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La nature de l'objet de la psychologie vous paraît-elle lui permettre d'être une science ?

Publié le 27/02/2008

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Or, peut-il y avoir connaissance scientifique sans la précision que donne la mesure ?     Conscients de ces difficultés de constituer une science des faits psychiques, certains psychologues, au début de ce siècle, prétendirent les tourner, soit en donnant à la psychologie un objet nouveau, soit en utilisant des moyens- plus sûrs d'atteindre les faits considérés comme son objet propre. RIBOT déjà, dans son ouvrage sur La psychologie allemande contemporaine, donnait comme objet à la psychologie « les phénomènes nerveux accompagnés de conscience ». Plus tard se répandait la conception béhavioriste qui fait de la psychologie « la science objective du comportement des organismes » (PIERON). Cette nouvelle science se désintéresse des faits de conscience qui nous échappent d'autant mieux que nous sommes plus acharnés à leur poursuite; l'observation du chercheur se limite aux faits physiologiques associés à la vie intérieure : mimique et gesticulation, battements du coeur et sécrétions glandulaires; enfin, dans la mesure où cette étude est actuellement possible, modifications des centres nerveux qui commandent l'activité de tout l'être vivant. Voilà un objet véritable sur lequel le savant peut se pencher sans crainte de ne poursuivre qu'une ombre. Malheureusement cet objet n'a rien de psychique et la science constituée d'après ces méthodes ne sera pas une psychologie. Il peut être intéressant de connaître avec exactitude les réflexes provoqués par le chatouillement ou les effets de la fatigue sur la chronaxie, mais nous ne sommes pas introduits par là dans le jeu de la vie intérieure, objet véritable de la psychologie. D'ailleurs, si l'ensemble de ces recherches forme un tout et peut constituer une science, c'est que, consciemment ou inconsciemment, elles sont ordonnées à l'explication de phénomènes connus par la conscience; de cette conscience, le béhavioriste peut faire abstraction, mais elle n'en continue pas moins de l'éclairer et de donner un sens à des termes qui, sans elle, ne seraient que des sons. Le psychologue doit donc étudier les faits de conscience; mais ne peut-il pas les connaître sans avoir à se fier à cette introspection si suspecte d'erreur ?

« Conscients de ces difficultés de constituer une science des faits psychiques, certains psychologues, au début de cesiècle, prétendirent les tourner, soit en donnant à la psychologie un objet nouveau, soit en utilisant des moyens-plus sûrs d'atteindre les faits considérés comme son objet propre.RIBOT déjà, dans son ouvrage sur La psychologie allemande contemporaine, donnait comme objet à la psychologie «les phénomènes nerveux accompagnés de conscience ».

Plus tard se répandait la conception béhavioriste qui fait dela psychologie « la science objective du comportement des organismes » (PIERON).

Cette nouvelle science sedésintéresse des faits de conscience qui nous échappent d'autant mieux que nous sommes plus acharnés à leurpoursuite; l'observation du chercheur se limite aux faits physiologiques associés à la vie intérieure : mimique etgesticulation, battements du coeur et sécrétions glandulaires; enfin, dans la mesure où cette étude estactuellement possible, modifications des centres nerveux qui commandent l'activité de tout l'être vivant.

Voilà unobjet véritable sur lequel le savant peut se pencher sans crainte de ne poursuivre qu'une ombre.Malheureusement cet objet n'a rien de psychique et la science constituée d'après ces méthodes ne sera pas unepsychologie.

Il peut être intéressant de connaître avec exactitude les réflexes provoqués par le chatouillement oules effets de la fatigue sur la chronaxie, mais nous ne sommes pas introduits par là dans le jeu de la vie intérieure,objet véritable de la psychologie.

