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LES PROGRES DE L'INCRÉDULITÉ - LE JANSÉNISME - L'EXPULSION DES JÉSUITES AU XVIIIe siècle

Publié le 28/06/2011

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Un nouveau Bossuet, un nouveau Fénelon ne venaient pas; un nouveau Pascal ne venait pas. Le P. Gerdil, qui fut cardinal, réfutait Locke, mais que pouvait-il contre sa diffusion? Que pouvait Crousaz contre Pope ? John Leland défendait l'Ancien et le Nouveau Testament, la Révélation : il n'effaçait pas le sourire de Hume. C'étaient de bons champions, quand il eût fallu des génies. Souvent, malgré leurs intentions, ils restaient lourds et ennuyeux, les polémistes; leurs longues préfaces, leurs dissertations pédantes, leurs phrases massives, n'atteignaient pas le public; ils raisonnaient comme leurs grands-pères; le présent ne les écoutait plus. Ou bien en quête de nouveauté, ils n'attrapaient que le ridicule. L'abbé Pellegrin pensa-t-il avoir réussi, quand il mit sur des airs à la mode les vérités chrétiennes ? Explication de l'oraison dominicale, sur l'air de Joconde : Seigneur, vous avez bien voulu me donner une femme.

« libéré, et presque sans reprendre haleine, il recommençait.

Ses publications, les Lettres de la Comtesse, les Lettressur quelques écrits de ce temps, étaient suspendues : peu lui importait, il se mettait à rédiger l' Année littéraire, etbon gré mal gré la traînait jusqu'à sa mort.

Il n'était pas le premier venu; il maniait bien la plume, était sensible aumérite littéraire, avait du goût; il aimait les nouveautés; il voyait les maux de la société et demandait des réformes;ami des plaisirs de la vie, généreux, dépensier même, sa personnalité sortait du banal.

Dès qu'il voyait un philosopheil se mettait en colère.

Le nom d'aucun d'entre eux ne manque dans ses pages : de Voltaire lui-même il n'avait paspeur.

« Je reparaissais sur l'arène, avec l'ardeur d'un athlète dont quelques blessures que des lâches lui ont faitesen trahison raniment le courage au lieu de l'abattre.

» Il savait ce qui l'attendait, mots féroces, épigrammestenaces, mauvais tours, vengeances; mais à provoquer ces représailles il prenait du plaisir.

Il avait une mission àremplir; les philosophes n'avaient pas l'air de voir qu'aux consolations du Christianisme, ils substituaient le trouble,l'amertume et le désespoir : lui, Fréron, dénoncerait leur erreur.

Il leur montrerait qu'ils étaient fous, s'ils pensaientqu'une nation qui secoue un joug sacré continuera à supporter un joug humain.

Il défendrait ce que la tradition a desalutaire.

« Jamais siècle n'a été plus fertile que le nôtre en écrivains séditieux qui, à l'exemple du poète Linière,n'ont d'esprit que contre Dieu.

Ils se disent les apôtres de l'humanité, et ils ne voient pas que c'est être mauvaiscitoyen, que c'est faire un mal réel aux hommes, que de leur ôter des espérances qui seules adoucissent les mauxde cette vie; que c'est bouleverser l'ordre des sociétés, irriter le pauvre contre le riche et le faible contre lepuissant, armer des millions de bras qui sont arrêtés par un frein sacré autant que par les lois...

Ce méprisableacharnement contre la religion marque d'ailleurs plus de faiblesse que de force de l'esprit.

On ne parlerait, onn'écrirait pas contre elle, si on ne la redoutait intérieurement.

Les prosateurs, les poètes qui en font l'objet de leurssatires, ressemblent à ces voyageurs tremblants qui ont peur des voleurs et qui chantent de toutes leurs forcespour cacher leurs craintes.

