sujet. » B.
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« fidélité nous rend dignes du bonheur, mais elle est voulue pour elle-même et non en considération du bonheur qu'elleconditionne.

Il serait donc préférable de dire : la morale nous enseigne, non pas comment nous devons nous rendreheureux, mais quelle doit être notre conduite qui, par ailleurs, nous vaudra le bonheur.

Que penser de cetteconception morale ? A.

On ne saurait trop approuver KANT dans son opposition aux morales de l'intérêt personnel.

Si noble que soitl'intérêt, tant qu'on reste enfermé en soi-même, on ne s'élève pas au niveau de la moralité; on agit en homme avisénon en homme de devoir ou en homme de bien.

Il n'y a de conduite moralement bonne que celle qui nous porte versquelque chose qui nous dépasse et à quoi nous nous dévouons.Il est donc bien vrai qu'une morale bien comprise ne nous fige pas dans la considération d'un bonheur à atteindre;c'est un idéal à réaliser qu'elle nous propose. B.

Mais — et sur ce point nous nous séparons de KANT — cet idéal est fait de biens et de valeurs à réaliser et nonde devoirs à accomplir ou de lois à observer.

La morale (kantienne, en effet, nous paraît inacceptable en tant qu'ellefait du devoir et de la loi morale un absolu.

L'absolu est le bien ou la valeur.

Ce n'est pas son obligation qui fait labonté morale d'un acte; au contraire, c'est sa bonté morale qui le rend obligatoire.Aussi, sans rejeter la notion d'obligation, nous ne la mettons pas au premier plan et lui substituerons celle de bien oude valeur.

Nous dirons donc, non pas que la morale nous enseigne comment nous « devons » nous rendre soitheureux, soit dignes du bonheur, mais qu'elle noms montre l'idéal grâce auquel nous parviendrons au bonheur ou audegré de dignité qui nous méritera le bonheur. C.

Par le fait même tombe l'opposition essentielle que KANT établit entre la vertu et le bonheur, opposition que seuleparvient à surmonter, dans le monde des noumènes, la toute-puissance du créateur.

Si on ne peut obéir à la loi parpur amour de la loi sans réprimer ses tendances naturelles et, par suite, sans renoncer à quelque chose de sonbonheur, c'est tout naturellement, au contraire, que nous nous portons vers le bien et les valeurs; quand on seplace à ce point de vue, vertu et bonheur coïncident.Qu'on ne dise pas que nous retombons dans une morale de l'intérêt.

Dans la recherche du bien, ce n'est pas vers soique l'homme est orienté, mais vers plus haut que soi; ce n'est pas le bonheur qu'il cherche, mais le bien sous sesdiverses formes : ordre, justice, vérité, etc.

Le bonheur, d'ailleurs, n'arrive jamais que par surcroît, et celui qui seconcentrerait à sa recherche le manquerait certainement.

C'est la création des valeurs, la promotion du bien, quinous valent les meilleures joies de la vie. CONCLUSION.

— Le tort principal de KANT a peut-être été d'admettre les présupposés psychologiques de ses adversaires les épicuriens.

Pour lui comme pour eux, l'homme ne cherche que son plaisir; ses tendances naturellessont toutes égoïstes.

Avec de tels présupposés, prétendre l'amener à agir moralement est une gageure; aussi doit-ilreconnaître que, depuis que le monde existe, il n'a peut-être pas été accompli un seul acte vraiment moral.Or, l'observation vulgaire nous le montre, nous cherchons bien moins le plaisir personnel que la réalisation d'uneoeuvre; nous aimons l'ordre pour lui-même et non pas seulement pour les avantages que nous comptons en retirer.Nous> sommes axés sur le bien, et non sur le bonheur.

Dès lors, l'alternative que nous avions à discuter repose ensomme sur une ignoratio elenchi.. »

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