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Platon vs Gorgias: la force de la persuasion

Publié le 27/02/2008

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platon
Socrate : « Gorgias, je te demande depuis longtemps quelle est la puissance de la rhétorique. Elle me paraît en effet merveilleusement grande. » Gorgias : « Que dirais-tu si tu savais tout, si tu savais qu'elle embrasse en elle-même pour ainsi dire toutes les puissances. Je vais t'en donner une preuve frappante. J'ai souvent accompagné mon frère et d'autres médecins chez quelqu'un de leurs malades qui refusait de boire une potion ou de se laisser amputer ou cautériser par le médecin. Or tandis que celui-ci n'arrivait pas à les persuader, je l'ai fait, moi, sans autre art que la rhétorique. Qu'un orateur et un médecin se rendent dans la ville que tu voudras, s'il faut discuter dans l'assemblée du peuple ou dans quelque autre réunion pour décider lequel des deux doit être élu comme médecin, j'affirme que le médecin ne comptera pour rien et que l'orateur sera préféré, s'il le veut. Et quel que soit l'artisan avec lequel il sera en concurrence, l'orateur se fera choisir préférablement à tout autre ; car il n'est pas de sujet sur lequel l'homme habile à parler ne parle devant la foule d'une manière plus persuasive que n'importe quel artisan. Telle est la puissance de la rhétorique. » PLATON Artisan : d'une manière générale, celui qui pratique un art.

Ce texte est un extrait du Gorgias de Platon. Il s’agit là d’un monologue que Gorgias adresse à Socrate sur la force de la persuasion. En effet, la rhétorique est un art qui consiste à savoir utiliser les arguments pour convaincre son interlocuteur. L’art du langage intervient dans tous les domaines, il ne s’agit pas seulement d’utiliser les mots pour communiquer mais de parler de façon orientée, toujours dans un but précis celui de convaincre l’auditeur. Socrate était un fervent ennemi des sophistes, en effet il leur reproche d’utiliser le langage à mauvais escient, les sophistes manient l’art de manipuler les esprits et le leur faire croire ce qu’ils désirent, non pas par amour de la vérité mais par intérêt personnel. La vérité n’a plus rien à voir avec la communication et l’information. Gorgias défend dans ce texte la supériorité de l’art du langage, « il n'y a rien dont l'orateur ne puisse parler, en public, avec une plus grande force de persuasion que celle de n'importe quel spécialiste «. Ainsi, doit on accepter que la rhétorique passe pour un art supérieur car il permet à l(‘orateur de convaincre toute personne? L’art de la persuasion ne risque t il de mettre en danger le sens de l’information, à savoir la recherche de la vérité?

platon

« I A- La rhétorique est un art supérieure aux autres par la force de son impact.

En effet, la raison de l'homme nesuffit pas à elle même quand il s'agit de convaincre.

Gorgias prend l'exemple du malade qui refuse de suivre esindications de son médecin: même si le patient sait grâce à sa raison qu'il devrait se soigner pour son avantage,cela est insuffisant. Rien n'est terrible comme la logique dans la déraison".

Vinet. B- Face à cela le rhéteur lui sait utiliser les bons mots.

Le but est pourtant le même: amener le patient à sesoigner.

Cependant l'art de la rhétorique se distingue de la médecin grâce à sa capacité à s'adapter à soninterlocuteur en trouvant les arguments qui savent convaincre Hobbes Car vrai et faux sont des attributs de la parole, et non des choses.

Là où il n'est point de parole, il n'y a ni vérité nifausseté.

Il peut y avoir erreur, comme lorsqu'on attend ce qui n'arrivera pas ou qu'on suppose ce qui n'est pasarrivé : mais ni dans un cas ni dans l'autre on ne peut vous reprocher de manquer à la vérité.

Puisque la véritéconsiste à ordonner correctement les dénominations employées dans nos affirmations, un homme qui cherchel'exacte vérité doit se rappeler ce que représente chaque dénomination dont il use, et la placer en conséquence :autrement, il se trouvera empêtré dans les mots comme un oiseau dans des gluaux ; et plus il se débattra, plus ilsera englué.

