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Esquisse d'une éthique comparée. - Les morales tabouïstes

Publié le 05/11/2011

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Il n'y a pas de société anarchique. On ne saurait concevoir un groupe humain sans règle de conduite. Dès que des individus ont été réunis - par leur naissance par les circonstances ou à la suite d'un accord commun - et obligés de vivre ensemble, ils sont de ce fait tenus d'établir entre eux un modus vivendi, une convention réglementant leurs rapports mutuels. Que le groupe soit constitué par une famille, un clan, une tribu ou un peuple, la même nécessité demeure d'un code de conduite comprenant des commandements et des interdictions, code oral ou écrit, rudimentaire ou, au contraire, réparti en une infinité de lois et de règlements.

« l'homme du péché, elle a, d'autre part.

en élevant son âme, fait monter vers le Ciel les prières des fidèles et les flèches des cathédrales.

Elle demeure le plus solide pi­ lier de la morale.

Que de diversité, en la France seule, dans la façon de concevoir l'idéal humain 1 Et combien plus encore nous en rencontrerons au cours de notre étude sur les règles de con­ duite qu'ont édictées tant de religions, tant de sectes, tant de philosophies ! On con­ çoit, dans ces conditions, combien il est ma­ laisé de définir la morale.

Surtout si l'on dé­ sire faire rentrer dans le cadre de cette définition le tabouïsme des primitifs, qui est en somme une manière d'impératif caté­ gorique collectif, et d'autant plus catégo­ rique qu'il est le principe même de l'exis­ tence du groupe humain.

La crainte qu'inspire le tabou est en ef­ fet si forte qu'on a vu, par exemple, des indigènes africains mourir de peur après avoir, par ignorance, mangé les restes d'un repas fait par le chef de la tribu et qui, par conséquent, étaient c intouchables :..

Ou encore des sauvages australiens mourir de soif au bord d'une rivière qui est le to­ tem de leur clan et dont, de ce fait, l'eau ne peut être bue.

Citons encore un cas bien spécifique : un magistrat anglais d' Austra­ lie avait comme employé un indigène dont la femme mourut de maladie; l'indigène demanda à son patron un congé pour aller, dans le but d'apaiser l'esprit de la défunte et suivant la coutume de sa tribu, tuer une femme d'une autre tribu; le magistrat refusa, naturellement, mais, dès ce jour, l'indigène, rongé de remords, se mit à dépé­ rir à vue d'œil; un beau jour, il disparut et, quelques mois plus tard, revint plein de santé et d'entrain; il avait rempli son c devoir ~ Dans les cas que nous venons de relater, l'individu obéit à une loi à laquelle il lui est impossible de se soustraire, même si aucun témoin n'est là pour constater et di­ vulguer la faute qu'il commettrait en ne s'y soumettant pas.

On peut donc, à son endroit, parler d'une c conscience :., d'une force intérieure qui oblige à agir suivant un principe, quelle que soit d'ailleurs la nature de ce principe.

Ces sauvages sont c moraux :.

à leur manière et leur mora­ lité, pour bizarre qu'elle nous apparaisse, n'en est pas moins authentique, puisqu'elle tes oblige à un comportement qui est sou- vent contraire à leurs Intérêts matériels ou même à leur instinct de conservation.

Pour embrasser les formes si diver,;es qu'elle revêt dans le temps et dans l'espace, on pourrait définir ainsi la morale : en­ semble des rêgles de conduite qu'une soci~U (ou une classe sociale) considêre comme nécessaire à son existence, à sa conserva­ tion et à son prestige.

Pour simple et suc­ cincte qu'elle soit, cette définition inclut cependant à la fois les morales primiti­ ves, les morales religieuses, les morales bourgeoises, les morales populaires.

Elle n'exclurait que les morales " philosophi­ ques :., les préceptes établis par un Platon, un Kant ou un Auguste Comte, qui ont été suivis par des individus isolés et qui, de ce fait, n'ont pas le caractère collectif inhérent au concept c morale :..

Il serait toutefois imprudent, avec Durk­ heim, de réduire la morale à une simple psycho-sociologie des mœurs, d'en négliger l'idéal pour n'en considérer que la réalité.

Vu sous cet angle, le Moyen Age, par exem­ ple, ne nous offrirait guère que le spec­ tacle de la plus affreuse brutalité : sa mo­ ralité était bien inférieure à sa morale.

Wundt était plus près de la vérité quand il qualifiait l'éthique de science c norma­ tive :t, dont la fonction essentielle est de tracer aux hommes un plan de vie.

Or, est-il bien du rôle de la science de pres­ crire ? Stuart Mill l'avait remarqué qui écrivait : « Tout art a un premier principe, une majeure générale qui n'est pas em­ pruntée à la science, c'est celle qui énonce l'objet poursuivi et le déclare désirable ...

Les propositions scientifiques affirment des points de fait.

Les propositions d'art ne di­ sent pas que quelque chose est, mais com­ mandent et conseillent ...

Tout art est ainsi le résultat combiné des lois de la nature découvertes par la science et des principes généraux de ce qu'on a appelé la téléolo­ gie ou théorie des fins :t.

Il ajoutait que la science s'exprime à l'aide du mode indi­ catif, l'art à l'aide du mode impératif.

Par conséquent, la morale est un art, c'est l' c art de la vie :..

Plus utilitariste encore que Stuart Mill, Bentham, rejoignant Epi­ cure, disait que la morale est l'art d'être heureux.

Quant à Herbert Spencer, père de l'évolutionnisme, il considérait que la mo­ rale est l'étude scientifique des variations de la moralité; le but de l'évolution eat l'adaptation réciproque de l'individu et de la société.

C'est dans un sens analogue. »

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