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En quoi les artistes nous aident-ils à être libres ?

Publié le 19/03/2005

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Mais cette perception de l'art engagé est beaucoup trop restrictive. Elle feint d'ignorer que toute oeuvre est un acte de dévoilement du réel et que l'artiste ne ressemble pas à Zeuxis, ce peintre grec qui représentait de façon si réaliste les grains de raisin sur ses fresques que les pigeons venaient s'y briser le bec. Il n'y a pas d'oeuvre qui ne trouve sa satisfaction dans un engagement par rapport au contexte qui l'a vu naître. C'est que, en retournant la perspective, « la littérature (l'art) d'une époque, c'est l'époque digérée par sa littérature (son art) «, comme le confia Sartre à Madeleine Chapsal. L'engagement apparaît comme ce mécanisme de digestion, d'appropriation du réel, « biologiquement « indispensable à une oeuvre d'art !C'est la raison pour laquelle les artistes ont toujours été les premières victimes de la répression. Créant librement de nouvelles réalités, ils vont nécessairement à contre-courant de ce qui prive l'homme de liberté. 

[L'artiste peut être soumis à des codes esthétiques. Il suit une démarche trop personnelle et nous éloigne de la réalité. Il ne peut donc nous aider à être libres.]

La liberté de l'artiste est trop particulière pour être celle des autres L'artiste est peut-être libre de créer ce qu'il veut.

Il s'agit ici de se demander en quoi les artistes nous aident à être libres. La question peut sembler étrange ainsi posée puisque notre premier rapport à l'art étant évidemment esthétique, on ne voit pas en quoi l'artiste nous aide à être libre... Qu'il nous offre du plaisir, qu'il donne des émotions, d'accord. Mais qu'il nous donne accès à la liberté, c'est beaucoup plus difficile à penser. Pourtant, en tant que l'art est par lui-même le résultat d'une activité libre, les œuvres qu'il produit sont en quelque sorte le résultat visible de cette liberté créatrice. Les artistes peuvent donc nous aider à être libre pour plusieurs raisons. En premier lieu, l'art est en lui-même une libération dans la mesure ou il nous affranchit d'une relation strictement utilitaire au monde. A quoi sert d'aller dans un musée ou d'écouter une symphonie ? A rien... mais c'est paradoxalement là le signe que c'est une activité libre. Par ailleurs, les artistes servent souvent la cause de la liberté de manière plus ou moins directe. La politique ne s'y trompe pas lorsque, dans son expression totalitaire, elle musèle les artistes...

« ...

est impliqué par le processus de création artistique...Sartre rappelle, dans Qu'est-ce que la littérature ?, que « l'écrivainengagé sait que la parole est action ».

Si la littérature engagée, c'estla littérature perçue comme une action, alors toute littérature est, pardéfinition, engagée.

« La fonction de l'écrivain — ajoute Sartre — estde faire en sorte que nul ne puisse ignorer le monde et que nul ne s'enpuisse dire innocent.

»Ainsi, lorsqu'il décrit les conditions de vie des mineurs, Zola s'engageautant que par la défense du capitaine Dreyfus.

De la même façon, LeRouge et le Noir est une oeuvre profondément engagée, car le miroirque promène Stendhal sur les traces de Julien Sorel réfléchit l'imaged'une société ossifiée, repliée sur elle-même.

Dans ce monde quiressemble à un tombeau (la province, le séminaire), ceux qui ontl'énergie de vouloir respirer l'air de leurs passions, ceux-là doiventcombattre.

L'oeuvre d'art dévoile, elle ne reproduit pas ce qui est(comme le pensaient les Grecs), elle donne à voir et à sentir ce quiétait avant elle inaperçu.

Dans le domaine pictural, l'exemple deGuernica, présentée à Paris au Pavillon républicain de l'Expositioninternationale, est significatif.

Le tableau montre à une opinion (peudésireuse d'ouvrir les yeux en 1937) l'horreur de la guerre d'Espagne.Ces corps éclatés, ces membres que semble disproportionner la douleur,cette mêlée enfin d'où l'on ne distingue plus les hommes des bêtes, rendent sensible la détresse d'un peuple.

Au-delà du bombardement du petit village espagnol, c'est l'atrocitéde tout un siècle qui est représentée, un siècle « noir et gris ». ...

qui dévoile le monde.Bien sûr, une oeuvre est engagée lorsqu'elle exprime un parti pris et s'intègre dans une lettre ouvertementmenée par son auteur.

Mais cette perception de l'art engagé est beaucoup trop restrictive.

Elle feint d'ignorerque toute oeuvre est un acte de dévoilement du réel et que l'artiste ne ressemble pas à Zeuxis, ce peintregrec qui représentait de façon si réaliste les grains de raisin sur ses fresques que les pigeons venaient s'ybriser le bec.

Il n'y a pas d'oeuvre qui ne trouve sa satisfaction dans un engagement par rapport au contextequi l'a vu naître.

C'est que, en retournant la perspective, « la littérature (l'art) d'une époque, c'est l'époquedigérée par sa littérature (son art) », comme le confia Sartre à Madeleine Chapsal.

L'engagement apparaîtcomme ce mécanisme de digestion, d'appropriation du réel, « biologiquement » indispensable à une oeuvred'art !C'est la raison pour laquelle les artistes ont toujours été les premières victimes de la répression.

Créantlibrement de nouvelles réalités, ils vont nécessairement à contre-courant de ce qui prive l'homme de liberté.

[L'artiste peut être soumis à des codes esthétiques.

Il suit une démarche trop personnelle et nous éloigne de la réalité.

Il ne peut donc nous aider à être libres.] La liberté de l'artiste est trop particulière pour être celle des autresL'artiste est peut-être libre de créer ce qu'il veut.

Mais sa liberté ne me sert à rien.

Il est trop enfermé dansson propre monde, il crée un univers trop personnel que je ne comprends pas.

Picasso est peut-être un grandartiste, mais à moi, il ne me parle pas.

Il a su peut-être ouvrir une nouvelle voie dans l'art, mais sa voie n'estpas la mienne.

C'est pourquoi il ne peut pas m'aider à être libre. L'artiste peut être aliénéL'artiste peut être prisonnier de la mode, de la technique, des codes esthétiques de son époque et de sasociété.

Le théâtre classique est prisonnier de règles établies par des théoriciens, comme les trois unités, labienséance.

Par ailleurs, certains artistes ou certaines écoles artistiques se donnent un «programme»contraignant, qui peut vite tourner à la dictature: pensons au groupe surréaliste ou au «réalisme socialiste»du régime soviétique, etc.. »

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