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L'art est-il la reproduction du visible ?

Publié le 04/01/2014

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L'art est-il la reproduction du visible ? «Le monde du peintre est un monde visible, rien que visible» dit Merleau-Ponty dans son ouvrage L'Oeil et l'Esprit. Il relaie ici une conception primitive et intemporelle des Beaux-Arts, celle qui fait de l'artiste un observateur du visible et qui puise dans celui-ci son inspiration. Le visible est ce qui se présente à notre vision, ce qui est d'emblée perçu et tout ce qui peut être perçu. Traditionnellement, l'artiste est reconnu comme tel par sa capacité à reproduire ce visible de la manière la plus parfaite. Reproduire, c'est copier, faire un double. Or, il s'agit de se demander si il est réellement possible de faire un double et donc d'accéder à la vérité de ce monde de cette manière. Se demander si l'art est la reproduction du visible amène à s'interroger sur le criterium de l'art, sur son essence en tant que telle. Nous nous demanderons donc comment l'art s'y prend pour reproduire avec véracité le visible et si c'est vraiment dans ce dernier que se trouve la vérité de notre monde. Indéniablement, le but premier de l'art est de rendre compte de la réalité visuelle, le plus souvent celle de la nature. Il s'agira de se demander si le but de l'art est de ressembler à la nature, et, auquel cas, si ce but peut être rempli par l'art. En effet, il ne s'agit que d'une illusion, l'art ne peut atteindre la ressemblance parfaite car son support reste matériel et l'artiste subjectif. Au-delà du réel représenté, c'est la subjectivité de l'artiste qui est mis en avant dans une oeuvre, l'art n'est pas une reproduction stricte du visible mais une transposition. L'art ne se définirait donc pas comme la reproduction du visible et s'assignerait par conséquent à être la manifestation de quelque chose de supérieur que l'on peut appeler l'Esprit ou l'invisible. I - L'illusion comme finalité de l'art Tout d'abord, la vision est miroir ou concentration de l''univers et la peinture, l'art, cherche à reproduire cet effet. Selon les théories de l'Antiquité, l'art est le reproduction du visible. Le but de l'art est de rendre compte au mieux de la réalité visuelle, le but est de faire vrai. Telle est le cas de la conception de la mimesis développée par Aristote dans La Poétique, puis reprise par Platon dans La République qui dit que l'art en tant que mimesis est la reproduction de toute chose et agit comme un miroir. Une théorie que des peintres de l'Antiquité ont appliqué comme le peintre Zeuxis d'Héraclés qui a peint, selon Pline l'Ancien dans son Histoire Naturelle, des raisins tellement ressemblants que des oiseaux ont essayé de les becqueter. Un autre exemple peut aussi permettre d'illustrer cette thèse : le mythe de Pigmalion. Rapporté par Ovide dans Les Métamorphoses, ce mythe raconte l'histoire d'un jeune sculpteur qui tombe amoureux d'une statue d'ivoire qu'il a réalisé et la nomme Galatée. Le but de l'art serait ici formel, il doit reproduire du mieux possible les apparences du visible. A cette époque, l'essence de l'oeuvre d'art est déterminée comme mimesis. Le but est de rendre compte de l'oeuvre de Dieu par nos propres moyens. Le fait que cette conception ait été la règle de l'art jusqu'au XXe si&egrav...

« la ressemblance : ce qui me fait découvrir un peu le monde extérieur.» Cependant il convient d'interroger ce qu'il entend par la découverte du monde extérieur, car la vision suffirait à le découvrir, la peinture n'apporterait rien de plus en reproduisant le visible.

II – L'art comme interprétation du visible A première vue, le critère de ressemblance est attendu dans certains genres en peinture.

La tradition du portrait a imposé à l’artiste une exigence de ressemblance.

Toutefois certains portraits sont idéalisés, d’autres sont caricaturés, d’autres encore tentent de traduire le caractère au delà de la ressemblance physique.