D'ailleurs, si l'ensemble de ces recherches forme un tout et peut constituer unescience, c'est que, consciemment ou inconsciemment, elles sont ordonnées à l'explication de phénomènes connuspar la conscience; de cette conscience, le béhavioriste peut faire abstraction, mais elle n'en continue pas moins del'éclairer et de donner un sens à des termes qui, sans elle, ne seraient que des sons.Le psychologue doit donc étudier les faits de conscience; mais ne peut-il pas les connaître sans avoir à se fier àcette introspection si suspecte d'erreur ? Au lieu de faire du comportement l'objet même de la psychologie, prenons-le comme le signe nous permettant de remonter au fait psychique qu'il nous est si difficile d'atteindre immédiatementdans sa vérité naturelle.

En particulier, interrogeons les autres, ou, mieux, écoutons-les : nous chercherons en vainune meilleure voie de pénétration dans la forêt vierge de la vie intérieure.

Tout en évitant les contradictions dubéhaviorisme, le psychologue emploiera ainsi une méthode objective lui permettant d'aboutir à une véritable sciencedes faits psychiques.Mais les partisans d'une méthode purement objective s'illusionnent eux aussi quand ils prétendent se passer desdonnées de la conscience.

Nous ne comprenons un signe que grâce à la connaissance directe de la chose à laquellenous le rapportons.

Certains psychologues ou plutôt phénoménologues modernes prétendent, il est vrai, que c'esten eux-mêmes et non pas seulement en nous que nous atteignons les états d'âme dont les autres sont le sujet;mais cette intuition ne s'explique que par la formation, dès que nous entrons en rapport avec quelqu'un, d'un « nous» dans lequel, plus ou moins, fusionnent nos âmes.

C'est toujours en nous que nous connaissons la vie psychique.La psychologie ne peut pas sortir de la subjectivité qui caractérise la nature de son objet propre et par là-même nepeut pas prétendre parvenir jamais à la certitude et n la précision des sciences de la nature. CONCLUSION. — Conclurons-nous donc que la psychologie, étant donné son objet, n'est pas une science ? La réponse dépendra du sens donné au mot science; les débats autour de cette question ne sont guère, en définitive,que des batailles de mots.Il est de nos jours des penseurs pour qui il n'y a de vraie science que celle qui, se donnant à elle-même son objet,possède des propriétés de cet objet une connaissance rigoureusement exacte, comme le créateur connaît sonoeuvre, et, par simple raisonnement, en déduit celles dont l'évidence n'est pas immédiate.

Pour eux, lesmathématiques sont seules, à l'heure actuelle, à mériter le nom de science.

La physique, la chimie et à plus forteraison la biologie ne sont qu'un ensemble de connaissances, d'une exactitude de plus en plus approchée, serapportant au monde; ce ne sont pas des sciences.A cette attaque, les physiciens répondent avec raison qu'on ne peut pas procéder dans l'étude du monde concretdonné effectivement à nos sens comme dans celle des constructions mentales élaborées par les mathématiciens.Dans ce domaine, il faut prendre l'objet tel qu'il est, tâtonner pour découvrir ses propriétés, se contenter demesures approximatives.

L'imperfection des résultats des sciences de la nature est imputable, non pas au savant ouà sa méthode, mais à l'objet de ses recherches.

Aussi la physique et la chimie, comme les mathématiques, sont-ellesde véritables sciences.Nous pouvons faire la même réponse au physicien qui estimerait que la psychologie ne pourra jamais être unescience.

Certes, on ne peut pas espérer établir dans le domaine de la vie intérieure des lois aussi certaines et aussiprécises que celles de la physique : l'objet de la psychologie ne comporte pas de déterminations aussi rigoureuses.Mais quand on sait les illusions auxquelles expose une trop grande foi aux prétendues données de la conscience et lacomplexité extrême de la vie psychique, on multiplie observations et contrôles, on se défend d'énoncer des lois tropprécises, se contentant d'indications générales, ou prévoyant une multiplicité de cas.

On s'achemine ainsi peu à peuvers une connaissance de la vie intérieure aussi parfaite qu'elle peut l'être en ce domaine.

Si nous refusions de voiren elle une science, nous devrions aussi refuser ce titre à la physique et à la chimie.. »

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