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L'homme est-il naturellement religieux ?

Publié le 18/08/2012

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Chose plus aberrante encore : il a fallu attendre 2005 pour que l'on ose réaliser un documentaire sur l'homosexualité animale ; documentaire déconcertant pour beaucoup étant donné que jusqu'à présent l'homme semblait unique sujet à cette pratique sexuelle longuement considérée comme perverse et contre nature. Mais ce documentaire est déconcertant également parce qu'il révèle que même si les mâles ne peuvent se reproduire entre eux, tout comme les femelles, leurs désirs sont d'une même nature que les désirs hétérosexuels ; et cette bissexualité de l'animal, à défaut de ne pouvoir assurer une parfaite reproduction, constitue des rôles bien précis dans le développement des espèces… Il n'y a donc aucune raison de considérer l'être humain – qui est également un animal doué d'instincts et de désirs – comme exclusivement hétérosexuel. Si les tabous de la religion n'avaient pas annihilé la tolérance des diversités sexuelles, l'homophobie ambiante de la société actuelle n'aurait pas lieu d'être puisque tout le monde depuis toujours aurait admis le fait que la diversité sexuelle est tout aussi naturelle chez l'homme que chez l'animal. En prenant appui sur cet exemple nous pouvons affirmer que la religion parait ici illégitime puisqu'elle provoque une méconnaissance nocive du comportement humain à travers des règles de vie censées corriger le désordre de la société. Dans ce cas là, elle n'a fait qu'imposer qu'un  ordre présumé « naturel« éloigné de la réalité, et donc de la vérité absolue dont elle est le « récipient «.

« de protection que cela lui inspirent parait si naturel et si agréable… Serait-ce concevable de croire en l'existence d'un Homme qui échapperait à toute forme dereligiosité ? En dépit de ces constats observés précédemment, il existe bel et bien des hommes sujets à l'athéisme (affirmant « croire » en l'inexistence de Dieu) et à l'agnosticisme(dénue de croyance car le caractère insaisissable de la religiosité le rend sceptique).

Il serait cependant trop hâtif d'affirmer qu'en dépit de ses besoins naturels il existedes hommes dont le comportement est parfaitement areligieux.

En effet selon Eliade, les athées auront beau se vanter d'être libéré de croyances illusoires, leur vie seratout de même sujette à « des mythologies camouflées et à des ritualismes dégradés ».

Actuellement bien que de nombreux pays développés se disent bien plusdétachés de la religion qu'au siècle dernier, ils continuent à se laisser enivrer par ces regroupements, motivés par un besoin de ressentir cette sensation unique qui nese manifeste que lorsqu'ils sont « unis ».

Unis par des émotions qu'ils se créent de toute pièce, avec une grande attention ; que ce soient les mariage civils, lesenterrements, les anniversaires, etc ; même si aucune religion ne stimule tout ceci, cette attention portée autour de ces évènements qui régissent notre existence aattrait à une certaine religiosité, d'un degré certes moins fort que le culte stalinien ou le culte de la race aryenne que nous avons vu à la fin de la partie précédente.L'athéisme n'est que partiellement dépourvue de l'énergie religieuse ; et parce que tout homme est fondamentalement enclin à une certaine religiosité, nous nepouvons pas nous libérer de l'attitude qui a été inculqué par nos ancêtres depuis la nuit des temps.

Au fond, l'Homme ne peut croire qu'en lui-même.

Comme lerésume Marx, l'homme a fait la religion, et non l'inverse.

Ainsi, qu'il s'agisse d'une croyance ancestrale qui a endoctriné énormément d'hommes, d'un culte de lapersonnalité qui, comme le culte de Staline, utilise une énergie typiquement religieuse (la sacralisation d'un « Père » bienfaiteur), ou bien de simples traditionsculturelles, l'Homme ne fait que croire : il croit en « une nature humaine » qui rassemble tous ses pairs… Une nature humaine qui, plus précisément, définit lessimilitudes entre les hommes afin d'éviter les conflits et de fuir toute solitude.

