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Peut-il avoir une justice extérieure au droit ?

Publié le 24/05/2009

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justice
La justice est une notion complexe. Le mot français vient du latin jus, qui veut dire le droit, dans son acceptation générale, le respect du droit. Il y a une ambiguïté même dans l'équivalence des deux termes en latin. La justice dans notre réalité quotidienne et contemporaine désigne donc avant tout une institution qui se confond avec le droit. Le substantif « droit » trouve aussi son origine dans un ensemble géométrique et renvoie à la norme. Le droit désigne ce qui est conforme à une règle. Le droit est alors le légitime. Il s'incarne ainsi dans les lois qui gouvernent notre société et ceux qui font des études de droit étudient en définitive le système juridique et les lois. Il existe en effet un lien indissoluble entre le droit et la loi. Alain définit ainsi dans Les arts et les Dieux le droit : « le droit est un système de contrainte générale et réciproque, fondé sur la coutume et sur le jugement des arbitres, et qui a pour fin d'accorder l'idéal de justice avec les nécessités de la situation humaine. » La question ici est bien de savoir si la justice se confond avec le droit ou si elle en est distinct. Mais cela ne nous renseigne pas sur son contenu. En fait, pour Aristote et pour toute une tradition après lui, ce qui prévaut dans la justice, c'est le principe d'égalité, c'est-à-dire que chacun doit être traité de la même manière. dans la justice, c'est le principe d'égalité, c'est-à-dire que chacun doit être traité de la même manière. Or, dans la citation que nous venons de donner d'Alain, on voit bien que le droit doit se fonder sur un idéal de justice, ce qui revient à considérer que la justice est antérieure à toute loi et à tout droit. Il est vrai que la justice est aussi une idée qui a lien avec la morale. Mais il faudrait alors se demander d'où peut venir cette justice extérieure au droit et aux lois. De plus, nous protestons souvent contre des lois. Comme le dit Diderot dans Supplément au voyage de Bougainville, « nous parlerons contre les lois insensées », comment juger de la légitimité du droit si nous n'avons pas d'idéal de justice extérieure ? Mais si le droit est dissocié de la justice, pourquoi devons-nous lui obéir ? Que devons-nous faire respecter le droit ou la justice ?
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« rappelait Pascal, la justice institutionnelle, le droit sont relatifs, les lois sont changeantes : « Plaisance justicequ'une rivière borne ! Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà.

» Pour lui, l'équité telle qu'elle est pratiquée dansle droit est liée aux mœurs et non pas à un principe universel.

De fait, si la notion de justice est elle-mêmechangeante, cela veut dire qu'elle est liée de manière stricte au droit et aux lois.

II Il existe une idée de justice supérieure au droit 1.

On peut juger une loi injuste, ce qui signifie qu'on peut la juger de l'extérieur Cependant, dire que la justice est aussi relative que le droit peut-être très dangereux.

De l'idée que la justice et ledroit se confondent, on peut tirer la proposition selon laquelle une loi peut ne pas être juste.

Il n'y aurait plus alorsaucun absolu qui sous-tendrait la conduite des lois.

Or, il est bien possible que des lois soient injustes voire mêmecruelles et qu'elles soient reconnues comme tel par les individus.

L'exemple le plus flagrant est bien sûr celui des loisde l'état nazi.

En effet, les lois préconisaient une discrimination envers les juifs et les « anormaux ».

Les lois ontinstitué une opération qui visait à tuer les handicapés et l'extermination massive des juifs.

Le régime institué par lespolitiques de l'époque était un régime répressif et il n'est pas sûr que la seule parole prononcée par les opposantspouvait avoir un véritable pouvoir.

De plus, une loi puisqu'elle se veut générale comme nous l'avons vu dans lapremière partie, ne statue pas sur des situations particulières et ne peut prendre en compte les différences entreces dernières.

Si la loi prescrit qu'il faut rendre un dépôt, est juste dans la plupart des cas, l'est-elle encore lorsquel'on se trouve à un homme qui a manifestement des intentions criminelles et qui réclame l'arme qu'il nous a confiée ?De fait, pouvoir dire qu'une loi issue du droit est injuste, c'est témoigner d'un principe extérieur qui me permette dejuger le droit.

