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Gorgias, Platon: croire et savoir (commentaire)

Publié le 05/11/2011

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gorgias

1)      Idée principale du texte

Dans ce texte, Socrate, porte-parole de Platon, analyse ce qui distingue le savoir de la croyance mais aussi ce qu’il y a de commun entre ces deux actes de pensée. A la différence de la croyance qui peut être vraie ou fausse, le savoir ne peut être faux. Mais il n’en demeure pas moins que celui qui sait croit aussi ce qu’il sait, au sens où il en est convaincu. Si donc l’on peut croire sans savoir, on ne peut pas savoir sans croire. Croyance et savoir, dans leur opposition même, sont donc deux modalités d’un même acte de l’esprit que Platon appelle ici conviction mais qu’on peut aussi appeler croyance.

 

Socrate – Existe-t-il une chose que tu appelles savoir ?

Gorgias – Oui.

S – Et une autre que tu appelles croire ?

G - Oui, bien sûr.

S – Bon, à ton avis, savoir et croire, est-ce pareil ? Est-ce que savoir et croyance sont la même chose ?

G- Pour ma part, Socrate, je crois qu’elles sont différentes.

S – Et tu as bien raison de le croire. Voici comment on s’en rend compte. Si on te demandait : « Y a-t-il, Gorgias, une croyance fausse et une croyance vraie ? «, tu répondrais que oui, je pense.

G – Oui.

S- Mais y a-t-il un savoir faux et un vrai ?

G – Aucunement.

S – Savoir et croyance ne sont donc pas la même chose, c’est évident.

G- Tu dis vrai.

S- Pourtant, il est vrai que ceux qui savent sont convaincus, et que ceux qui croient le sont aussi.

G- Oui, c’est comme cela.

S- Dans ce cas, veux-tu que nous posions qu’il existe deux formes de convictions : l’une qui permet de croire sans savoir, et l’autre qui fait connaître ?

G- Oui, tout à fait.

                                                        

Gorgias, Platon.

 

gorgias

« Mais le dialogue entre Socrate et Gorgias ne s’arrête pas là.

La suite, jusqu’à la fin, va nuancer cette opposition entre savoir et croire sans pour autant l’abolir.

Cette nuance est introduite par l’adverbe : «pourtant ». Si croire et savoir se distinguent et même s’opposent dans leur contenu de vérité (une croyance peut être vraie ou fausse alors qu’un savoir ne peut être que vrai), dans leur forme ils ont quelque chose de commun.

Tous deux, en effet, impliquent une adhésion de l’esprit à ce qui est cru ou su ou, pour parler comme Socrate, une conviction.

Même si je sais que deux plus deux font quatre, je ne peux pas le savoir sans en même temps y croire, ou en être convaincu.

Il apparaît alors que ce qu’on appelle savoir et ce qu’on nomme croyance sont en quelque sorte deux modalités distinctes d’un même acte de l’esprit que Socrate appelle ici « conviction » et qu’on pourrait désigner en termes de « tenir pour vrai ».

Croire et savoir sont deux manières de tenir pour vrai, la première impliquant la possibilité de l’erreur et la seconde la nécessité de la vérité. 3) Explication du passage : « Et tu as bien raison de la croire … C’est évident » Ce passage correspond au moment du texte où Socrate justifie la distinction précédemment posée et acceptée par Gorgias entre savoir et croire.

Il va donc s’agir, en quelque sorte, de faire de la distinction entre savoir et croire non pas l’objet d’une croyance (« je crois qu’elles sont différentes ») mais d’un savoir (« tu as bien raison de le croire »).

Socrate va ainsi montrer à Gorgias qu’il a de bonnes raisons de croire que la croyance n’est pas un savoir.

Prenons un exemple pour illustrer le propos de Socrate. Lorsque je crois qu’il existe des extraterrestres, cette croyance peut être vraie ou fausse, car il se peut qu’il existe des extraterrestres comme il se peut qu’il n’en existe pas.

Ainsi, lorsque je dis qu’il existe des extraterrestres, je peux être dans le vrai comme dans le faux.

C’est pourquoi je ne peux que croire à l’existence des extraterrestres, car je ne sais pas s’ils existent ou non.

La croyance n’implique donc ni ne pose avec certitude la vérité de son propre contenu.

La croyance est donc rapport à une vérité seulement possible, laquelle reste accidentelle et contingente par rapport au fait même de croire.

Au contraire, le rapport du savoir au vrai est un rapport essentiel (non accidentel), et nécessaire (non contingent).

Il est de l’essence même du savoir que d’être vrai (tout savoir est savoir du vrai) de sorte que ce que l’on sait ne peut pas ne pas être vrai.

En d’autres termes, un vrai savoir est un savoir vrai et un savoir faux est un faux savoir.

« En ce sens, écrit Pascal Engel, la croyance est synonyme d’opinion, qui n’implique pas la vérité de ce qui est cru, et s’oppose au savoir, qui implique la vérité de ce qui est su ». 4) Si l’on ne peut pas savoir sans croire en même temps ce que l’on sait, qu’est-ce qui distingue alors le savoir de la croyance ? « Lorsque je crois, de la foi la plus ferme, écrit Jules Lequier, il me faut savoir que je crois et non pas croire que je sais ».

Cette formule indique bien que croire n’est pas savoir : ce que je crois, je ne le sais pas et ce que je sais, je ne le crois pas.

Et pourtant, au-delà de cette distinction entre savoir et croire, Platon, dans le Gorgias , établit que le savoir implique lui aussi une forme de croyance. Comment savoir, en effet, sans croire ce que l’on sait ? Dans ces conditions, comment distinguer entre une croyance qui n’est, en quelque sorte, que croyance, et une croyance qui enveloppe un savoir ? Lorsque je dis que je crois quelque chose, à strictement parler, je ne sais pas si c’est vrai.

De fait, comme le montre Platon, la croyance n’implique pas, en elle-même, la vérité de son propre contenu. Une croyance peut être vraie comme fausse.

Le contenu d’une croyance reste indéterminé quant à sa valeur de vérité.

En revanche, lorsque je sais quelque chose, je sais en même temps que c’est vrai. Aussi Platon établit-il qu’un savoir est, par essence, porteur de vérité.

Un savoir ne peut pas, en tant que tel, être faux.

Un savoir faux ne peut, en réalité, qu’être un faux savoir.

Quoi donc ? Une erreur, une illusion, c’est-à-dire une croyance ou une opinion fausse.

D’où la distinction que l’on peut établir entre les propositions « je crois qu’il fera beau demain » et « je sais que la terre est ronde » ou « je sais que deux et deux font quatre ».. »

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