Les derniers autoportraits de Rembrandt ne cherchent pas à reproduire fidèlement son apparence : la matérialité de l’œuvre montre au niveau du visage une «boue de miel», qui vise à traduire la déliquescence ressenti par l’artiste.

La peinture figurative, qui a pour référent des objets réels que l’on peut reconnaître, ne s’est pas assignée pour tâche d’être pur illusionnisme, pure reproduction, ce qui placerait l’artiste au rang d’un bon artisan ou un bon technicien.

Si l’imitation était réellement le but ultime de la peinture, la peinture aurait été balayée par l’apparition de la photographie au 19e siècle.

Mais la photographie, à son tour, entre les mains des artistes, parvient à développer cette cohérence d’une vision personnelle et originale au delà d’une simple reproduction du visible, pour devenir interprétation, transposition.

L'art est donc moins la reproduction du visible que la manifestation d'une interprétation subjective de ce même visible.

C'est pourquoi l'histoire de l'art est marquée par des ruptures dans la représentation du visible, celui-ci ne peut être reproduit stricto sensu.

Les artistes ont donc adopté différentes manière de reproduire le visible.

La peinture utilise des artifices pour interpréter le réel.

Dans un paysage, on ne peut pas copier la lumière, on ne peut que la restituer par des procédés de couleur.

Concernant le rendu de l‘espace, la toile n’a que deux dimensions, et les artistes simulent la profondeur, la troisième dimension, par l’artifice de la perspective, par exemple.

Ces artifices finissent par être des conventions codifiées que les artistes contestèrent à la fin du 19e siècle, qui a vu naître la remise en question de la représentation traditionnelle de l’espace avec l’apport de l’impressionnisme et de Cézanne.

Les avant-gardes du début du 20e siècle, expressionnisme, fauvisme, cubisme, futurisme, constructivisme font éclater les codes picturaux; dada et le surréalisme, plus contestataires, explorent l’inconscient; l’art abstrait rompt avec la figuration au tout début des années 1910 : «L’imitation, si elle n’était pas un but en soi, paraissait indispensable: en récuser la nécessité constituait une rupture majeure, spectaculaire, accomplie tout d’abord par des peintres» affirme Denys Riout dans Qu’est-ce que l’art moderne ? Le rejet des couleurs référentielles apparaît avec le Fauvisme, à partir de 1905, qui rompt radicalement avec les conventions figuratives : les couleurs éclatantes et totalement infidèles à la nature, la facture heurtée, l’agencement simplifié de l’espace, la présence affirmée de la touche éloignent l’image de son aspect réaliste.

«L’exactitude n’est pas la vérité.» (Matisse) «Quand je mets un vert, ça ne veut pas dire de l’herbe, quand je mets un bleu, ça ne veut pas dire du ciel» (Matisse).

L'art n'est pas la reproduction du visible selon eux, une reproduction stricte ne permettrait pas d'atteindre la réalité concrète de ce visible, la reproduction n'est pas le vrai.

Le Cubisme porte aussi un coup à cette tradition en multipliant les points de vue sur le sujet, comme si, sur la surface de la toile, le regard se démultipliait.

L’effet de morcellement qui en résulte rend l’image plus difficilement lisible pour un spectateur habitué à la perspective albertienne qui adopte un point de vue unique.

«Ce qui différencie le cubisme de l’ancienne peinture, c’est qu’il n’est pas un art d’imitation mais un art de conception qui tend à s’élever jusqu’à la création» . (Apollinaire.) Giacometti ne cherche pas à imiter le modèle, mais à retrouver l’impression que fait celui-ci sur son regard.

Il veut peindre ou sculpter très exactement ce que voit son œil, la ressemblance n’étant que la conséquence de cette opération.

Ainsi donc, l'art ne peut être la reproduction du visible à strictement parler car le visible, l'objectif de la forme dépend de la subjectivité du regard sur ce visible.

L'opposition du fond et de la forme tient à l'opposition générale du subjectif et de l'objectif.

Telle est la conception de l'art selon Hegel dans son Esthétique.

Selon. »

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