Une nature humaine qui, pleinement définie et comprise selon un consensus, permet detrouver le courage de combattre les aléas de la vie.Une vie sans croyance est insupportable : l'homme voit en face la vacuité de son existence, sa contingence, son immense faiblesse… il s'agit là de la « misèrehumaine », misère que Pascal illustre métaphoriquement par la maigreur du roseau qui, bien que pensant (et donc infiniment « puissant » puisqu'il est bien la seulecréature à penser), succombe facilement face à l'immensité de l'univers.

Et en effet l'homme ne peut se permettre de cesser de croire ; dans la mesure où un être estnaturellement animé par l'envie d'atteindre toute forme de joie, assumer sa misère lui est insupportable.

Cette torture est très bien mise en évidence dans les Pensées :effectuant une autodestruction de la raison, Pascal prouve à ses lecteurs que sans la religion (et donc sans toute religiosité) l'homme est abandonné à lui-même,incapable de toute connaissance.

La raison ne suffit donc pas ; c'est ce qu'admet Socrate lui-même : « Tout ce que je sais, c'est que je ne sais rien ».

Incapable desavoir, l'Homme doit donc croire.

Car la connaissance qu'il a du monde n'est que la surface des choses qui l'entourent.

Pour appréhender le monde et la vie, l'Hommene peut se contenter de la science.

En effet, la science ne lui dit pas comment vivre, comment être heureux, comment ne pas se laisser détériorer par ses vices ; cetteconnaissance matérielle ne lui permet donc pas de trouver un quelconque apaisement car rien de stable ne régirait son existence.

Il est impossible de concevoirl'Homme s'il n'est pas religieux puisque l'homme tend toujours vers une sorte de religiosité, vers quelque chose d'extérieur, de matériel, dont il porte en lui comme undouble en creux.

Si cet objet répond à sa réalité personnelle, si elle fait échos à son aspiration à dépasser ce que lui offre sa raison, il n'en est pas moins une« illusion ».

Une illusion partagée par tous les êtres humains, même inconsciemment.

L'Homme est donc sujet à une religiosité inconsciente.

Ici « inconscient » peutavoir deux sens : le sens d'irréfléchie (voir même de somnolant) chez ces pratiquants qui, participant machinalement à chaque manifestation religieuse extérieure,trouvent en les valeurs revendiquées par la religion une consolation, un doux triomphe à des maux indestructibles ; et enfin le sens d'involontaire chez tous les« areligieux » qui même à travers une culture laïque retrouvent les mêmes aspirations vers cette « illusion » commune.Il est intéressant de remarquer que l'Homme qui se croit exempt de toute influence religieuse regarde le monde tout comme le fait, par exemple, la religion chrétienne.Le constat pessimiste que Pascal fait de l'existence humaine (purement misérable) dans ses « Pensées » est admissible indépendamment de la visée apologétique deses écrits – visant à pousser ses lecteurs à la conversion catholique.

Le nihilisme implicite habite d'autres nombreux grands esprits tel que Schopenhauer qui, donnantcomme seule alternative pour supporter la condition humaine le fait d'annihiler notre volonté de vivre.

Nous reconnaissons là l'ascétisme, l'idée d'abstinence prônéepar plus d'une religion actuelle.

Concernant les écrits même de la Bible, l'humain s'y dépeint comme sujet à une pathologie générale issue du pêcher originel : touthomme de génération en génération se transmettent ces pêchers atrocement nocifs, incapables de retrouver la sainteté et la justice originelle qu'ils ont perdus au jardind'Eden.

Richard Yates, auteur américain du XXème siècle, dresse un portrait pessimiste semblable de l'existence humaine.

Décrivant ses contemporains qui, noyésdans un quotidien structuré par des règles absurdes - provenant de partout sauf de leur volonté – et pourtant admises par tous, il les déclare clairement contaminés parune maladie.

N'étant pas à la mesure de l'idéal américain qu'ils continuent à poursuivre obstinément, tout comme l'homme n'est pas en mesure de retourner au jardind'Eden, les contemporains dépeints dans « Fenêtre panoramique » paraissent perdus, infiniment seuls et misérables, ne pensant plus, ne sentant plus, ne s'occupantplus de rien.

En dehors de leur « propre petite médiocrité confortable », ces êtres dépeints au vif par la plume de cet auteur américain est véritablement proche de lavision que se font les catholiques de « l'homme pêcheur » qui, soumis au pêcher, n'accèdent pas à la joie.

