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La diversité des religions oppose-t-elle un démenti à leur vérité ?

Publié le 27/02/2008

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La diversité semble exclure toute prétention à la vérité au profit de situations conflictuelles et insolubles, c'est par exemple le cas des doctrines métaphysiques que Kant évoque sous la forme d'un « champ de bataille » où se développent des « conflits sans fin » selon les expressions de la Préface à la première édition de la Critique de la raison pure. La question de la diversité semble se poser de manière encore plus cruciale pour la religion, car alors le champ de bataille n'a plus rien de métaphorique et prend bien plutôt la forme très concrète des guerres de religions. D'où un certain fatalisme à l'idée que ces conflits soient sans fin en l'absence non seulement de critère de vérité pour trancher entre des positions religieuses tenables et d'autres qui ne le seraient pas, mais aussi d'une motivation suffisante pour renoncer au statut apparemment usurpé des contenus doctrinaux de chaque religion. Un tel renoncement correspondrait à ce que recouvre le terme de démenti, dans la mesure où opposer un démenti c'est faire une déclaration infirmant des informations antérieures. La possibilité d'un tel renoncement suppose donc un sujet qui met en doute ses croyances religieuses.

« II.

La diversité des religions peut être saisie dans une démarche qui cherche au-delà de cette diversité,des constantes invariables qui constitueraient un socle commun à toutes les religions.

Ce socle commun seraitproprement la vérité des religions diverses, et il suppose pour être dégagé, non pas la soumission à une quelconqueautorité, mais un travail de la raison.

La raison doit être comprise comme un outil naturellement présent en l'homme,qui nous met en rapport avec la raison divine qui gouverne l'univers.

Cette raison est celle d'un sens communpartagé par tous, et le sentiment religieux, en tant qu'il apparaît comme présent dans toutes les sociétés, seraientune forme parmi d'autre de ce sens commun.

Une telle démarche aboutit à la constitution d'une religion naturelle, censée mettre un terme au conflitdes sectes et hiérarchiser les sources de connaissance dans les matières qui concernent la droiture de la pratique.La question se déplace de l'orthodoxie visée par l'apologétique à l'orthopraxie ou pratique droite, car fondée enraison, et donc conforme à la nature des choses à la nature de l'homme.

Ce qui compte n'est plus le dogme mais lapratique, la religion se recentre sur sa dimension éthique.

Un tel mouvement se retrouve dans le dialogue deCicéron, La nature des dieux .

Cicéron utilise les concept stoïcien de prénotion (= notion commune forgée rationnellement par tous les hommes à partir de l'expérience et qui sert de point de départ à l'argumentation) pourrendre compte du fait que, sans pour autant avoir de certitude en la matière, nous avons le sentiment de l'existenced'un ou de plusieurs dieux.

Pourtant dégager des points d'accord entre les religions ne va pas du tout de soi, que ce soit parrapport à différentes étapes historiques (que faire de la rupture en occident entre le polythéisme et le monothéisme?) ou par rapport à différentes cultures d'une même époque (le bouddhisme remet en cause les termes d'âme et deDieu).

Plus fondamentalement, l'idée d'un soubassement rationnel de la religion pourrait n'être qu'une illusionuniversaliste, inattentive à l'inclusion des religions dans des cultures plus larges, mais aussi d'autant plusirréductibles les unes aux autres.

Poussé à la limite, le concept de religion naturelle nous conduit à poser unimpératif de tolérance par rapport aux différences irréductibles, non pas comme ayant elles aussi une part de vérité,mais justement, tolérables en tant qu'erreurs excusables par 'l'ignorance' et le statut 'primitif' de leur civilisation.

Transition : l'idée d'un démenti doit être rappelée pour nous faire voir ce que les deux approches, par l'autorité comme par la raison ont d'insuffisant.

Ce qui se joue c'est le rapport de sujet à ses propres croyances, donc en finde compte une expérience subjective dont la modalité serait irréductible; La vérité de la manifestation subjective III.

Un tel déplacement de la perspective implique de faire porter la question sur les modalités du rapportentre le sujet et ce qu'il tient pour vrai.

Dans la Critique de la raison pure , dans la section « De l'opinion, du savoir et de la croyance », Kant distingue entre trois régimes de la créance, le fait de tenir pour vrai.

L'opinion estinsuffisante subjectivement comme objectivement, la croyance est suffisante seulement subjectivement(conviction) et le savoir est suffisant subjectivement et objectivement (certitude).

Ce qui est essentiel pour notresujet est la question de savoir à quel niveau situer une vérité dans la croyance religieuse qui puisse être compatibleavec la conscience même d'une diversité des doctrines.

La première manière de traiter la question est de rappeler ce qui sert de pierre de touche entre la simpleopinion et la croyance, à savoir la communication et le pari.

On peut dire que la religion requiert un régime de véritéde l'ordre de l'incommunicable et de l'incommensurable, donc qui puisse être tenu pour vrai sans que cela n'impliqueune universalisation contraire à la diversité des croyances.

La seconde manière est de faire de la croyance religieuse un mode de saisie particulier de l'objectivité,ce que fait Hegel en situant, dans le Précis de l'encyclopédie des sciences philosophiques la religion entre l'art et la philosophie.

La religion est une manifestation de l'esprit mais sa vérité n'est pas définitive, ni autonome, en ce sens,d'une part, qu'elle résulte d'un processus dont elle est une étape, celui de la constitution de l'esprit en esprit absolu,et d'autre part, que l'expérience religieuse implique en elle-même la possibilité d'être ressaisie par la philosophie.

Conclusion Ces dernières analyses nous conduisent à l'idée que la vérité d'une religion peut être pensée enconformité avec la diversité des religions au sens d'une part d'une pluralité d'expériences possibles et d'autre partd'une manifestation phénoménale forcément multiple.

Néanmoins, deux conditions ont été maintenues tout au long de l'analyse.

D'une part, il y a la non-sortiedu religieux, c'est-à-dire le fait que le démenti implique une critique interne à la religion.

Le paradoxe est que c'estjustement en reconnaissant une vérité à la religion (comme idéologie dominante) que l'on réalise son dépassement.D'autre part, il y a le fait que la religion constitue une dimension bien isolée, précise d'une culture, et non unecaractéristique diffuse.

La question de la vérité en effet semble difficilement compatible avec cet autre aspect, lemagique de la religion, présent dans les mythologies de l'homme moderne comme dans celles des sociétéstraditionnelles.. »

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