C'est pourquoi en géométrie, qui est la seule science que jusqu'ici il ait plu à Dieu d'octroyer àl'humanité, on commence par établir la signification des mots employés, opération qu'on appelle définitions, et onplace ces définitions au début du calcul.

On voit par là combien il est nécessaire à quiconque aspire à uneconnaissance vraie d'examiner les définitions des auteurs qui l'ont précédé, de les corriger lorsqu'elles sont rédigéesavec négligence, ou bien de les composer par lui-même.

Car les erreurs de définition se multiplient d'elles-mêmes àmesure que le calcul avance, et elles conduisent les hommes à des absurdités qu'ils finissent par apercevoir, maisdont ils ne peuvent se libérer qu'en recommençant tout le calcul à partir du début, où se trouve le fondement deleurs erreurs.

De là vient que ceux qui se fient aux livres font comme ceux qui additionnent beaucoup de totauxpartiels en un total plus général sans considérer que ces totaux partiels ont été bien calculés ou non ; trouvantfinalement une erreur manifeste, et ne suspectant pas leurs premiers fondements, ils ne savent pas comment s'ensortir : ils passent leur temps à voleter à travers leurs livres, comme des oiseaux qui, entrés par la cheminée, setrouvent enfermés dans une pièce et volettent vers la lumière trompeuse des carreaux de la fenêtre, n'ayant pasassez d'esprit pour considérer par où ils sont entrés.

[...] Car les mots sont les jetons des sages, qui ne s'enservent que pour calculer, mais ils sont la monnaie des sots, qui les estiment en vertu de l'autorité d'un Aristote,d'un Cicéron, d'un saint Thomas, ou de quelque autre docteur, qui, en dehors du fait d'être un homme, n'est pasautrement qualifié II A- Cependant le risque du rhéteur est de détourner la vérité qui n'est plus le but de son art.

En effet, l'art du sophiste est d'amener l'auditeur à suivre son opinion, et ce uniquement, peu importe finalement que la vérité yapparaisse: « Et là ou ce médecin était impuissant à les convaincre, moi, je parvenais, sans autre art que larhétorique, à les convaincre.

» B- Il y a donc un déni de la véracité des propos, chacun pourrait donc argumenter sur n'importe quel sujet sans enconnaître la science! On ne peut accepter qu'un sophiste parle de médecine sans y avoir été initié! On ne pourrait donc accepter que la rhétorique soit un art supérieur si cela doit être au mépris de la vérité. SOCRATE Eh bien, maintenant, Gorgias, à ton tour.

La rhétorique est justement un des arts qui accomplissent etachèvent leur tâche uniquement au moyen de discours, n'est-il pas vrai ? GORGIAS C'est vrai.

SOCRATE Dis-moidonc à présent sur quoi portent ces discours.

Quelle est, entre toutes les choses de ce monde, celle dont traitentces discours propres à la rhétorique ? GORGIAS Ce sont les plus grandes de toutes les affaires humaines, Socrate,et les meilleures.

SOCRATE Mais, Gorgias, ce que tu dis là est sujet à discussion et n'offre encore aucune précision.Tu as sans doute entendu chanter dans les banquets cette chanson qui, dans l'énumération des biens, dit que lemeilleur est la santé, que le second est la beauté et que le troisième est, selon l'expression de l'auteur de lachanson, la richesse acquise sans fraude.

GORGIAS Je l'ai entendue en effet, mais où veux-tu en venir ? SOCRATEC'est que tu pourrais bien être assailli tout de suite par les artisans de ces biens vantés par l'auteur de la chanson,le médecin, le pédotribe et le financier, et que le médecin le premier pourrait me dire : « Socrate, Gorgias te trompe.Ce n'est pas son art qui a pour objet le plus grand bien de l'humanité, c'est le mien.

» Et si je lui demandais : « Quies-tu, toi, pour parler de la sorte ? » il me répondrait sans doute qu'il est médecin.

— « Que prétends-tu donc ? Quele produit de ton art est le plus grand des biens ? » il me répondrait sans doute : « Comment le contester, Socrate,puisque c'est la santé ? Y a-t-il pour les hommes un bien plus grand que la santé ? » Et si, après le médecin, lepédotribe à son tour me disait : « Je serais, ma foi, bien surpris, moi aussi, Socrate, que Gorgias pût te montrer de. »

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