»Ceux qui formaient l'armée des anti-philosophes pensaient qu'on avait imprudemment porté l'incendie dans la vieillemaison, sous prétexte d'y donner la lumière. Si nous voulions reprendre une imagination qui fut alors à la mode, et décrire une bataille de livres, toutes pagestourbillonnant dans les airs, tous formats s'entre-choquant, nous aurions beau jeu, car ce fut à peine une figure.Jamais autant d'ouvrages ne furent publiés contre la religion, jamais autant d'ouvrages ne furent publiés pour elle.On en aurait fait, disaient les contemporains, des bibliothèques entières; dans les journaux du temps, en quelquepays d'Europe qu'ils parussent, une seule catégorie fut plus largement représentée que celle des traités agressifs :celle des traités qui défendaient le Christianisme.Les Anciens que les autres invoquaient en faveur du matérialisme, les apologistes les réfutaient.

Et comme lesautres appelaient à leur secours tous les libertins du monde : de même, les apologistes invoquaient les illustresdéfenseurs de la foi ;ils ranimaient la grande voix de Bossuet pour rappeler les âmes vers le Seigneur.

On attaquait la Bible ? Dom Calmetpassait sa vie à la défendre.

On disait que le Pentateuque n'était pas de Moïse ? Il est bien vrai, répondait Astruc lemédecin, que le livre semble révéler des sources différentes; qu'on y trouve une tradition d'après laquelle Dieu estnommé Eloïm, une autre d'après laquelle il est nommé Jéovah; et d'autres encore, si l'on veut; mais les difficultésdisparaissent, si on admet que Moïse a travaillé sur plusieurs mémoires qui ont pour ainsi dire convergé vers lui.

Undes arguments favoris des contradicteurs consistait à prétendre que les valeurs spirituelles que l'on reconnaissaitdans la tradition juive venaient de l'influence d'autres religions orientales ; on montrerait donc, à rebours, que lesgrandes fables, les cultes et les mystères du paganisme, ne sont que des copies altérées des histoires, des usages,et des traditions des Hébreux.

Des critiques infirmaient l'histoire du premier établissement de l'Église, de toute latradition ecclésiastique : alors on sortait l'Histoire ecclésiastique de l'abbé Fleury, dont Alfieri racontait qu'il avait lules trente-six volumes, dans sa jeunesse; et chez les Luthériens paraissaient les Institutionum Historiaeecclesiasticae antiquioris et recentioris Libri IV (1726), œuvre magistrale de J.

L.

von Mosheim, l'adversaire deToland.

Dans les collections d'ou-vrages hérétiques les philosophes puisaient leurs négations : donc on publieraitd'autres collections, d'autres choix où les croyants trouveraient à fortifier leurs certitudes et, par exemple, l'ouvragede Johann Albert Fabricius, Delectus argumentorum et Syllabus Scriptorwn qui veritatem religionis christianae...asseruerunt (1725).

L'hérésie prenait la voie des Universités pour se répandre : discours universitaires, dissertations,thèses, ramèneraient les étudiants à l'orthodoxie.Aucun pas ne fut fait sans provoquer une démarche contraire.

Sus aux sociniens, guerre aux déistes, exterminonsles athées.

Le mal profond vient de Locke : réfutons ce philosophe par la philosophie.

On ne parle que dedémonstrations géométriques : démontrons géométriquement la vérité de la religion chrétienne.

Périodiques contrepériodiques, lettres contre lettres, dictionnaires contre dictionnaires, vers contre vers.

Le Philosophe achrétien ; LaReligion vengée... L'apologétique travailla d'abord à renforcer ses propres positions, à faire un examen attentif des argumentstraditionnels, et pour ainsi dire à se rassurer elle-même; elle relut les Pères de l'Église et les grands théologiens dupassé; elle rassembla ses puissances intérieures.

Pour couper la racine du mal, écrit à Montesquieu l'évêque deSoissons, Mgr de Fitz-James, le 29 septembre 1750, « il faudrait songer sérieusement à ranimer les études dethéologie, qui sont entièrement tombées, et tâcher de former des ministres de la religion qui la connaissent et soienten état de la défendre.

La religion chrétienne est si belle que je ne crois pas qu'on puisse la connaître sans l'aimer;ceux qui blasphèment contre elle, c'est qu'ils l'ignorent.Si nous pouvions faire revivre des Bossuet, des Pascal, des Nicole, des Fénelon, la seule considération de leursdoctrines et de leurs personnes ferait plus de bien que mille censures.

»Elle parla donc le langage de la scolastique à ceux qui l'entendaient encore : mais elle sut en parler un autre à ceux. »

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