Il faut alors nécessaire reconnaître que le principe de justice soit extérieur au droit.

C'est bien ce quedit Leo Strauss : « Rejeter le droit naturel revient à dire que tout droit est positif, autrement dit que le droit est déterminé exclusivement par les législateurs et les tribunaux des différents pays.

Or il est évident qu'il estparfaitement sensé et parfois même nécessaire de parler de lois ou de décisions injustes.

En passant de telsjugements, nous impliquons qu'il y a un étalon du juste et de l'injuste qui est indépendant du droit positif et lui estsupérieur » 2.

Il existe une idée extérieure de justice Montesquieu s'élève contre le relativisme de Hobbes et refuse l'identification du droit au juste.

Il existe pour lui deslois justes qui préexistent à tout droit humain.

Il écrit en effet dans le premier chapitre De l'esprit des lois qu'il existe des lois de justice comme il existe des lois physiques.

L'homme conçoit en effet sans difficulté les lois qui régissentles phénomènes naturels mais ne veulent pas reconnaître qu'il est possible aussi que des lois de même typerégissent les rapports entre êtres humains.

Il dit que simplement les lois de la nature sont inviolables et que les loisde justice peuvent être transgressées.Nous retrouvons en réalité dans la doctrine de Montesquieu un écho de la thèse de Platon, même si son idée dejustice est différente.

Au livre second de La république , Platon soutient, à travers la légende de l'anneau de Gygès, qui avait le pouvoir, lorsqu'on tournait le chaton en dedans, de rendre son porteur invisible, que peu d'hommesseraient d'un caractère assez fort pour se retenir de commettre des injustices.

De fait, dans la réalité, la justicen'est jamais véritablement aimée pour elle-même mais honorée soit par crainte du châtiment soit pour les avantagesqu'elle procure.

Cela n'empêche pas nous dit Platon que la justice a une valeur en elle-même même si peu d'hommesla voient.Pour trouver l'essence de la justice, Platon nous dit qu'il faut nous tourner vers la Cité où existe une véritablejustice.

La justice pour le philosophe grecque est d'abord l'ordre et l'harmonie.

La cité dont il rêve est donc régie parun principe harmonieux où chaque classe sociale y exécute sa fonction propre.

Cette harmonie reflète l'Idée mêmede justice.

Pour Platon, le monde est divisé en deux réalités : le sensible et l'intelligible.

Le sensible est changeantet sa valeur est quasi nulle, l'intelligible lui se compose d'Idées, c'est-à-dire d'essences éternelles et immuables.

Lajustice fait partie de ces Idées et c'est à partir de cette idée, transcendante( c'est-à-dire séparée de notre mondesensible) que nous devons de la justice. 3.

Difficulté à appliquer l'idée de justice Blaise Pascal dans ses Pensées montrent à quel point la connaissance du Bien naturel, des lois naturelles est difficile, voire impossible pour l'homme.

Il existe bien pour lui une justice universelle, mais l'homme ne peut laconnaître.

Sur quoi se fonde-t-il pour affirmer cela ? Il nous dit que si les hommes pouvaient connaître cette loinaturelle, on ne verrait pas partout cette cohue bigarrée de loi, relative aux mœurs et aux pays.

S'il la connaissait,« l'éclat de la véritable équité aurait assujetti tous les peuples[…], on la verrait plantée par tous les Etats du mondeet dans tous les temps, au lieu qu'on ne voit rien de juste ou d'injuste qui ne change de qualité en changeant declimat.

» Il faut en effet remarquer que, même si les lois scientifiques sont l'œuvre des hommes, elles sont tout demême universelles, ce qui n'est pas du tout le cas pour les lois juridiques.

Il faut alors comprendre que l'idéal dejustice est difficilement compatible avec le droit positif.

De même Platon affirme dans Le politique qu'aucune loi ne sera un jour « capable d'embrasser avec exactitude ce qui, pour tous à la fois est le meilleur et le plus juste et deprescrire à tous ce qui vaut le mieux.

» Kant soutient cette thèse.

Pour lui, le droit est toujours imparfait : « Dansun bois aussi courbe que celui dont est fait l'homme, on ne peut rien tailler de tout à fait droit »( Idée d'une histoire universelle ) Il faut œuvrer pour que le droit vise toujours la justice. »

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