Devoir de Philosophie

Le bonheur peut-il se partager ?

Publié le 27/02/2008

Extrait du document

En première instance, on sourit face à un truisme d'une telle envergure: comment déformer ce que chacun éprouve comme une évidence en le questionnant précisément? Bien sûr que le bonheur se partage! Pourtant, après réflexion, les contours de cette certitude s'estompent. Les images défilent, celles des couples à l'écart des autres dont les membres se sourient l'un à l'autre béatement, celle d'amis rigolant entre eux, avec leur propre code, délaissant les autres, celles d'élèves sautant de joie devant l'affiche de résultat, insensibles aux pleurs de ceux qui n'ont pas réussi...

« ne parvient au bonheur.

Même en se fixant seul ses propres impératifs, même en suivant son chemin et en enroulantson destin autours de son égo sans considération pour l'autre, on obtient un nuage de fumée, sitôt entrevu, sitôtdissipé.

Si le bonheur pouvait être assimilé à la promotion de l'égocentrisme, on constate de facto que même cette voie sans partage n'aboutit aucunement.

Ce qu'à en tête Pascal, c'est que nous nous méprenons sur le véritablebien, et ceci a pour conséquence la construction perpétuel de château en Espagne.

D'où le tableau funeste qu'ildécrit: « Et ainsi, le présent ne nous satisfaisant jamais, l'expérience nous pipe, et de malheur en malheur nous conduit jusqu'à la mort qui en est le comble éternel ». La mort est donc l'éternel horizon d'un pathétique terrain de jeu où l'homme crie son impuissance.

Mais Pascal nejoue jamais le triste sort pour le triste sort.

Il voit dans cet espérance même du bonheur qui persiste chez l'homme,malgré ses multiples avènements avortés, la « marque et la trace toute vide » d'un véritable bonheur qui fut un jour présent au cœur même de la nature humaine.

Comprenons ici qu'il s'agit d'une référence religieuse, celle d'Adamjadis baignant en pleine béatitude.

Si Adam est lé référant fantasmatique d'un bonheur intégral et parfait, il jettecependant simultanément sur la condition humaine l'impossibilité d'y parvenir aisément.

En effet, qu'a fait Adam? Il atenté, en se nourrissant du fruit de l'arbre de la connaissance du bien et du mal, de prendre la place de Dieu.

Cepéché se remarque encore chez l'homme d'aujourd'hui: être fini il prétend à un pouvoir infini.

En effet, cetteinsatisfaction qu'éprouve l'homme sans cesse et qui l'empêche d'atteindre réellement le bonheur, c'est un « gouffre infini qui ne peut être rempli que par un objet infini et immuable ».

Ce gouffre infini, c'est en vérité la place de Dieu dans le cœur de l'homme: « Lui seul est son véritable bien.

Et depuis qu'il l'a quitté, c'est une chose étrange qu'il n'y a rien dans la nature qui n'ait été capable de lui en tenir place: astres, ciel, terre, éléments, plantes, choux,poireaux, guerre, famine, vices, adultères, inceste ».

C'est tout le sens de ce que Pascal appelle le divertissement, soit cette façon que l'homme a de s'agiter pour tenter de combler ce vide infini par de vaines occupations: mais ni lachasse, ni la science, ne pourront boucher cette béance absolue.

Aussi le regard pascalien se porte-t-il vers Dieu,seul être dont chacun porte en soi la trace qu'il révèle chaque fois que son tir particulier échoue. Kant: autonomie et bonheur partagé 2. Avec Pascal, nous avons vu l'homme s'agiter désespérément, pour combler ce vide infini creuser par le retrait deDieu en son cœur.

L'homme en arrive à ce paradoxe qui consiste à chercher le repos (donc le bonheur) dans lemouvement (divertissement): le chasseur chasse non pour le lièvre mais pour la chasse; il s'occupe pour ne pointpenser, et même ne point penser qu'il est misérable.

