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Les vagues de la mer - Inconscient - Leibniz

Publié le 19/03/2015

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Les vagues de la mer

Pour juger encore mieux des petites perceptions que nous ne saurions distinguer dans la foule, j'ai coutume de me servir de l'exemple du mugissement ou du bruit de la mer dont on est frappé quand on est au rivage. Pour entendre ce bruit comme l'on fait, il faut bien qu'on entende les parties qui composent ce tout, c'est-à-dire les bruits de chaque vague, quoique chacun de ces petits bruits ne se fasse connaître que dans l'assemblage confus de tous les autres ensemble, c'est-à-dire dans ce mugissement même, et ne se remarquerait pas si cette vague qui le fait était seule. Car il faut qu'on en soit affecté un peu par le mouvement de cette vague et qu'on ait quelque perception de chacun de ces bruits, quelque petits qu'ils soient ; autrement on n'aurait pas celle de cent mille vagues, puisque cent mille riens ne sauraient faire quelque chose.

Leibniz, Nouveaux Essais

sur l'entendement humain, Préface.

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« Les vagues de la mer 99 Ce violon qui s'envola soudain au-dessus de l'orchestre y a fait retour aussitôt, et s'y est déjà enfoui, laissant le souvenir mélo­ dieux de son arabesque.

Les yeux parcourent le flot multiple, tendu à l'horizon comme une ligne droite.

Limite.

Va et vient entre l'unité du ciel, doucement marbrée de nuages, et celle de la mer, indéfi­ niment recomposée.

Une multitude fondue se déploie dans la tension des sens.

Qu'une vague se lève et creuse son mouve­ ment, comme un sillon où la mer se prend à frémir.

L'atten­ tion renaît alors, qui suit le sillage à la trace, et lui associe l'onde sonore d'une rumeur distincte.

Percevoir, c'est éprouver pour elle-même la présence des choses et des êtres.

De l'imperceptible frisson à la perception confuse, et de celle-ci à la conscience nette, un éveil s'accom­ plit.

Le tout indistinct qui en était comme le sommeil et l'attente se détache en quelque sorte de lui-même, par l'un des mille événements qui le composent.

Cette vague enroulée, un peu plus forte qu'une autre peut-être, sort de la rumeur et se fait présente.

Cet oiseau blanc confondu avec l'écume en émerge soudain, et le regard suit son envol.

Des petites perceptions innombrables se forme l'impression présente et vive, moment composé comme un tout et riche des multiples événements qu'il absorbe.

Ce tout est irréductible à la somme des parties, si l'on veut dire ainsi qu'aucun dénom­ brement complet ne peut en restituer l'impression unique.

Mais si « cent mille riens ne sauraient faire quelque chose », un presque rien, au regard de l'univers, en esquisse l' étince­ lante réalité.

Soleil levant: la peinture impressionniste de Monet a rappelé la force et l'évidence d'une telle intuition.

Mille touches de soleil sur la toile, distillées dans mille petites vagues, disent la splendeur unique de l'aurore sur la mer.

Et l'émotion surgit de ce paysage débordant, de cette symphonie totale où toute per­ ception finie se transcende.

Ce moment de rêve est sans mesure commune avec l'impression furtive et infime que le reflet d'un instant a inscrit dans un frisson d'eau et de lumière.

C'est la conscience qui se lève alors, par-delà les sen­ sations secrètes où elle était encore comme en sommeil, tendue déjà vers le spectacle des choses.. »

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