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LA CRITIQUE NIETZSCHÉENNE

Publié le 01/05/2011

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La philosophie de Nietzsche est essentiellement une théorie des valeurs. C'est un fait que les hommes attachent plus ou moins de valeur à telle ou telle pensée, à tel ou tel sentiment, à tel ou tel acte. Ils jugent, d'ordinaire, par exemple, la vérité supérieure à l'erreur, la bonté supérieure à la méchanceté, un geste de bienfaisance supérieur à un assassinat. Nietzsche s'intéresse, avant tout, à ces différences de valeur. Il constate qu'il n'y a pas de valeur attachée de façon incontestable, définitive, absolue aux objets extérieurs, ni aux états d'âme, ni aux actes, ni aux lois, ni aux principes ; c'est l'homme qui a défini toutes ces valeurs. L'homme (Mensch) est un animal qui mesure, qui apprécie et qui évalue. Nietzsche cherche à savoir d'où viennent ces appréciations, et comment on les justifie. La création de cette table des valeurs lui paraît le fait capital de l'histoire universelle ; car ce sont des jugements de cette sorte qui déterminent les opinions des hommes, leurs sentiments, leurs actions. Tout changerait si l'on modifiait la hiérarchie des valeurs. Précisément Nietzsche se demande s'il ne faut pas procéder à la révision, à la transvaluation de toutes les valeurs (Umwerthùng aller Werthe). A ce point de vue, sa philosophie est, — dit M. Charles Andler, « la philosophie la plus idéaliste qu'il y ait au monde, celle qui attache plus d'importance aux valeurs qu'aux faits, et qui espère transformer un jour les faits par les valeurs «.

« triomphe de la superstition et de l'absurdité.

Chacun devrait, de nos jours, apprendre à connaître au moins unescience à fond ; il saurait ce qu'est une méthode scientifique, et combien est nécessaire la plus extrême prudence.« Le plus grand progrès qu'aient fait les hommes, c'est d'avoir appris à raisonner juste ». * * * Nietzsche établit, chemin faisant, les règles de cette discipline intellectuelle qui rend possible la liberté de l'esprit.« L'art de penser doit être appris comme la danse, comme une espèce de danse ».,L'esprit libre, s'il doit être lui-même, doit cependant éviter d'être l'esclave de son tempérament.

Nous cherchonsinconsciemment les opinions et les principes qui conviennent à notre tempérament, et ensuite ces principes, cesthéories paraissent avoir créé notre caractère.

Notre pensée semble la cause de notre être, alors que notre être estla cause de notre pensée.

Il faut éviter ce laisser-aller, cette indolence, et la vanité de nous montrer logique parcette union de l'être et de la pensée.Il faut s'habituer à bien voir et à tout voir, mettre chaque objet dans le meilleur jour, et en faire le tour avec desyeux attentifs.

Il y a une préparation, un apprentissage dans cet art de voir.Il faut garder en son pouvoir la capacité de saisir le pour et le contre : plus nous aurons d'yeux, d'yeux différents,appliqués à une chose, mieux et plus « objectivement » nous la connaîtrons.L'esprit libre pense librement au sujet de l'esprit lui-même ; il ne se cachera pas ce qu'il peut y avoir d'insuffisanceet de faiblesse dans l'intelligence humaine.

Tant pis si on l'accuse de pessimisme intellectuel !Il faut se défier du langage et des préjugés qu'il entraîne.

(La critique de Nietzsche devance ici et prépare lesanalyses de William James et de M.

Henri Bergson).

La vie intérieure est un courant continu et indivisible ; il ne s'ytrouve jamais de faits isolés, ni d'états identiques.

Or le langage amène à morceler cette continuité, à considérerdes états distincts, simples, semblables les uns aux autres.

En les nommant, nous croyons, à tort, en saisirl'essence.

« Il y a, cachée dans le langage, une mythologie philosophique qui, à chaque instant, reparaît en dépit detoutes les précautions ». L'illusion de la liberté, qui suppose des actions particulières distinctes, tient à cette atomistique, créée par lelangage.De là, aussi, bien des illusions sur ce qu'on appelle le moi.

Le langage ne désigne que des états nettementcaractérisés, des états extrêmes : colère, haine, amour, joie, douleur.

Les intermédiaires, les nuances, sontsacrifiés.

—Or nous sommes habitués à ne plus observer dès que les mots nous manquent, car il est pénible alors depenser avec précision : il semble qu'avec les mots cesse l'existence elle-même.

Nous ne sommes pas ce que nousparaissons être dans les conditions où nous place le langage.

Nous nous méconnaissons ; nous tirons de cesobservations sur nous-mêmes des conclusions inexactes ; et la fausse opinion que nous nous sommes ainsi faite agitensuite sur notre caractère et sur notre destinée...Nietzsche résume le « danger du langage pour la liberté intellectuelle » par cette formule : « Toute parole est unpréjugé »...Décidé à bien observer, à largement ouvrir ses yeux sur le monde, l'esprit libre fera de sa vie une expérience, ets'offrira aux aventures : « curieux jusqu'au vice, chercheur jusqu'à la,cruauté ».

« Nous sommes des expériences ; ayons la volonté d'en être une ».

« Ta propre vie devient uninstrument de connaissance : il dépend de toi que répondent à ce dessein tous les traits de ta vie, tes essais, teserreurs, tes fautes, tes illusions, tes souffrances, tes amours, tes espoirs ».

Ces expériences permettront de mieuxcomprendre les étapes de l'humanité antérieure.

Il est bon d'avoir aimé la religion et l'art comme on aime une mèreet une nourrice, puis d'avoir, pour comprendre, dépassé ces affections.L'esprit libre planera sur toutes choses avec une « liberté d'oiseau ».

Il roulera à travers l'existence comme « uneboule de neige pen-sante ».

Atteint de « nomadisme intellectuel », il sera un voyageur prenant plaisir au spectacledes villes comme à la solitude.Mais ce voyageur ne méconnaîtra pas l'ombre aussi nécessaire que la lumière à une exacte représentation dumonde.

Il ne négligera pas « l'ombre que tous les objets montrent quand le rayon de soleil de la science tombe sureux ».Décidé à percevoir l'ombre aussi bien que la lumière, l'esprit libre critiquera toutes les idées traditionnelles, tous lespréjugés, toutes les croyances ; il est prêt, même, à « déchirer ce qui l'attire »... *** Nietzsche a été attiré par la métaphysique des philosophes ; cet attrait ne l'empêche point de la critiquer, de ladéchirer.Il s'étonne que les philosophes osent se présenter comme les défenseurs de la vérité : « Vous, messieurs leschevaliers à la triste figure, qui vous tenez dans les recoins, embusqués dans les toiles d'araignées de l'esprit ! »L'erreur est à l'origine de toutes les spéculations métaphysiques : ce sont les pires méthodes de connaissance quiconduisent à la croyance en des idées métaphysiques : dès qu'on a dévoilé ces méthodes, on les a, par là même,réfutées.

S'il y avait un monde métaphysique distinct du monde tombant sous les sens, il serait pour nousinaccessible, incompréhensible, il n'aurait que des attributs négatifs.

Le monde métaphysique, que l'on déclare seulréel, et que l'on qualifie de monde-vérité, est une création du mensonge.Même si l'existence d'un pareil monde était prouvée, sa connaissance serait la plus inutile de toutes.

C'est dans le. »

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