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(Idée d’une histoire universelle d’un point de vue cosmopolitique, Proposition 6)- « insociable sociabilité »

Publié le 22/09/2018

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histoire

L’homme est un être destiné à la société (bien qu’il soit aussi, pourtant, insociable), et en cultivant l’état de société il éprouve puissamment le besoin de s’ouvrir à d’autres (même sans viser par là quelque but) ; mais d’un autre côté, embarrassé et averti par la crainte du mauvais usage que d’autres pourraient faire du dévoilement de ses pensées, il se voit contraint de renfermer en lui-même une bonne partie de ses jugements (particulièrement quand ils portent sur d’autres hommes). C’est volontiers qu’il s’entretiendrait avec quelqu’un de ce qu’il pense des hommes qu’il fréquente, de même que de ses idées sur le gouvernement,  la religion, etc. ; mais il ne peut avoir cette audace, d’une part parce que l’autre, qui retient en lui-même prudemment son jugement, pourrait s’en servir à son détriment, d’autre part, parce que, concernant la révélation de ses propres fautes, l’autre pourrait bien dissimuler les siennes et qu’il perdrait ainsi le respect de ce dernier s’il exposait à son regard, ouverte-ment, tout son cœur.

 

Kant

 

QUESTIONS

 

1. Dégagez l'idée centrale et le mouvement du texte.

 

2. Expliquez :

 

a. « en cultivant l'état de société il éprouve puissamment le besoin de s’ouvrir à d’autres (même sans viser par là quelque but) » ;

 

b. « parce que, concernant la révélation de ses propres fautes, l’autre pourrait bien dissimuler les siennes et qu’il perdrait ainsi le respect de ce dernier s’il exposait à son regard, ouvertement, tout son cœur ».

 

3. La vie en société nous rend-elle dépendants du jugement d’autrui ?

L’intérêt du texte est de définir l’« insociable sociabilité » de l’homme (Idée d’une histoire universelle d’un point de vue cosmopolitique, Proposition 6) et d’en mettre au jour la cause. D’un côté, en effet, il est de la nature de tout homme de rechercher la compagnie de ses semblables. L’homme n’est pas fait pour être seul, et a besoin de communiquer avec autrui afin d’exister en tant qu’homme. Mais, de l’autre, il s’en méfie, et cette méfiance s’entretient selon un cercle vicieux : nous nous méfions d’autrui qui se cache parce qu’il se méfie de nous, ce qui le rend encore plus méfiant, etc.

Kant soutient que l’homme est par nature sociable et insociable. Il est sociable, parce qu’il est par nature poussé à rechercher la compagnie de ses semblables afin de développer ses qualités d’homme, mais il est insociable parce qu’il répugne à s’ouvrir complètement à eux et craint l’image qu’ils lui renverront de lui. Le premier paragraphe du texte pose cette thèse. Le second (à partir de « C’est volontiers », l. 7) la développe.

 

C’est un cercle vicieux de la méfiance qui explique l’insociabilité de l’homme : on craint qu’autrui ne se serve de nos opinions à nos dépens, et d’être le seul à se dévoiler. Du coup, on suspecte autrui et on se renferme davantage, etc. Kant pose donc la question de l’influence d’autrui sur le jugement de chacun et, plus largement, il interroge le hiatus qui sépare les apparences et l’essence, ce que l’on donne à voir et ce que l’on est vraiment.

histoire

« • ju gement : c' est l'exer cice de la raison, qui cherche à déterminer le bien et le mal dans le registre pratique et à disce rner le vrai du faux dans le domaine théorique.

• fautes : contrairement aux erreurs, les fautes ont une connotation moral e.

Elles désignent chez Kant un manquement à l'exigence pratique, une action dont on reconnaît qu'elle est contraire à ce qu'elle aurait dû être .

• respect : c' est le sentiment moral par excellence, qui nous enjo int de consid érer autrui comme un être digne et responsable, bref, comme une fin en soi et non (seulement) comme un mo yen .

• cœur : il ne désigne pas ici l'organe physiologique, mais le « lieu » des sentiments et des affects .

• Intérêt philosophique du texte L' intérêt du texte est de définir l'« inso ciable socia bilité » de l'homme (Idée d'une histoir e univer selle d'un point de vue cosmo politique, Propo­ sition 6) et d'e n mettre au jour la cause.

D'un côté, en effet, il est de la nature de tout homme de rechercher la compagnie de ses semblable s.

L' homme n'est pas fait pour être seul, et a besoin de communiquer avec autrui afin d'exist er en tant qu'homme .

Mais, de l'autre, il s'e n méfie, et cette méfiance s'entretient selon un cercle vicieux : nous nous méfions d' autrui qui se cache parce qu'il se méfie de nous, ce qui le rend encore plus méfiant, etc.

• Problématique de la quest ion 3 La question est de savoir si cette attitude d'ouv erture-retrait par rapport à autrui a des conséquences sur notre jugement personnel.

La vérité d'une opinion se mesure-t-elle au nombre et à l'influence de ceux qui la soutien­ nent ? Suf fit-il que l'on se trouve en compagnie de gens «bien pensa nts» pour que l'on se démette de sa propre faculté de juger en la calquant sur la leur ? • Citations • «J 'avais dès longtemps remarqué que, pour les mœurs, il est besoin quelquef ois de suivre des opinions qu'on sait être fort incerta ines, tout de même que si elles étaient indubitables [ ...

] ma is, parce qu'alors je dés irai s vaquer seulement à la recherche de la vérité , je pensais qu'il fallait que je fisse tout le contraire, et que je reje tas se, comme absolument faux, tout ce en quoi je pourrais imaginer le moindre doute, afin de voir s'il ne resterait point, après cela, quelque chose en ma créanc e, qui fût entièrement indu­ bitable » (Desca rtes, Di sco urs de la méthode, IV).

• «L a réflexion naît des idées compa rées, et c'est la pluralité des idées. »

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