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KANT: II y a dans la nature humaine une certaine fausseté

Publié le 27/02/2008

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kant
« II y a dans la nature humaine une certaine fausseté qui doit, en définitive, comme tout ce qui vient de la nature, aboutir à de bonnes fins, je veux parler de notre inclination à cacher nos vrais sentiments et à faire parade de certains autres supposés, que nous tenons pour bons et honorables. Il est très certain que ce penchant qui porte les hommes à dissimuler et en même temps à prendre une apparence avantageuse, les a non seulement civilisés mais encore moralises peu à peu, dans une certaine mesure, parce que personne ne pouvait pénétrer à travers le fard de la décence, de l'honorabilité et de la moralité. On trouva alors, dans les prétendus bons exemples qu'on voyait autour de soi, une école d'amélioration pour soi-même. Mais cette disposition à se faire passer pour meilleur qu'on ne l'est et à manifester des sentiments que l'on n'a pas, ne sert que provisoirement, en quelque sorte, à dépouiller l'homme de sa rudesse et à lui faire prendre au moins tout d'abord l'apparence du bien qu'il connaît; car, une fois que les bons principes sont développés et qu'ils sont passés dans la manière de penser, cette fausseté doit alors être peu à peu combattue avec vigueur, car autrement elle corrompt le coeur et étouffe les bons sentiments sous l'ivraie de la belle apparence. » KANT.

QUESTIONNEMENT INDICATIF    • « Une certaine fausseté. « Cette fausseté est-elle certaine ? De quoi s'agit-il ?  • En quoi peut-on soutenir qu'elle vient de « la nature «?  • Pourquoi Kant ne dit-il pas « qui sont bons et honorables « mais « que nous tenons pour bons et honorables «?  • Quelle(s) différence(s) faites-vous entre « civilisés « et « moralises « ?  • Pourquoi Kant ajoute-t-il « dans une certaine mesure « ?  • Que signifie « le fond «?  • Pourquoi, selon Kant, s'agit-il de « prétendus bons exemples «?  • En quoi et pourquoi, selon Kant, « cette disposition ne sert que provisoirement « ?  • Pourquoi et à partir de quand, selon Kant, « cette fausseté doit... être combattue avec vigueur «?  • Que signifie ici « cœur «, « bons sentiments «?  • En quoi ce texte peut-il paraître surprenant lorsqu'on connaît la thèse kantienne du fondement de la morale ? Ce texte est-il en contradiction avec cette thèse ?

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« Cet extrait nous donne ici l'occasion de confirmer ce rôle et cette place au sein de la connaissance puisque Kant yaborde la question des fondements psychologiques, artificiels ou véritables, de la moralité humaine en actes.

Kantne se méprend pas sur la nature humaine et sur les mobiles qui fondent son action morale.

Il déclara d'ailleurs, ausein de la même œuvre, que l'homme est fait, par nature, d'un « bois courbe ».

En effet, si nous sommes touscapables d'agir conformément à la moralité, il ne fait aucun doute que rares sont ceux qui agissent par pur respectde cette dernière.

Kant voit ainsi « dans la nature humaine une certaine fausseté ».

Celle-ci n'est autre que cette tendance à n'agir moralement que pour sauver les apparences.

Cette tendance, selon l'auteur, s'exprime par la« parade » et le masque que chacun de nous porte dans une société où il est certes mal vu de se comporter de manière amorale ou, pis, immorale.

Le mobile de nos actions morales serait donc, avouons-le, plus souvent lié ànotre désir de ne pas déplaire à nos concitoyens qu'à notre respect véritable des valeurs morales.

Kant remarqueici, implicitement, le poids d'une morale traditionnellement transmise (héritage de valeurs ancestrales) que nous nousefforçons de respecter plus par crainte du regard et du jugement d'autrui. Mais Kant ne sanctionne pas (du moins pas encore !) cette attitude puisqu'elle est, en son sens, porteuse desgermes d'une évolution vers une civilisation moralement juste et véritable.

Cette idée est soutenue, par Kant, parréférence à une certaine finalité de la nature : « Il y a dans la nature humaine une certaine fausseté qui doit, en définitive, comme tout ce qui vient de la nature,aboutir à de bonnes fins » Cette idée n'est pas sans rappeler les premiers mots d'Aristote dans son œuvre Éthique à Nicomaque ; ce dernier affirmant que toute chose tend vers le Bien suprême.

L'argumentation morale kantienne, comme celle d'Aristote,dépend donc, en son fondement, d'un principe métaphysique (au-delà du monde physique).

En effet, Kant, enreconnaissant une finalité naturelle positive, déplace l'argumentation vers une « Idée » (c'est-à-dire une spéculationde la Raison pure, un simple postulat invérifiable concrètement, inexpérimentable) qu'il n'est pas possible de vérifierdans le stricte cadre de l'expérience sensible.

Rien dans la nature ne permet, de fait, de vérifier une telle finalité.

Cedéplacement a une incidence, philosophiquement, puisque Kant ménage alors – au sein de sa théorie de laconnaissance – une place à la croyance, ainsi qu'il l'avoue déjà dans cette œuvre : « J'ai donc dû supprimer le savoir pour lui substituer la croyance .

» (cf.

seconde Préface de la Critique de la Raison pure ) Au sein de sa thématique morale, Kant réhabilite subtilement et de manière tacite la religion.

Mais plus, Kant, ainsique mentionné plus haut, admet que cette attitude – au demeurant hypocrite – qui pousse l'homme à agir par simpleconformité à la vertu est « heuristique » (permet la progression et l'apprentissage).

Ce que Kant affirme, c'est quela civilisation n'eut pu s'imposer sans cette attitude purement formelle.

Bien plus, cette attitude a permit auxhommes de se comporter toujours plus en accord avec les valeurs morales, bien que les mobiles demeurèrentobscurs voire intéressés (on peut agir moralement par désir d'être récompensé).

Parce que ces mobiles sontjustement obscurs, cachés, ils ne sont pas, en tant que tels, identifiables.

Dès lors la course à l'action moralepouvait commencer, personne n'étant capable de distinguer une action morale intéressée d'un comportementvéritablement vertueux.

Cette moralité apparente en vint alors, aux yeux de l'auteur, à faire école et donc à sedévelopper. II) De l'insuffisance morale du paraître Mais si Kant loue la valeur heuristique de cette morale simplement feinte, formelle, il admet ensuite que celle-ci nepeut rester en l'état sous peine de déclin. Cette morale formelle ne peut qu'être provisoire, des mots même de l'auteur.

Peut-être que cette « moraleprovisoire » sonne comme une critique implicite de celle dont parlait Descartes.

En effet, ce dernier, cherchant àrefonder la connaissance par ses seules capacités personnelles, affirma l'utilité d'une telle « morale par provision »comme volonté d'agir temporairement (dans cette attente de l'accomplissement d'un savoir total et certain, les. »

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