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Malebranche: bonheur et sagesse

Publié le 30/09/2013

Extrait du document

malebranche

« Les hommes ne sont pas nés pour devenir astronomes, ou chimistes ; pour passer toute leur vie pendus à une lunette, ou attachés à un fourneau ; et pour tirer ensuite des conséquences assez inutiles de leurs observations laborieuses. Je veux qu'un astronome ait découvert le premier des terres, des mers, et des montagnes dans la lune ; qu'il se soit aperçu le premier des taches qui tournent sur le soleil, et qu'il en ait exactement calculé les mouvements. Je veux qu'un chimiste ait enfin trouvé le secret de fixer le mercure ( ... ) : en sont-ils pour cela devenus plus sages et plus heureux ? Ils se sont peut-être fait quelque réputation dans le monde ; mais s'ils y ont pris garde, cette réputation n'a fait qu'étendre leur servitude. Les hommes peuvent regarder l'astronomie, la chimie, et presque toutes les autres sciences comme des divertissements d'un honnête homme2 ; mais ils ne doivent pas se laisser surprendre par leur éclat, ni les préférer à la science de l'homme. «

1. Je veux : je veux bien, je consens, j'admets.

2. Un honnête homme : un homme accompli.

Questions

1. Dégagez clairement la thèse du texte. Précisez l'argumentation de l'auteur.

2. Expliquez:« s'ils y ont pris garde, cette réputation n'a fait qu'étendre leur servitude «.

3. La recherche de la sagesse et de l'épanouissement peut-elle être

indépendante de la connaissance du monde ?

Enfin, le texte se termine par une expression pouvant prêter à confusion. Quand Malebranche défend la priorité de la « science de l'homme«, il ne se fait évidemment pas l'avocat de l'anthropologie (qui à l'époque n'existait pas), ni de ce que l'on appelle aujourd'hui les « sciences humaines « (sociologie, économie, démographie, ethnologie, ... qui n'existaient pas davantage). Dans le texte, la « science de l'homme« n'est pas celle dont l'homme est l'objet mais celle qui lui est la plus propre : la sagesse, la connaissance du bien et du mal, autrement dit le savoir qui lui permet d'atteindre le bonheur.

malebranche

« D Les clés du sujet PRÉSENTATION DU TEXTE ET ANALYSE DE SES ENJEUX .,.

Du point de vue thématique, ce texte porte sur la sagesse, terme qui ne fait pas explicitement partie des notions du programme mais qui se trouve à l'intersection de beaucoup d'entre elles (nature, vérité, raison).

On peut formuler ainsi la question que pose le texte: quelle est fa nature de l'homme 7 Autrement dit, pour quoi l'homme est-if fait 7 Pour s'ins­ truire ou bien pour acquérir fa sagesse, et par elle le bonheur 7 La com­ préhension des enjeux de cette problématique appelle quelques éclair­ cissements .

.,.

Tout d'abord, en ce qui concerne fa notion de « sagesse ».

Commu­ nément, on distingue depuis f'Antiquité le sage du savant ou de l'érudit.

Le sage n'est pas tant celui qui est instruit, cultivé et qui dispose d'un savoir théorique, que celui qui se distingue par la manière dont il conduit sa vie.

Depuis les Grecs, la sagesse est un art de vivre, une manière d'être qui assure le bonheur.

Réciproquement, le bonheur est l'état de celui qui vit en accord avec sa nature grâce à sa sagesse.

Le sage se connaît assez lui-même pour vivre sans conflit, harmonieusement et sereinement.

Là réside le bonheur selon les Grecs de !'Antiquité .

.,.

Est-ce de cette sagesse que Malebranche (1638-1715) nous entretient dans ce texte? L'« honnête homme » représente, à l'âge classique, la figure d'une sagesse qui s'accompagne d'une bonne connaissance des sciences.

Contrairement aux sages de !'Antiquité qui pouvaient être incultes (songeons au cynique Diogène qui vivait dans son tonneau), le sage « moderne » se soucie de son instruction afin d'être ouvert sur son temps et de pouvoir partager le progrès du savoir, patrimoine de l'humanité.

Depuis la Renaissance en effet, avec l'astronomie de Copernic et la physique de Galilée, les sciences empiriques (portant sur l'expé­ rience) donnent le sentiment d'être entrées dans une phase nouvelle, particulièrement féconde, où la rigueur mathématique se conjugue avec l'exactitude de l'observation.

C'est contre un engouement excessif pour ces sciences empiriques, nouvelles ou en gestation (comme la chimie), que Malebranche réagit ici.

En bon cartésien, la seule science qui trouve grâce à ses yeux est fa mathématique (d'où la réserve : « et presque toutes les autres »).

L'intérêt pour la connaissance de la nature doit trouver sa mesure et ne pas s'octroyer plus de valeur que celle d'un simple divertissement.

L'essentiel doit demeurer la connaissance de soi qui garantit le bonheur, l'accomplissement dè soi.. »

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