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Les « Pensées » de Blaise Pascal (analyse)

Publié le 01/04/2011

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Les Provinciales ne sont, dans l'histoire de Pascal, qu'un accident : l'œuvre de sa vie devait être l'Apologie de la religion. Il y travailla à partir de 1658, mais, la maladie lui interdisant déjà toute étude suivie, il ne put que jeter sur le papier quelques-unes de ses pensées, suivant les hasards de la méditation. Ces fragments forment le recueil des Pensées, publiées pour la première fois en 1670 par Port-Royal qui, pour des raisons de prudence, crut pouvoir y pratiquer un certain nombre d'atténuations et de suppressions.

Ce qui devait faire l'intérêt et la nouveauté de cette défense de la religion, c'en était le plan. Le célèbre argument du pari suffirait à montrer la hardiesse du raisonnement de Pascal. C'est spécialement aux libertins, mais d'une façon générale aux indifférents de toute sorte, que s'adresse Pascal : il veut les contraindre à avouer, non pas encore que Dieu est, mais qu'il le faut chercher, qu'il faut prendre parti et parier pour ou contre. « Pesons le gain et la perte en prenant croix que Dieu est. Estimons ces deux cas : si vous gagnez, vous gagnez tout ; si vous perdez, vous ne perdez rien. Gagez donc qu'il est, sans hésiter «.

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« mais c'est un roseau pensant.

» Ce contraste, voilà pour Pascal l'énigme.

« Quelle chimère est-ce donc que l'homme, quelle nouveauté, quelmonstre, quel sujet de contradiction, quel prodige ! Juge de toutes choses, imbécile ver de terre, dépositaire duvrai, cloaque d'incertitude et d'erreur, gloire et rebut de l'univers...

» Aucun système de philosophie ne résoutl'énigme, car chacun n'a aperçu qu'un côté de notre nature, et tous se détruisent : « La nature confond lespyrrhoniens, et la raison confond les dogmatiques.

» Seule, la religion peut tout expliquer, grâce au dogme de lachute.

« Si l'homme n'avait jamais été corrompu, il jouirait dans son innocence et de la vérité et de la félicité avecassurance.

Et, si l'homme n'avait jamais été que corrompu, il n'aurait aucune idée ni de la vérité ni de la béatitude.

»Misère et grandeur peuvent ainsi se trouver réunies, « Ce sont misères d'un grand seigneur, misères d'un roidépossédé.

» C'est donc à la religion qu'il faut nous adresser : « Ecoutez Dieu ! » D'ailleurs, la religion même n'apportera pas le repos à l'âme de Pascal.

Ceux-là peuvent se reposer chez qui lacroyance est l'acquiescement produit par l'évidence.

Mais le Dieu de Pascal est le Dieu caché qui ne se révèle qu'àquelques-uns et qu'en partie : la croyance est, pour une part, œuvre de volonté et d'amour.

« C'est le cœur quisent Dieu, et non la raison.

Voilà ce que c'est que la foi : Dieu sensible au cœur, non à la raison.

» Et c'est detoutes les forces de son être, de toutes les ardeurs de sa nature que Pascal va tendre vers Dieu.

Cette foi estprofonde- : « Tu ne me chercherais pas, si tu ne m'avais déjà trouvé.

» Elle n'est pas sereine : « Je ne puisapprouver que ceux qui cherchent en gémissant.

» Les Pensées nous montrent, non pas un nouveau Pascal, mais Pascal tout entier avec tous les traits qui lecaractérisent.

— La passion, la violence du génie : c'est de front que Pascal choque son adversaire, heurtant sespréjugés, ses craintes, ses scrupules, dans une âpre discussion qui ne lui laisse ni intervalle pour se reprendre, nidétour pour s'échapper.

— L'amertume de l'ironie : en passant par la bouche de Pascal, les arguments et les phrasesde Montaigne y prennent un autre accent.

Montaigne se joue de nos faiblesses et s'en amuse : Pascal en souffrepour nous, — Le tour dramatique de l'esprit : les Pensées sont un drame, une lutte avec le doute, et la forme dudialogue vient comme d'elle-même sous la plume de Pascal.

