Le Romantisme musical
Publié le 26/02/2010
Extrait du document
"Le romantisme n'est pas une question d'étrangeté ou de recherche de formes surprenantes. Sa qualité essentielle, c'est qu'il permet au musicien d'être aussi un poète." (Lettre de Robert Schumann à Clara Wieck.) L'histoire de la Musique occidentale exceptions faites pour les apports divinateurs d'un Monteverdi, d'un Palestrina, d'un Schütz ou d'un Jean-Sébastien Bach n'enregistre pas de moment qui, plus et mieux que la période romantique, ait fait plonger à nouveau les expressions de notre art au plus profond du secret de ses origines. Née, et sans doute avant la parole, des manifestations physiologiques du cri, des larmes ou du rire, la modulation des sonorités devait retrouver à cette époque et sous cette rubrique, après des siècles de patientes interrogations techniques, comme un écho de ces accents élémentaires qui, primitivement, et dans l'ignorance de toute condition esthétique, ne tendaient qu'à confesser une douleur ou une joie, qu'à avouer par le truchement des mélopées embryonnaires un "moi" irrépressible et frémissant. L'art musical remontait ainsi instinctivement à sa source sinon dans son moyen, devenu peu à peu tributaire de tous les particularismes de la civilisation du moins dans sa signification essentielle.
«
s'ingéniant à élargir le champ des manifestations musicales dans l'ample domaine des interprétations suggestives,utilisant les timbres des instruments à la manière incantatoire des alchimistes, faisant surgir des fulgurances dupiano ou des remous de l'orchestre toute une gamme d'effets jusqu'alors insoupçonnés ; détenant au seuil d'unhorizon sonore riche de mystérieux inconnus la commande secrète des multiples ressources d'ordre imaginatifsusceptibles d'en peupler de visions saisissantes les lointains non encore explorés.
Il en sera de même sur le plandialectique ; leurs notations faisant appel à toute une syntaxe entrecoupée d'interjections frémissantes, de silencesinattendus, lourds de mystères ou d'inquiétude et dont les rythmes vont s'enfiévrer au contact de correspondancesdescriptives dont le relief sonore se modèlera étroitement à l'argumentation idéologique qui leur sert de prétexte.
Une sorte d'impressionnisme avant la lettre s'y fait jour, sous le couvert d'une conception visionnaire ou sensorielle àlaquelle la virtuosité des exécutants se voit conviée à devenir l'auxiliaire d'une poétique musicale inédite.
La musique dite "à programme" et qu'il paraîtrait plus juste de qualifier de musique "à sujets" faisait avec ces deuxmaîtres son apparition à l'orée d'un siècle qui devait par la suite si libéralement et si fructueusement sacrifier à leurexemple.
Figuration d'actions plutôt que représentation d'états d'âme, a-t-on pu dire de la tendance à laquelle on se réfère.Appréciations dont l'apparente exactitude vaudrait d'être discutée, car on ne voit pas que l'accent decommunication subjective fasse défaut à la Fantastique non plus qu'à la Sonate en si mineur ou à la Faust-Symphonie.
Et l'appoint physionomique particulier avec lequel l'art musical prenait ici un premier contact si plein deconséquences pour son avenir que notre temps n'en a point encore épuisé les fécondes ressources, ne paraît pas, àsa naissance tout au moins, s'être témoigné à l'encontre de ses plus hautes ambitions.
Sur un tout autre plan imaginatif, et plus particulièrement requis par l'expression des sentiments affectifs, parl'intimité persuasive des épanchements confidentiels, l'art d'un Schubert, d'un Schumann ou d'un Chopin se traduiraà la faveur d'un moyen musical, sinon moins éloquent et on serait assez prêt à insinuer le contraire mais detendances novatrices extérieures moins délibérément affirmées.
On le verra se complaire, dans une surprenante succession de chefs-d'Oeuvre, à interroger les secrets de lasensibilité de préférence aux aventureuses initiatives de l'esprit.
