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Connaissez-vous des auteurs qui aient voulu tirer une morale de la science ? Comment s'y sont-ils pris ? Peut-on soutenir crue l'inverse serait mieux justifié. ?

Publié le 22/06/2009

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morale

Autrefois, les philosophes fondaient la morale sur la métaphysique. Ils précisaient d'abord la nature propre de l'homme, être raisonnable et libre, ayant un principe spirituel et par conséquent immortel... Ensuite, ayant prouvé l'existence d'un Dieu créateur et souverainement parfait? ils montraient que ce Dieu, ne pouvant pas se désintéresser de l'homme, lui imposait de réaliser sa nature distinctive et de vivre conformément à la raison. Le vulgaire avait trouvé un chemin plus court : c'est à la religion révélée, reçue par tradition, qu'il rattachait l'obligation morale; pour lui, vivre moralement consistait à faire la volonté de Dieu. Mais dans les, deux cas on ne justifiait les injonctions de la conscience qu'en se référant à un être transcendant, c'est-à-dire au-delà de toute expérience possible. Les débauches de constructions métaphysiques qui se sont succédé depuis Descartes jusqu'à Kant et à Hegel ont fait naître dans les esprits, par une réaction normale, une extrême défiance pour toutes les explications qui ne sont pas vérifiables expérimentalement. Au contraire, les progrès prodigieux des sciences expérimentales au XIXe siècle ont reporté sur ces dernières tout l'espoir de nombreux penseurs : la science seule, ont-ils pensé, répondra aux derniers « pourquoi « que posent le monde et la vie. La morale n'a pas échappé à ce mouvement de pensée. On a voulu expliquer et justifier scientifiquement les injonctions de la conscience morale et tirer une morale de la science. Nous examinerons plusieurs de ces tentatives; ensuite, en guise de conclusion, nous nous demanderons s'il ne serait pas plus justifié de tirer une science de la morale.

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« Ainsi que l'avait montré Darwin, la grande loi de la vie .et la condition de progrès pour les êtres vivants est lasélection naturelle.

Cette loi vaut pour l'homme comme pour les animaux : il n'y a de progrès que par la sélection quirésulte de la lutte pour la vie.

Par conséquent, pour que se réalise l'idéal humain, le Surhomme, les faibles doiventdisparaître.

Il est donc contre nature et contraire à la morale d'aider à vivre ceux qui ne pourraient pas, par eux-mêmes, se faire ou conserver leur place au soleil : les faibles d'esprit ou de corps, ceux mêmes que le hasard de lanaissance a faits pauvres ou esclaves.

Ainsi Nietzsche prenait le contre-pied de la morale chrétienne, qui sa forméla conscience de tout l'Occident.

Pour lui, allant contre une loi de la nature, la morale chrétienne est immorale.

Lavraie moralité consiste à laisser l'ordre naturel se réaliser et à l'aider à se réaliser.Que faut-il penser de l'essai de morale scientifique de Nietzsche?Faisons d'abord quelques réserves de moindre importance.

Que la sélection naturelle soit le facteur de progrèsconstant que croyait Darwin et Nietzsche après lui, las savants modernes en doutent pour les animaux et lesvégétaux : il semble bien que la sélection conserve et multiplie les individus moyens et non les individusparticulièrement développés.

Quant à l'homme, la sélection naturelle aboutirait peut-être à la victoire des plus forts;mais plus fort n'est pas synonyme de supérieur ou de meilleur; au contraire, ces vainqueurs seraient non pas dessurhommes, mais des brutes égoïstes, les moins humains des hommes.

La sélection naturelle ne peut donc pasamener une amélioration morale de l'homme.Ensuite et surtout elle ne peut pas fonder la morale.

La loi morale indique ce qui doit être : elle oblige.

La loiphysique indique ce qui est elle nécessite.

Même si nous admettons que la sélection naturelle, quand elle jouelibrement, ne laisse subsister que les meilleurs, pourquoi serions-nous obligés de favoriser ou du moins de ne pastroubler son jeu ? La nature est régie par des lois, mais en vertu de quel principe est-il interdit de les tourner, ouplutôt d'éviter les effets de certaines d'entre elles en nous aidant d'autres lois, tout aussi naturelles ? Ainsi, d'aprèsles lois naturelles, l'eau gèle en hiver, à moins qu'elle ne soit proche d'un foyer de chaleur.