Chacun s'affaire, chacun ne pense qu'à soi sans réellement ypenser (sous peine de sombrer dans l'angoisse que génèrerait sa condition de mortel impuissant), et se persuaded'arriver au bonheur sans jamais y parvenir.

Dès à présent, nous constatons un double échec: l'homme ne parvientpas au bonheur, et, se fixant des moyens différents pour y arriver, il ne partage rien ou en vain.

Si chacuns'accordait sur le bien commun, le partage serait peut-être possible, un partage sans perdant, « le vrai bien [étant]tel que tous pussent le posséder à la fois sans diminution et sans envie ».

Avec Pascal, il s'agit de s'acheminer vers un au-delà du monde, s'acheminer vers Dieu, bien que selon lui, ce soit Dieu qui en dernièreinstance choisit de donner ou non la grâce à chacun.

On e choisit pas d'avoir la foi en somme, Dieu nous l'accorde.Ne pouvons-nous donc pas croire à une possibilité moins élective d'un bonheur qui exclut de son champ ceux qui nesont précisément pas graciés? Pascal pense en effet un royaume d'où sont bannis ceux qui ne reçoivent pas lagrâce: il troque tous les ensembles contre un seul dans lequel on ne rentre qu'à partir d'une décision qui n'est pasnôtre (mais celle de Dieu). Peut-être s'agit-il de se pencher sur un patrimoine partagé pour ainsi dire par l'humanité entière afin d'imaginer lapossibilité d'un ensemble assez large pour ne pas exclure.

Pour Kant, ce tronc commun à toute l'humanité, et cequelque soit son origine, son éducation, ce qui la caractérise en propre, c'est cette faculté qu'est la raison.

Aussi,l'auteur choisit-il de considérer comme humain celui qui fait oeuvre de cette faculté qui distingue l'homme des autresespèces.

L'homme ne naît pas homme comme le chien peut naître chien: il doit cultiver cette faculté originelle,l'exercer, la mettre en oeuvre pour prétendre devenir proprement homme.

Mais qu'est ce qu'au juste que cettefaculté qu'est la raison? Elle nous entraîne à être habitant de deux univers.

Nous sommes d'une part des êtressensibles, nous vivons pour ainsi dire dans la matérialité, dans les phénomènes, soit notre vision de la réalité àtravers l'espace et le temps (tout ce que nous voyons, nous le voyons à travers ces formes apriori de la sensibilité que sont l'espace et le temps).

Mais cette raison est en nous un appel, un appel au dépassement de cetteexistence-là: elle nous entraîne à penser la réalité telle qu'elle est en soi , en dehors de l'espace et du temps, en dehors de ce que nous en voyons.

Et cette faculté qui nous conjure de sortir de l'espace sensible, matériel, peutnous rendre ainsi libre des chaînes de cedit sensible, soit tout ce qui me détermine, me conditionne.

Ainsi puis-jedevenir libre, n'être déterminé que par moi-même ( autonomie ) en m'extrayant de la matérialité déterminatrice.

Ma volonté ne suivra alors que le devoir comme respect pure de la loi morale, cette dernière ne donnant pas un contenuà la volonté, une recette de ce qu'elle doit faire, mais une forme générale d'action.

Par exemple: « agis uniquement d'après la maxime qui fait que tu peux vouloir en même temps qu'elle devienne une loi universelle ». Il s'agit à présent d'établir deux points essentiels.

Tout d'abord, il s'agit du lien entre bonheur et bien moral chezKant.

Si le bonheur n'est pas la fin même de l'action morale, si on n'agit pas moralement pour être heureux (puisquel'action morale est entièrement déterminée par la raison, et non par des considérations que Kant nommepathologique, c'est-à-dire des considérations sensibles), il n'empêche que le bonheur peut être la conséquence del'action morale: en d'autres termes, sans être visé il peut advenir.

Et tout à la fois, puisque l'homme ne se réalisepleinement en tant que humain, et trouve par conséquent son véritable bonheur qu'au travers de l'action morale enutilisant précisément sa raison.

Le bien moral, parce qu'il est absolu ( ab-solo, qui se suffit à soi-même) est le seul à. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles