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Peut-on forcer quelqu'un à être libre ?

Publié le 29/08/2004

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Avec Nietzsche nous avons vu que l'on peut en un sens forcer quelqu'un à devenir libre. Mais lorsque l'on a affaire à un sujet constitué, peut-on le forcer à être libre. La possibilité doit être ici interrogée en un sens moral, c'est-à-dire qu'il s'agit de répondre à la question de savoir s'il est légitime de le faire. Or il semble qu'il soit légitime de le faire lorsque l'on a affaire à un sujet qui ne comprend pas le sens de sa propre liberté. Dans Le contrat social, Rousseau considère que la véritable liberté n'est pas la liberté naturelle, mais celle à laquelle on s'élève en entrant dans l'état civil. Cette entrée se fait à la faveur d'un contrat par lequel pour assurer leur sécurité, les hommes se démettent de leur  liberté naturelle au profit de tous, c'est-à-dire au profit de la volonté générale. Or c'est la volonté générale qui ensuite fait les lois, et chaque citoyen participe de cette volonté générale. On voit donc que si l'individu perd sa liberté naturelle de faire tout ce qui lui plaît, il gagne la liberté civile, qui consiste dans le fait de n'obéir qu'à la loi (et non à tel ou tel individu). Or puisqu'il a lui-même contribué à l'établissement de la loi en tant qu'il est membre de la volonté générale, l'individu n'obéit ainsi qu'à lui-même et il est véritablement libre. Rousseau pense que celui qui refuse d'obéir méconnaît sa liberté, et qu'on a donc le droit de « le forcer à être libre «, c'est-à-dire à respecter les lois.

La liberté peut être définie de deux manières 1) négativement comme le fait de ne pas subir de contrainte externe de la part d’un autre qui limiterait notre pouvoir d’action 2) positivement, comme la capacité de se déterminer soi-même à prendre un parti plutôt qu’un autre. Or si l’on prétendait forcer quelqu’un à être libre, cela signifierait qu’il serait contraint de l’extérieur à l’être et que donc le premier sens de la liberté ne pourrait pas être respecté. Mais la liberté au premier sens est une condition de possibilité de la liberté entendue au second sens, car quelqu’un qui est forcé de faire quelque chose ne saurait se déterminer librement à le faire. On comprend donc que l’expression « forcer quelqu’un à être libre « semble être un oxymore, c'est-à-dire être contradictoire dans les termes. Pourtant si l’on ne peut forcer quelqu’un à être libre, on peut l’aider à devenir libre, en exerçant sur lui une contrainte momentanée durant laquelle l’individu ne sera pas libre, mais au terme de laquelle il deviendra libre. C’est d’ailleurs ce que vise toute éducation digne de ce nom. En effet on peut considérer qu’un enfant n’est pas libre au sens plein du terme, au sens où il n’a ni les moyens de subvenir à ses besoins, ni une idée claire de ce à quoi il aspire profondément. L’éducation vise à permettre à l’individu de savoir à quelle genre de vie il aspire, en lui donnant les moyens intellectuels qui lui permettront de penser sa vie, et fournit également les moyens d’être financièrement autonome. Mais si forcer quelqu’un à devenir libre suppose d’exercer sur lui une contrainte momentanée, cette contrainte ne peut pas être totale, et doit toujours en appeler à la liberté du sujet à venir. En ce sens la contrainte doit toujours s’effacer à terme en faveur d’un accompagnement, d’un guidage, qui en appelle à la responsabilité du sujet.

« de le faire lorsque l'on a affaire à un sujet qui ne comprend pas le sens de sa propre liberté.

Dans Le contrat social , Rousseau considère que la véritable liberté n'est pas la liberté naturelle, mais celle à laquelle on s'élève en entrantdans l'état civil.

Cette entrée se fait à la faveur d'un contrat par lequel pour assurer leur sécurité, les hommes sedémettent de leur liberté naturelle au profit de tous , c'est-à-dire au profit de la volonté générale .

Or c'est la volonté générale qui ensuite fait les lois, et chaque citoyen participe de cette volonté générale.

On voit donc que sil'individu perd sa liberté naturelle de faire tout ce qui lui plaît, il gagne la liberté civile, qui consiste dans le fait den'obéir qu'à la loi (et non à tel ou tel individu).

Or puisqu'il a lui-même contribué à l'établissement de la loi en tantqu'il est membre de la volonté générale, l'individu n'obéit ainsi qu'à lui-même et il est véritablement libre.

Rousseaupense que celui qui refuse d'obéir méconnaît sa liberté, et qu'on a donc le droit de « le forcer à être libre », c'est-à-dire à respecter les lois.

Cette position comporte néanmoins le danger d'un Etat tyrannique, qui sous prétexte derendre les gens libres malgré eux, les asservit. III.

Un être ne peut jamais être véritablement libre malgré soi.

On ne peut donc pas le forcer à être libre,mais on peut l'aider à l'être davantage. Nous avons vu que la position de Rousseau, comporte le danger que sous prétexte de rendre les gens librescontre leur gré, on ne leur face en réalité violence de façon illégitime.

Il est vrai qu'il est parfois nécessaire d'exercerune contrainte sur les personnes qui refusent de respecter la loi, en les mettant en prison par exemple, dans le casde délits graves ou de crimes.

Mais il faut alors reconnaître que c'est pour protéger la société, et non pour rendreces personnes libres qu'on en use de la sorte.

Rendre quelqu'un libre, c'est nécessairement faire appel à sa liberté,en exerçant par exemple sa liberté de penser.

Ainsi dans Alcibiade , Platon met en scène Socrate et Alcibiade. Alcibiade veut faire de la politique, et en tant que citoyen athénien il est tout à fait libre de le faire.

Mais Socrate luimontre qu'il ne se connaît pas lui-même, parce qu'il ignore que son moi profond est constitué par son âme, c'est-à-dire principalement par sa capacité de penser, d'interroger par lui-même le sens de notions comme le juste oul'injuste.

Alcibiade doit donc apprendre à penser par lui-même, et c'est à cette condition seulement qu'il sera libred'entreprendre une carrière politique.

Or Socrate ne force pas Alcibiade à reconnaître que pour faire de la politique ilfaut pouvoir penser par soi-même, pas plus qu'il ne le force à adopter ses opinions.

Il exerce son jugement à lafaveur d'un dialogue, et n'adopte pas à l'égard d'Alcibiade une fonction de contrainte mais d'accompagnement.

Danscette perspective il faut dire que l'on n'aide quelqu'un à devenir libre qu'en respectant d'abord sa liberté, jamais enle forçant. On trouve cette formule énigmatique au septième chapitre du premier livre du « Contrat social ».

Rousseau affirme que celui qui refuse d'obéir aux lois peut y être contraint par le corps social, mais il ajoute que cette contrainte sert en fait la liberté de celui qui y est soumis.

Ceparadoxe met en évidence la tension qui existe entre notre existence d'individu et notre existencede citoyen, et interroge sur la conciliation de l'obéissance civique avec la liberté. Rousseau partage avec les partisans du droit naturel l'idée que l'être humain est naturellement libre et autonome, chacun d'entre nous a naturellement le droit de décider de ses propres actions,dans son propre intérêt.

Or, l'intégration à un Etat nécessite une organisation sociale, des lois, unpouvoir commun.

Le problème central qu'examine le « Contrat social » est de savoir ce qu'est une loi légitime, ou encore de déterminer à quoi chacun de nous s'engage en vivant sous un pouvoircommun.

Qu'est-ce que je donne de mon pouvoir de me diriger moi-même ? à qui ? en l'échange dequoi ? Ou encore, dans quel but véritable les hommes décident-ils de s'associer, de se donner deslois communes ? Alors que Hobbes pense que le souci d'être en sécurité est le principal moteur de la vie sociale, Rousseau affirme que « renoncer à sa liberté, c'est renoncer à sa qualité d'homme ».

Non seulement la liberté est inaliénable, et nul ne peut vouloir être soumis à un autre, mais surtout leshommes s'associent pour conserver leur liberté et se préserver des rapports de dépendancepersonnelle. Le problème de la création de l'Etat légitime peut donc s'énoncer ainsi : « Trouver une forme d'association qui défende et protège de toute la force commune la personne et les biens de chaque associé, et par laquelle chacun s'unissant àtous n'obéisse pourtant qu'à lui-même et reste aussi libre qu'auparavant. » Or, comment créer des lois et n'obéir à personne ? La réponse de Rousseau est apparemment simple : « Le peuple soumis aux lois doit en être l'auteur. » Chaque individu promet d'obéir à la « volonté générale ».

La « volonté générale » est ce qu'il y a de commun dans toutes les volontés.

Par exemple, au moment où un groupe d'individus veut s'associer, il existe en chacun de ses futurs membres une volonté commune : créer cetteassociation, quelles que soient par ailleurs leurs volontés particulières et différentes, singulières.

En promettant d'obéir à la « volonté générale », je ne promets en fait que d'obéir à moi-même, qu'à une partie de ma volonté, qui se trouve coïncider avec celle des autres.

Sans doute, enobéissant à la « volonté générale », ne réaliserai-je pas toutes mes volontés, je ne satisferai pas tous mes intérêts.

Mais je me réaliserai que ce que je veux, que mes intérêts.

En aucun cas je ne serai soumis à la volonté d'un autre.

Bref, je resterai libre. « Tant que les sujets ne sont soumis qu'à de telles conventions, ils n'obéissent à personne, mais seulement à leur propre volonté.

» En obéissant à la loi, qui n'est qu'une déclaration de la « volonté générale », je perds ma liberté naturelle de faire tout ce que je veux ou plus précisément tout ce que je peux , étant donné la force des autres qui peuvent s'opposer à mes projets.

Mais je gagne précisément une liberté. »

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