De quel monde nous parle l'art ?
Publié le 10/03/2005
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Analyse du sujet :
L'art dans son sens moderne, autrefois désigné sous le terme de « Beaux-arts «, définit l'activité humaine de production d'ouvrages à finalité non utile. La fin de l'art est esthétique, sensible, non pratique.
L'activité artistique consiste à s'inspirer d'une réalité, transformée par l'artiste au moyen d'une technique. L'oeuvre d'art est donc une RE présentation du monde réel, dans le sens d'une présentation nouvelle passée par le filtre de la perception de l'artiste et dépendante des moyens techniques dont il dispose.
Problématique :
Si l'art représente le monde, qu'il y parvienne adéquatement ou non, alors c'est bien le monde sensible qu'il nous donne à voir. Mais puisque ce monde est représenté différemment de sa réalité objective, peut-on vraiment parler d'une représentation du monde sensible réel ? Ne peut-on penser que l'art nous parle d'un autre monde, un monde plus vrai peut-être que le monde réel lui-même ?
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2.
Ainsi, on peut dire d'après Merleau-Ponty que le peintre nous permet, endéformant la réalité, de mieux appréhender le monde sensible qu'il nous donneà percevoir à travers des filtres dont nous n'avons pas l'habitude.
Il mobilisenotre sensibilité d'une manière qui diffère de nos habitudes.Le monde du peintre est un monde visible, rien que visible, un monde presquefou, puisqu'il est complet n'étant cependant que partiel.
La peinture réveille,porte à sa dernière puissance un délire qui est la vision même, puisque voirc'est avoir à distance, et que la peinture étend cette bizarre possession àtous les aspects de l'Être, qui doivent de quelque façon se faire visibles pourentrer en elle.
Quand le jeune Berenson parlait, à propos de la peintureitalienne, d'une évocation des valeurs tactiles, il ne pouvait guère se tromperdavantage : la peinture n'évoque rien, et notamment pas le tactile.
Elle faittout autre chose, presque l'inverse : elle donne existence visible à ce que lavision profane croit invisible, elle fait que nous n'avons pas besoin de « sensmusculaire pour avoir la voluminosité du monde.
Cette vision dévorante, par-delà les « données visuelles «, ouvre sur une texture de l'Être dont lesmessages sensoriels discrets ne sont que les ponctuations ou les césures, etque ]'oeil habite, comme l'homme sa maison Restons dans le visible au sensétroit et prosaïque : le peintre, quel qu'il soit, pendant qu'il peint, pratiqueune théorie magique de la vision.
Il lui faut bien admettre que les chosespassent en lui ou que, selon le dilemme sarcastique de Malebranche', l'espritsort par les yeux pour aller se promener dans les choses, puisqu'il ne cesse d'ajuster sur elles sa voyance.
(Rien n'est changé s'il ne peint pas sur le motif : il peint en tout cas parce qu'il a vu,parce que le monde a, au moins une fois, gravé en lui les chiffres du visible.) Il lui faut bien avouer, comme dit unphilosophe, que la vision est miroir ou concentration de l'univers [...].
MERLEAU-PONTY
L'art nous donne à voir un monde métaphysique : celui des idées, un monde non concret, mais unmonde vrai et non plus berné par la position a priori de réalité du monde sensible.
En ce sens, l'artnous permet de voir un monde vrai : le monde des idées, en nous détournant du monde sensible quin'est qu'illusion.
3.
Pour Schopenhauer, l'objet de l'art n'est pas la représentation de la réalitémais la représentation de ce qui, dans le monde réel, fait référence au mondedes idées.L'objet que l'artiste s'efforce de représenter, l'objet dont la connaissance doitprécéder et engendrer l'oeuvre, comme le germe précède et engendre laplante, cet objet est une Idée, au sens platonicien du mot, et n'est pointautre chose ; ce n'est point la chose particulière, car ce n'est point l'objet denotre conception vulgaire ; ce n'est point non plus le concept, car ce n'estpoint l'objet de l'entendement, ni de la science.
Sans doute l'Idée et leconcept ont quelque chose de commun, en ce qu'ils sont tous deux desunités représentant une pluralité de choses réelles ; malgré tout, il y a entreeux une grande différence [...].
Le concept est abstrait et discursif ;complètement indéterminé, quant à son contenu, rien n'est précis en lui queses limites ; l'entendement suffit pour le comprendre et pour le concevoir ; lesmots, sans autre intermédiaire, suffisent à l'exprimer ; sa propre définition,enfin, l'épuise tout entier.
L'Idée, au contraire, que l'on peut à la rigueurdéfinir le représentant adéquat du concept, est absolument concrète ; elle abeau représenter une infinité de choses particulières, elle n'en est pas moinsdéterminée sur toutes ses faces ; l'individu, en tant qu'individu, ne la peutjamais connaître ; il faut, pour la concevoir, dépouiller toute volonté, touteindividualité, et s'élever à l'état de sujet connaissant pur ; autant vaut direqu'elle est cachée à tous, si ce n'est au génie et à celui qui, grâce à uneexaltation de la faculté de connaissance pure [...], se trouve dans un état voisin du génie ; l'Idée n'est pointessentiellement communicable, elle ne l'est que relativement ; car, une fois conçue et exprimée dans l'oeuvre d'art,elle ne se révèle à chacun que proportionnellement à la valeur de son esprit ; voilà justement pourquoi les oeuvresles plus excellentes de tous les arts, les monuments les plus glorieux du génie sont destinés à demeureréternellement lettres closes pour la stupide majorité des mortels [...].
SCHOPENHAUER Conclusion : Certes l'art nous confronte à une représentation faussée ou partielle du monde réel.
Mais l'objectif de l'art n'est pasde montrer une image identique à la réalité : bien au contraire, en nous montrant le monde réel sensible sous uncertain angle, éventuellement déformé, l'art nous permet d'appréhender ce monde dans lequel nous vivons d'un oeilnouveau.
Bien plus il se pourrait que l'art nous fasse accéder à une dimension de vérité supérieure à l'illusion devérité du vécu sensible : le monde des idées..
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