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L'esthétique peut-elle être une science ?

Publié le 12/03/2004

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Pour Burke, nous ignorons nous-mêmes pourquoi la beauté nous cause du plaisir ou de la joie, et pourquoi un homme peut désirer «violemment une femme de faible beauté« (Recherche philosophique sur l'origine de nos idées du sublime et du beau). Le beau: Un sentiment individuel et universel

■ Que le beau doive être jugé, c'est l'exigence de la subjectivité ; qu'il soit universel, celle de l'objectivité. Un jugement qui soit tout à la fois l'expression la plus intime de l'individu, et la plus commune de l'universalité humaine, doit reposer sur la distinction du plaisir esthétique, lié à la beauté, et du plaisir des sens, lié à l'agréable.

■ En ce qui concerne l'agréable en effet, le principe « à chacun son goût « fait loi : tu aimes tel vin que je n'aime pas, ce n'est pas la peine d'essayer de me convaincre. Ce qui est beau, au contraire, doit enlever l'unanimité d'un sentiment pourtant profondément personnel.

■ Un homme qui juge mal d'une oeuvre d'art est un homme qui juge moins de sa beauté que de ses agréments. Parce qu'il se laisse dominer par l'intérêt sensuel, tout à fait personnel, qu'il porte à l'objet représenté par un tableau, son jugement de goût n'est pas pur. C'est la raison pour laquelle l'universalité du jugement de goût est moins un fait qu'un idéal à atteindre. Le beau se suffit à lui-même On ne voit pas comment on pourrait constituer une science à partir de ce qui n'a aucune utilité et n'exige aucun effort de connaissance. Si l'esthétique recense les diverses théories de l'art et du beau, lesquelles varient avec le temps, le beau pour le beau n'a que faire d'être l'objet d'une science.

« Kant montre que le jugement de goût est fondamentalement subjectif , car il s'appuie sur un sentiment de plaisir (le beau) ou de déplaisir (le laid).

Dire d'une chose qu'elle est belle, c'est avant tout dire qu'ellenous plaît.

Certes, il s'agit d'une satisfaction désintéressée : ce n'est pas l'objet qui plaît, mais la contemplation de sa représentation , — de sorte que l'existence réelle de l'objet est ici indifférente.

Le jugementde goût se distingue en cela du jugement d'agrément (l'agréable ), où l'existence physique des objets est indispensable (l'apparence ne suffitpas). Pas de critère objectif du beau Toujours particulier et relatif à une sensibilité , le jugement esthétique n'est donc pas universel : ce n'est pas un jugement de connaissance.En effet, seul le concept permet d'universaliser un jugement (c'est le cas dans le jugement scientifique) 1.

Or, sans critère conceptuel de la beauté pouvant guider le jugement de goût (sans une connaissance ouune définition du beau), on ne peut pas indiquer de règle d'aprèslaquelle quelqu'un pourrait être obligé de reconnaître la beauté d'unechose.

On ne peut pas démontrer la beauté, et nul n'est tenu de trouver beau ce qui plaît à ses voisins, ni laid ce qui leur déplaît, ni d'admirer ce qu'il ne comprend pas.

Le goût prétend à l'universel (j'ai le sentiment que tout le monde devraittrouver beau, en droit, ce que je juge être tel), tout en restant subjectif (je n'ai aucun moyen d'obtenir, enfait, l'accord de tous car il n'y a pas de concept ou de règle pour en juger). Un subjectivisme sans relativisme ? Or, en dépit de son radical subjectivisme , Kant entend échapper au relativisme .

Il va tenter de penser à fois la subjectivité et l'universalité du jugement esthétique.

Certes, le jugement de goût exprime le plaisir subjectifde chacun (« ça me plaît »), mais sa prétention à l'universalité ou à l'unanimité (« c'est beau ») est, selonKant, légitime.

Elle a deux fondements.

1) Une certitude intérieure : le sentiment que nous avons du caractère désintéressé de notre appréciation esthétique en garantit l'universalité (elle n'a rien de personnel).2) Une hypothèse : il existe un sens commun esthétique, une sensibilité commune car présente a priori en chaque homme, bref une identité de goût qui permet l'accord des jugements esthétiques. Débat et enjeu Kant a-t-il raison ? Le jugement esthétique prétend certes à l'universalité, mais l'argumentation de Kant pour légitimer cetteprétention ne convainc pas.

1) Bien autre chose que l'intérêt peut compromettre l'universalité du jugement degoût : les sensibilités individuelles sont largement conditionnées par leur culture d'appartenance.

2) L'argument d'un sens commun esthétique tient d'une hypothèse ad hoc (forgée pour l'occasion), qu'une enquête empirique sur les différences de sensibilité entre les hommes récuse facilement.

Bref, Kant nousconvainc de la subjectivité du jugement esthétique, mais semble échouer à en réfuter la relativité.

Au fond, laprétention à l'universalité de nos évaluations esthétiques s'explique par le mouvement spontané — c'est-à-dire inévitable — d' objectivation de nos jugements : nous faisons de la beauté un attribut objectif de la chose, une valeur en soi.

Il revient à la philosophie de nous rappeler la forme illusoirement objective et universelle de l'appréciation esthétique, qui demeure essentiellement une réaction affective à un objet . [L'esthétique, bien qu'étant une connaissance sensible, a un lien avec la logique.

Loin d'être opposée à cette dernière,elle introduit le sentiment dans la réflexion.

Elle rend toute vérité intellectuelle moins abstraite.] L'esthétique est une connaissance immédiateIl est faux de croire que tout ce qui a trait à l'art échappe à la science parce que le plaisir seul seraitconcerné.

En esthétique, les goûts et les couleurs sont sujets à la discussion.

Pour Baumgarten, l'esthétiqueest liée à la philosophie: comme elle, elle aspire à une vérité qu'elle «ressent», même confusément, et prépare. »

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