Ce n'est pas tant son vocabulaire sonore qui se voitenrichi ou renouvelé par l'apport d'éléments inédits que la nature même des effusions dont il se fait le dispensateur.
Parfaitement novateur dans ses modalités d'expression, il ne s'insurge pas cependant de parti pris contre desexigences de forme auxquelles de glorieux exemples ont depuis longtemps accordé la signification d'une sorted'absolu esthétique.
Ce que Chopin doit à Mozart, Mendelssohn ou Schumann à J.-S.
Bach et Schubert à Haydn, mieux qu'une influencepermettrait d'envisager comme une sorte de filiation.
Mais, puisant dans les impulsions du cOeur, dans les manifestations idéalisées des regrets, des souvenirs ou desespoirs, les motifs d'une inspiration dont les arguments devenaient les points de départ d'une nouvelle dialectiquemusicale, celle-ci va s'affirmer pour notre émerveillement en un indéfinissable compromis entre le convenu etl'insoupçonné, entre le traditionnel et l'instinctif.
Lors même que la dénomination Sonate, Quatuor ou Symphonie sevoit retenue pour désigner bon nombre d'Oeuvres de la période romantique, et spécialement des maîtres dont il estici question, et que les errements spécifiques du genre s'y trouvent employés par eux sous le couvert de procédésorganiques aussi parfaitement orthodoxes que ceux des deux thèmes générateurs et des développements qui ensont la conséquence logique, on ne tarde pas cependant à s'apercevoir qu'ils ne s'y font jour qu'en tantqu'arguments d'un conflit idéologique implicite et non d'un principe constructif rigoureusement déterminé.
La manièrede dire n'est, apparemment, qu'à peine modifiée.
Seul diffère ce qui est dit, ou plus exactement, suggéré.
Le psychique, ici, va prendre le premier rang au nombre des éléments auxquels la musique emprunte son miraculeuxpouvoir d'irradiation et la contagion émotive devenir le principe d'une nouvelle conception esthétique, basée sur laconfrontation des sentiments bien plutôt que sur le contraste matériel des sujets mélodiques.
Telles paraissent être, identifiées par une sommaire référence à leurs deux aspects les plus caractéristiques, lesparticularités physionomiques essentielles des apports du romantisme à l'art musical.
Il va de soi que d'autres musiciens que ceux que l'on vient de nommer auront également contribué à l'avènementd'une formule assez riche de devenir et assez assurée de la diversité de ses moyens pour que des temps proches dunôtre lui reconnaissent encore d'authentiques représentants, tels Brahms, César Franck, Scriabine ou RichardStrauss, et ceci en dépit des divergences de technique ou d'expressions qui assignent à leurs Oeuvres les plusindiscutables garanties d'originalité.
Et ni les magnifiques échappées lyriques de Weber sur un horizon de fictionspathétiques ou légendaires, ni le génial concept de représentation musicale symbolique introduit par Richard Wagnerdans la création d'un nouveau style dramatique, ne peuvent être omis au nombre des éléments vitaux dont laréunion devait attester, dès son apparition, l'exceptionnelle plasticité de la tendance romantique et la variété desressources imaginatives dont elle se voyait conviée à enrichir le patrimoine musical.
De même en ce qui concerne Mendelssohn, dont la séduisante personnalité se témoigne cependant un peu en margede celle de ses émules contemporains ; retenue, semble-t-il, dans ses réalisations de goût néoclassique par un.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Le Romantisme musical par Alfred Cortot " Le romantisme n'est pas une question d'étrangeté ou de recherche de formes surprenantes.
- romantisme (musique) 1 PRÉSENTATION romantisme (musique), mouvement musical européen en vogue de la fin du XVIIIe siècle au début du XXe siècle.
- Expliquez le passage suivant du Voyage en Amérique de Chateaubriand ( 1791, publié en 1827) el relevez dans celle description d'une nuit passée dans la forêt vierge les traits caractéristiques nouveaux et qui annoncent le romantisme
- Romantisme: Adam Mickiewicz
- Le romantisme