— La puissance évocatrice de l'imagination : c'est par làque Pascal (Mystère de Jésus) se fait le témoin de l'agonie de Jésus, au point d'y assister, d'entendre la paroledivine à lui personnellement adressée : « Je pensais à toi dans mon agonie ; j'ai versé telle goutte de sang pour toi.» C'est encore par là qu'ayant la vision matérielle de la petitesse et de l'isolement de l'homme, il en vient à pousserce cri d'effroi : a Le silence éternel de ces espaces infinis m'effraie ! » La rhétorique de Pascal Plusieurs des Pensées de Pascal se rapportent à la manière d'écrire.

Elles sont conformes à la plus pure doctrineclassique.

En tête des éditions actuelles des Pensées se trouve la fondamentale Différence entre l'esprit degéométrie et l'esprit de finesse, « En l'un, les principes sont palpables, mais éloignés de l'usage commun...

Il faudraitavoir tout à fait l'esprit faux pour mal raisonner sur des principes si gros qu'il est presque impossible qu'ilséchappent.

» C'est la méthode des mathématiques, qui opère dans l'abstrait et consiste à déduire de définitions,posées une fois pour toutes, tout ce qui y est contenu, la méthode cartésienne.

« Mais dans l'esprit de finesse, lesprincipes sont dans l'usage commun et devant les yeux de tout le monde...

Il n'est question que d'avoir bonne vue,mais il faut l'avoir bonne, car les principes sont si déliés et en si grand nombre qu'il est presque impossible qu'il n'enéchappe.

» Et c'est ici la méthode de la connaissance concrète, intuitive, qui procède par l'observation et l'analyseet par laquelle les écrivains du XVIIe siècle étudieront le cœur humain et le train du monde.

De ces deux méthodes ilfaut savoir, suivant les cas et sous peine de graves erreurs, employer l'une ou l'autre.

C'est ce qu'on pourraitappeler la « logique » de Pascal.

Quant à sa « rhétorique » elle consiste tout entière dans la poursuite du naturel et du vrai.

Pascal proscrit tout cequi est artifice : « la vraie éloquence se moque de l'éloquence » ; les ornements inutiles ; les antithèses, qui ne sontque pour la symétrie comme de fausses fenêtres ; les élégances, qui sont des impropriétés : « masquer la nature etla déguiser.

Plus de roi, plus de pape, d'évêques, mais auguste monarque, etc.

; plus de Paris, capitale du royaume.Il y a des lieux où il faut appeler Paris, Paris, et d'autres où il le faut appeler la capitale du royaume ».

Et voicil'impression dernière qui doit ressortir d'une œuvre littéraire : « Quand on voit le style naturel, on est tout étonné,car on s'attendait de voir un auteur, et on trouve un homme.

» L'écrivain. Pascal a refait treize fois la dix-huitième Provinciale et chargé de ratures les fragments des Pensées : on voitmaintenant en quel sens était dirigé ce travail.

Mettant au-dessus de tout cette qualité, le naturel, Pascal emploieratoujours le mot propre, fût-ce le mot populaire et dût s'en effaroucher le goût des délicats.

« Les misères qui noustouchent, qui nous tiennent à la gorge...

Si on y songe trop, on s'entête, et on s'en coiffe...

On leur donne descharges et des affaires qui les font tracasser dès la pointe du jour...

Ceux qui croient que le bien de l'homme est enla chair, et le mal en ce qui le détourne des plaisirs des sens, qu'ils s'en soûlent et qu'ils y meurent...

Je vois doncdes foisons de religions.

» Que si la construction grammaticale ne reproduit pas l'ordre et le mouvement des idées,Pascal la sacrifie.

« Le nez de Cléopâtre, s'il eût été plus court, toute la face du monde était changée.

» « Le plusgrand philosophe du monde, sur une planche plus large qu'il ne faut, s'il y a au-dessous un précipice, quoique laraison le convainque de sa sûreté, son imagination prévaudra.

». »

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