Si Yates ne donne comme autre conseil implicite que de fuircette société malade, la religion donne pourtant des antidotes à cette pathologie générale.

Des règles de conduites (tels que les dix commandements, la notion depêcher, etc.) sont fixées comme des balises afin de guider l'homme vers le véritable but de la vie humaine - qui est l'union avec Dieu.

Ainsi l'homme qui estnaturellement penché à des vices (puisque, comme nous l'avons vu précédemment, il se fixe une fin matérielle qui est le plaisir – or le vice et le plaisir ne sont pasincompatibles, ils sont irréversiblement liés lorsqu'il ne subit aucune forme d'annihilation) trouve en la religion un moyen de freiner son basculement vers ladégradation de son être.

Mais un autre enjeu se révèle ici : penser la religion comme fondamentalement naturelle et indispensable à une existence humaine décentesignifie-t-il qu'il nous faut la considérer comme entièrement légitime ? Kant affirme que la religion est la connaissance de tous les devoirs de la condition humaine, inculqués et compris comme commandements divins.

Or Freud nommela religion comme une illusion : une illusion peut-être elle la source d'une connaissance aussi fondamentale ? Ces devoirs religieux ne paraissent-ils pas, tout commel'impératif catégorique de Kant, contraires aux tendances naturelles de l'homme et donc par nature grandement illusoires et inaccessibles ? Amour du prochain,abstinence, « lâcher prise » sur l'existence en ne se préoccupant plus du lendemain… Tout ce que transmet Dieu parait être un moyen d'atteindre un état d'ataraxie.La religion, par sa nature illusoire, ne serait donc qu'un système de croyance à un idéal dont Jésus Christ est l'accomplissement matériel et totalementanthropomorphe.

Il est la preuve que cet idéal est accessible pour un être humain et que la soumission infinie à la volonté de Dieu donne pour récompense des fruitsbien plus appréciables que ce dont jouissaient Adam et Eve dans le jardin d'Eden.

A bien considérer cette religion monothéiste, base fondamentale de notre cultureoccidentale, elle parait comme un « amas d'illusions magnifiées » qui ensemble dépeignent un modèle humain idéal purement irréaliste.

Cependant si l'existence d'unhomme ne pourra jamais se calquer sur cet idéal, la connaissance de cet idéal tend l'homme vers une amélioration de son état.

Une religion entant qu'illusion réfléchieet compréhensive permettant à l'homme d'être plus naturel et plus intègre à lui-même est parfaitement légitime.

Or la propagation de la religion a eu desconséquences bien moins louables.La différence entre les dogmes (où se solidifie la « religion statique ») et la foi (qui concrétise la « religion dynamique ») est censée en pas creuser de creux entre cesdeux concepts ; or au nom de ces dogmes furent observés maintes intolérances religieuses condamnant tout être ayant délibérément pêché.

Dévoués à Dieu au pointde tuer pour lui, de nombreux religieux prirent à coeur le message divin du « Seigneur » au point d'agir selon un maxime redoutable : « qui n'est pas pour dieu estcontre dieu ».

Or, le propos même écrit dans la bible est que Dieu aime les pêcheurs et non le pêcher.

Et parmi les dix commandements est stipulé : « tu ne tueraspoint ton prochain ».

Et pourtant cela ne freina pas la conscience des membres de l'Eglise pour commettre des injustices meurtrières.

Nous observons donc que lareligion a été utilisée à d'autres fins que celles auxquelles elles étaient destinées.

Nous observons donc que cette religion (dans sa dimension « statique » ici) quiparaissait bienfaitrice par le fait même qu'elle assouvissait nombre de maux de l'être humain a été maintes fois prétexte à assouvir l'agressivité d'hommes nesupportant pas la différence d'autrui.

La religion a donc été défigurée à de nombreuses reprises par un paradoxe aberrant : de nombreux conflits religieux ont éclatésau nom d'une divinité nommée « Dieu d'amour ».

Côtoyant longuement et de près le système politique d'un pays, la religion catholique semble avoir profité de sonprestige transcendantal afin d'élargir sa puissance.

A travers ces fâcheux évènements, la religion apparaît parfaitement illégitimes.

Mais est-il judicieux de croirequ'en fonction des circonstances politiques et culturelles l'homme peut être naturellement tendu vers cette dimension violente de la religion ?. »

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