En quoi violerai-je une loide la nature en conservant un récipient d'eau près du feu ? De même, laissé à lui-même, le faible disparaît.

Maispourquoi devrais-je le laisser à lui-même et en vertu de quel principe me défend-on de le secourir ? De ce qu'unechose est, il ne s'ensuit pas qu'elle doive être et qu'on ne puisse pas la changer.

D'ailleurs, le sentiment de pitiéfraternelle qui me porte à secourir mon frère est tout aussi humain que celui qui me porte à le négliger pour nesonger qu'à.

moi.

Que dis-je ? seul l'altruisme est humain; l'égoïsme est bestial, et le prétendu surhomme deNietzsche se classerait sans doute aux derniers degrés de l'échelle humaine. * * * La morale qu'on a prétendu tirer de la sociologie paraît aux antipodes de celle de Nietzsche.

Elle lui ressemblenéanmoins sur bien des points.Pour Durkheim, ce ne sont pas les volontés inconscientes de la nature qui sont sacrées, mais les volontés de laSociété.

La Société constitue, en effet, une personne morale qualitativement distincte des éléments qui lacomposent : la Société dépasse infiniment l'individu, tout comme le Dieu créateur de la philosophie classiquedépassait les plus nobles de ses créatures.

Par suite, nous avons un fondement à l'obligation morale : nous sommesobligés d'agir conformément aux volontés de la Société.Mais comment savoir ce que la Société veut de nous ? A la sociologie de nous l'apprendre; et c'est ainsi que nousavons là un autre type de morale tirée d'une science : la science des faits sociaux. Le sociologue, observant les conceptions morales qui se manifestent dans la législation, dans l'enseignementscolaire, dans la littérature et le théâtre, et jusque dans l'appréciation des faits divers par les journaux, déterminece qui, dans une société donnée, est normal et ce qui est pathologique ou anormal.

Par ses sanctions diverses, lasociété tend à réprimer les modes de vivre pathologiques et à généraliser le normal.

L'individu trouve dans cesindications la loi de sa conduite,Que devons-nous penser de cet essai de morale tirée de la sociologie ?La théorie de Durkheim se fonde sur des postulats très discutables que nous nous contentons de signaler sans lescombattre : d'abord, tout ce qui dans l'homme n'est pas de nature biologique est de nature sociale; ensuite, laSociété est une réalité morale qualitativement distincte des individus qui la composent, ayant sa vie et sa penséepropre.

Nous discuterons seulement la prétention de tirer une morale de la science des faits sociaux.L'argument essentiel à opposer à la théorie sociologique a été déjà utilisé contre Nietzsche et doit être utilisé contretout essai, de morale strictement scientifique : la science constate ce qui est; or, de ce qui est on ne tirera jamaisce qui doit être.Sans doute, le sociologue détermine ce qui, dans une société donnée est normal.

Mais comment fonder l'obligationde tendre soi-même à cette moralité normale? Durkheim ne, trouve pas d'autre moyen que de « postuler », c'est-à-dire d'admettre sans preuve, que la société est une réalité morale distincte des individus.

Étrange science qui sereconnaît incapable de prouver ce qu'elle affirme! Mais accordons-lui son postulat : nous ne sommes pas au boutdes difficultés.L'anormal — qu'il s'agisse de l'hyponormal, comme le criminel, ou de l'hypernormal, comme l'ascète — est lui aussi,dans la conception sociologique, un produit du milieu : il concrétise certaines tendances, moins puissantes maisréelles, de l'âme collective.

De quel droit condamner ces tendances si tout ce qui est collectif est sacré?Ensuite, le sociologue ne se contente pas de déterminer ce que veut actuellement l'âme collective : se penchant enquelque sorte sur la courbe que dessine son évolution et s'aidant de la connaissance du passé des sociétés, ilprévoit quelles seront, dans quelques générations ou dans quelques siècles, les exigences de la consciencecollective.

Gomment dès lors considérer comme obligatoires des pratiques qu'à une époque plus évoluée oncondamnera comme néfastes?La sociologie a.

donc échoué, elle aussi, dans- son projet de morale scientifique.

On ne pourra jamais tirer une. »

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