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Mieux connaître l'histoire, est-ce mieux exercer sa liberté ?

Publié le 31/01/2004

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HEGEL, La raison dans l'histoire, 10/18-UGE.;Leçons sur la philosophie de l'histoire, Vrin.P. VALÉRY, Regards sur le monde actuel, in Pléiade, NRF, tome Il. Peut-on tirer des leçons de l'histoire ? Introduction S'il est recommandé au nom de ce qu'il est convenu d'appeler le « devoir de mémoire » de « tirer des leçons de l'histoire », la question se pose de définir les sens à donner au mot leçon dans une telle expression et ce afin de déterminer s'il est possible de dégager de réels enseignements de la connaissance du passé. En effet, l'histoire étant le domaine du devenir et du changement, chaque fait historique, chaque événement est unique, il semble donc difficile dans de telles conditions de s'inspirer du passé pour agir dans le présent. Cependant, s'il en est ainsi, quel sens pouvons donner à la connaissance de l'histoire, à la science historique et à son enseignement, s'agit-il d'un simple retour sur le passé n'ayant pour but que la satisfaction d'une curiosité intellectuelle purement gratuite ou s'agit-il malgré tout d'une connaissance nous offrant la possibilité de mieux appréhender un aujourd'hui dont les enjeux nous échappent parfois ? Développement Que faut-il entendre par « leçons de l'histoire » ?« Tirer des leçons de l'histoire », au nom de cette expression il nous est souvent recommandé de dégager des enseignements du passé afin d'éviter de commettre certaines erreurs ou dans le but de nous inspirer d'événements qui furent couronnés de succès.
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« Et il est vrai que l'horreur des exactions commises lors de périodes comme celle de l'inquisition ou durant le régimenazi devrait servir de repoussoir et nous rendre plus sages et plus raisonnables. De même l'exemple de certains héros exemplaires, comme ces résistants qui n'hésitèrent pas durant la secondeguerre mondiale à risquer leur vie au nom de la liberté, devrait inspirer au plus grand nombre courage et goût del'abnégation. Cependant, malgré le caractère moralement louable des intentions présidant à une telle recommandation, la questionse pose, non seulement de savoir si elle est suivie d'effets, mais aussi de savoir si cela est réellement possible et, sice n'est pas toujours le cas, pourquoi il en est ainsi. Car en effet il suffit d'étudier quelque peu l'histoire pour s'apercevoir comme le fait remarquer le philosophe Hegelque « ce qu'enseignent l'expérience et l'histoire, c'est que peuples et gouvernements n'ont jamais rien appris del'histoire, et n'ont jamais agi suivant des maximes qu'on en aurait pu retirer.

»Hegel, Leçons sur la philosophie de l'histoire, Editions Vrin.

(Traduction Gibelin)La question est donc de savoir pourquoi il en va ainsi, pourquoi les erreurs du passé ne nous dissuadent pas d'encommettre de semblables et pourquoi les comportements exemplaires ne nous servent que très rarement demodèles? Pourquoi ne tire-t-on pas de leçons de l'histoire ?Si nous ne parvenons pas à tirer des leçons de l'histoire c'est parce que chaque moment de l'histoire est unique. L'histoire est par définition le domaine du devenir et du changement.

Il semble donc difficile pour ne pas direimpossible qu'au cours de l'histoire des situations identiques ou comparables puissent se produire. Il est certes possible d'établir des similitudes apparentes, mais celles-ci seront et resteront superficielles, car lescauses qui déterminent les faits ainsi que les événements historiques, de même que les conditions dans lesquelles ilsse produisent ne sont jamais identiques, ne serait que parce que le passé déterminant le présent ce qui arriveaujourd'hui est toujours la conséquence des faits dont nous devrions nous inspirer et sur lesquels nous devrionsprendre modèle. Ainsi il serait totalement absurde de vouloir comparer la révolution de 1789 et celle de 1848, comme s'il s'agissait dedeux périodes isolées totalement indépendantes l'une de l'autre, alors que bien au contraire la seconde ne peuts'expliquer et se comprendre que par la première. L'histoire n'est pas une succession de faits sans lien les uns avec les autres, il s'agit plus exactement d'unprocessus au cours duquel les situations s'enchaînent et s'engendrent. C'est pourquoi il n'est donc pas possible de tirer des leçons de l'histoire, au sens où nous pourrions tirer desenseignements du passé pour nous en inspirer afin de réitérer les actes couronnés de succès et d'éviter dereproduire certaines erreurs. Cependant s'il en est ainsi, se pose alors la question de savoir à quoi peut donc bien servir la connaissance dupassé, l'étude et l'enseignement de la science historique ? Pourquoi donc, en effet, s'intéresser aux périodesrévolues si nous n'en tirons aucun enseignement ? Les véritables leçons de l'histoireS'il n'est pas possible de tirer des leçons de l'histoire dans le sens que nous avons évoqué précédemment, cela nesignifie pas pour autant que nous n'apprenons rien de l'histoire, simplement il faut donner au mot leçon un tout autresens, une toute autre acception. Si comme nous l'avons souligné auparavant le présent est toujours la conséquence du passé et si l'histoire ne peutse comprendre que comme un processus, c'est-à-dire un enchaînement logique et rationnelle de faits, il est clair quela connaissance du passé éclaire notre présent.

Ainsi, par exemple, la compréhension des institutions et desstructures de l'État français d'aujourd'hui nécessite une certaine connaissance de la citoyenneté romaine dont elles'inspire, de la constitution progressive d'un État unifié à partir d'une mosaïque de domaines féodaux qui donna lieuensuite à l'unité du royaume sous la monarchie absolue pour ensuite aboutir à l'unité républicaine héritée de larévolution française. Autrement dit, pour comprendre qui nous sommes il nous faut savoir d'où nous venons et l'histoire fonctionne un peusur le plan collectif comme la mémoire pour l'individu, elle est en quelque sorte la mémoire des peuples. De même qu'un individu sans mémoire est un être sans conscience et sans identité, un peuple sans histoire est unpeuple incapable de se projeter vers l'avenir, car dans l'impossibilité de situer dans le temps et de connaître lasignification du mouvement qui l'a amené là où il est. Conclusion. »

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