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Kant, Idée d'une histoire universelle au point de vue cosmopolitique (in Opuscules sur l'Histoire)

Publié le 11/04/2012

Extrait du document

kant

L'homme a un penchant à s'associer, car dans un tel état, il se sent plus qu'homme par le développement de ses dispositions naturelles. Mais il manifeste aussi une grande propension à se détacher (s'isoler), car il trouve en même temps en lui le caractère d'insociabilité qui le pousse à vouloir tout diriger dans son sens; et de ce fait, il s'attend à rencontrer des résistances de tous côtés, de même qu'il se sait par lui-même enclin à résister aux autres. C'est cette résistance qui éveille toutes les forces de l'homme, le porte à surmonter son inclination à la paresse, et, sous l'impulsion de l'ambition, de l'instinct de domination ou de cupidité, à se frayer une place parmi ses compagnons qu'il supporte de mauvais gré, mais dont il ne peut se passer. L'homme a alors parcouru les premiers pas, qui de la grossièreté le mènent à la culture dont le fondement véritable est la valeur sociale de l'homme [...]. Sans ces qualités d'insociabilité, peu sympathiques certes par elles-mêmes, source de la résistance que chacun doit nécessairement rencontrer à ses prétentions égoïstes, tous les talents resteraient à jamais enfouis en germes, au milieu d'une existence de bergers d'Arcadie, dans une concorde, une satisfaction et un amour mutuel parfaits; les hommes, doux comme les agneaux qu'ils font paître, ne donneraient à l'existence plus de valeur que n'en a leur troupeau domestique [...]. Remercions donc la nature pour cette humeur non conciliante, pour la vanité rivalisant dans l'envie, pour l'appétit insatiable de possession ou même de domination. Sans cela toutes les dispositions naturelles excellentes de l'humanité seraient étouffées dans un éternel sommeil.

 

Questions

1. Dégagez les idées essentielles du texte.

2. Expliquez :

a) "dont le fondement véritable est la valeur sociale de l'homme";

b) «source de la résistance que chacun doit nécessairement rencontrer à

ses prétentions égoïstes«;

c) "ne donneraient à l'existence plus de valeur que n'en a leur troupeau domestique".

kant

« 3.

Essai de réflexion personnelle : dans quelle mesure l'« insociabilité » peut-elle être considérée comme une condition favorable au progrès de l'humanité? Réponses rédigées 1.

Kant soutient dans ce texte une sorte de paradoxe : celui de «l'insociable sociabilité » des hommes.

L'affirmation de l'ambivalence de l'homme à l'égard de la société permet à la fois de penser l'origine de celle-ci (la « ten­ dance à s'associer ») et d'en expliquer l'évolution (l'individualisme comme moteur du progrès).

La nature humaine est donc ambiguë; mais cette ambiguïté même permet d'esquisser une sorte de téléologie du devenir historique (impliquant une finalisation du développement humain).

Structure du texte • Dans un premier moment, Kant propose une double affirmation qui explicite le paradoxe évoqué : -l'homme est porté à s'associer dans la mesure où il éprouve ainsi la pos­ sibilité de développer ses facultés; -l'homme a tendance au repli individualiste dans la mesure où il saisit sa propre insociabilité et celle des autres.

• Dans un deuxième moment, Kant pose à l'origine des progrès de l'homme (accomplissement de soi et développement de facultés virtuelles) la nécessité de vaincre la résistance que constitue la coexistence des individualismes .

• Enfin, dans un troisième moment, Kant souligne le caractère « positif» de l'ambivalence de l'homme à l'égard de la vie sociale.

Sans elle, le passage des dispositions innées aux facultés développées n'aurait pu se faire .

La vie sociale ainsi interprétée reçoit donc un caractère constitutif de l'homme et de l'humanité.

2.

a ) « dont le fondement véritable est la valeur sociale de l'homme » : la culture doit être pensée comme un ordre spécifique, distinct de la nature.

Il y a donc nécessité, tout à la fois, d'expliquer le passage de la nature à la culture, et d'inscrire dans la nature de l'homme la condition de possibilité de ce passage.

Parler de fondement de la culture, c'est se référer à une détermination qui puisse la constituer, c'est-à-dire lui donner son origine et sa raison d'ê tre, sa justification.

Que le passage soit pensé comme évo ­ lution chronologique ou différenciation nécessaire propre à la condition humaine, cela ne change pas fondamentalement l'idée d'un rapport constitutif entre une disposition virtuelle de l'homme (l'homme vaut pour la société, c'est-à-dire qu' il porte en lui les conditions de sa réalisation) et la culture comme ordre spécifique (transformation réglée de la nature, génératrice, par elle-même, de données nouvelles).

Ainsi s'établit une relation dialectique entre l'homme et la culture : la disposition initiale de. »

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