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La science et l'irrationnel.

Publié le 09/11/2009

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Il est bien connu que la Science est un grignotement permanent de l'inconnu, du mystérieux, du magique et du hasard.

1 — Au niveau de la formation de l'esprit scientifique, la Science se constitue contre les images et la pensée magique. Nous avons vu cet aspect à propos de l'idée en citant  G. Bachelard. La survivance de la pensée magique dans la science est un sujet d'étonnement. On conçoit qu'à l'époque d'Aristote, des médecins aient été des astrologues et des alchimistes, on conçoit encore cette situation au Moyen Age, on trouve plus étonnant qu'Ambroise Paré le grand chirurgien du XVIe siècle ait attendu des conjonctions astrales favorables pour les grandes opérations. En 1672, on pouvait lire dans un livre « nouveau « : « Il y a des gens qui soutiennent que le chat est venimeux et que son venin est au poil et à la tête, mais je ne le crois qu'à la tête... Trois gouttes de sang d'un chat mâle, tiré d'une petite veine qui est sous la queue, sont bonnes contre le mal caduc... et les hémorroïdes «. Un siècle plus tard, entre 1770 et 1780, un physicien très sérieux, déclare : « Le fluide astronomique d'un astre prend la forme ovale... Toute génération se fait par voie de l'oeuf, c'est-à-dire par un ovale «, et un médecin dans un traité « à jour des dernières découvertes « écrit : « Si l'on supprimait la transpiration pendant les premiers temps de la vie chez les jeunes enfants, les couloirs de l'urine s'agrandiraient et les humeurs y établiraient pour toujours un cours plus abondant... « (Textes cités par Bachelard, « La formation de l'esprit scientifique «). Entre 1860 et 1880, des biologistes comme Pouchet (contre Pasteur) soutiennent la vérité de la génération spontanée. Si la pensée scientifique depuis le début du XXe siècle nous paraît plus vraie, c'est uniquement par manque de recul. Elle paraîtra comiquement puérile et magique aux savants du XXIe siècle.

« curieuse.

Outre qu'il faudrait encore expliquer pourquoi les séries causales se rencontrent (cette rencontre se faitpar hasard), il faudrait aussi considérer les cas où des hasards de ce genre deviennent causes historiques.

Exemple: L'erreur de Grouchy à Waterloo le 18 juin 1815, ou plus simplement les conséquences que peuvent avoir unaccident ou une rencontre. c) Le hasard n'est pas un échec à l'invariabilité des lois naturelles, il est l'importance que prennent, pour un homme,des phénomènes en eux-mêmes parfaitement réguliers, dit Bergson.

« Une énorme tuile, arrachée par le vent, tombeet assomme un passant ; nous disons que c'est un hasard ».

Si la tuile était tombée sur le sol 'en l'absence de toutepossibilité pour quelqu'un d'être là, nous dirions que c'est un effet régulier des lois de la nature.

« Il n'y a de hasardque parce qu'un intérêt humain est en jeu, parce que les choses se sont passées comme si l'homme avait été prisen considération ».

(Bergson, Les deux sources). Le hasard serait donc une intention prêtée au mécanisme, et, à ce titre, fait partie des survivances de la mentalitéprimitive chez le civilisé. Objection: Le hasard n'est pas seulement une intention humaine attribuée au mécanisme ; c'est aussi l'objet ducalcul des probabilités.

C'est surtout la petite chance, l'improbabilité d'un phénomène qui se produit cependant. On peut dire que la science actuelle admet le hasard puisque la notion de probabilité a remplacé celle de nécessitéphysique. B — Le calcul des probabilités.

Le calcul des probabilités tient compte du hasard mais ne résout pas le problème du hasard. a) Le calcul des probabilités détermine et délimite le champ d'émergence du hasard.

Il n'en précise ni le moment ni lanature.

L'exemple classique est le jeu de hasard (le mot hasard vient d'ailleurs du nom de El Azar, ville où deschevaliers au Moyen âge inventèrent un jeu de dés).

Chaque face d'un dé a une chance sur 6 de paraître à chaquecoup, et le numéro 222.222 a une chance sur 1.000.000 de sortir à la loterie nationale.

Si l'on effectue le tirage unefois par mois, ce numéro doit sortir comme tous les autres, une fois en 80.000 ans environ.

En fait, il peut gagner legros lot le mois prochain (mais personne ne le prend jamais). b) Il y a deux calculs de probabilité qui se superposent : le calcul mathématique par cas et le calcul mathématiquepour l'ensemble.

Au nom du calcul des probabilités, le rouge, à la roulette, a strictement autant de chances de sortirune 25e fois quand il est déjà sorti24 fois de suite.

Cependant ses chances diminuent puisqu'il est impossible qu'il sorte toujours.

Intervient ici unsecond calcul qui porte non pas sur chaque cas isolément mais sur l'ensemble des coups. Le hasard semble se jouer de ces calculs, car il consiste essentiellement à apparaître sur un des deux tableauxquand on l'attend sur l'autre.

De même, les phénomènes très peu probables se produisent : « Le calcul desprobabilités a échoué dans sa tentative d'explication du monde et en particulier de la vie...

D'après les combinaisonsmécaniques et mathématiques des corps, la cellule vivante avait pour exister, une chance sur un nombre dechances contraires exprimé par un chiffre suivi de 70 zéros.

Drôle de manière d'évoluer vers le système le plusprobable ».

(G.

Mercier, « Le dynamisme ascensionnel », 1949).

Nous avons parlé ci-dessus, de l'hypothèse « del'anti-hasard ». C — Hasard et expérience.

On peut considérer que le hasard échappe par définition aux mathématiques pures, car il est du domaine concret, il est de l'existence.

De ce point de vue, des philosophes ont soutenu que les sciencesretiennent seulement des données ce qui sert à l'induction et à l'établissement de la loi ; la schématisationscientifique omet l'aspect existentiel et tout ce qu'il y a dans l'être d'action imprévisible et impossible à déduire. Par une dialectique source de son progrès, la science sollicite sans cesse le hasard en sollicitant l'expérience ets'efforce sans cesse aussi d'éliminer ce hasard et de déduire sur le plan mathématique pur où elle retrouve la seulenécessité. 3 — Rémanence du besoin d'irrationnel chez l'homme rationnel.

On pourra toujours dire qu'il subsiste en nous de la pensée magique ou de la pensée infantile. On peut aussi constater que l'anxiété est une réactivation puissante de la pensée magique avec tendance à desconduites conjuratoires (talisman, souci d'agir selon une règle rigide où tout manquement paraît signe d'un destincontraire). Mais il faut constater aussi d'une part « un besoin de croire » (les « sciences occultes » ont toujours beaucoupd'adeptes et les sectes religieuses ou para-religieuses se multiplient), d'autre part une permanence de l'irrationnel,du contingent, du hasard, des coïncidences étranges, et finalement une présence de l'absurde dans notre existence(Kierkegaard, J.-P.

Sartre, Ionesco, etc.), ou tout au moins de quelque chose qui échappe à la Raison et sollicite laFoi (Gabriel Marcel). Conclusion.

Le rationnel scientifique dépasse largement ce que le sens commun appelle rationnel.

A certains égards, les Sciences modernes nous fournissent plus d'irrationnel que la Nature.. »

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