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Pourquoi l'homme a-t-il parfois besoin de l'inconscience ?

Publié le 27/02/2005

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Par conséquent, un besoin de l'inconscience pourrait se concevoir si l'on pouvait mettre à jour les insuffisances d'une pensée consciente chez l'homme.   II Possibilité d'une corruption de la nature humaine par la pensée consciente rationnelle, Heidegger et Bergson   -Dans le Discours de la méthode, Descartes établit par le cogito le rôle de fondement qu'a l'expérience de conscience pour pouvoir conclure à l'effectivité de mon existence.Le cogito permet également de trouver le socle de l'édifice de la raison humaine. Mais le développement de cette raison, plutôt que de permettre une vie humaine authentique, peut au contraire la corrompre et lui dissimuler sa véritable nature : c'est la position de Heidegger dans La Question de la technique. Heidegger y décrit la dérive de la raison dans la technique, où cette raison se prend elle-même pour objet, dissimulant alors à l'homme son lien avec le monde : l'homme "maître et possesseur de la nature" finit par perdre de vue cette nature, celle du monde et par conséquent aussi la sienne.   -Bergson expose une critique encore plus radicale de la conscience dans La pensée et le mouvant : la conscience serait en définitive une perception déformée de la réalité par l'homme. Incapable de saisir le devenir, en mouvement, des choses, elle formerait pour les besoins du confort humain des notions fixes et spatialisées, qui lui interdirait l'accès à la nature humaine des choses. La conscience telle qu'elle se manifeste spontanément serait ainsi incapable de poser adéquatement les problèmes décisifs de l'existence humaine, tels que ceux de la liberté ou du plaisir esthétique.   III Nécessité d'une remise en cause de la conscience pour dévoiler la nature réelle du monde, Nietzsche   -Nietzsche peut nous permettre d'aller plus loin, au-delà d'une insuffisance de la conscience humaine, pour affirmer une nécessité de redescendre aux niveaux inconscients du psychisme. Dans La Généalogie de la morale, il fait l'éloge de l'oubli : l'oubli est ce qui permet d'éviter d'investir trop fortement notre puissance de vie sur les difficultés que nous fait rencontrer l'existence, ce qui aurait pour effet d'affaiblir cette puissance.

Il peut paraître paradoxal de s'interroger sur un besoin humain de l'inconscience. En effet, dans le langage courant, un homme "inconscient" est décrit comme irresponsable, et donc coupable d'une certaine faute morale. De plus, avant de pouvoir concevoir une utilité de l'inconscience pour l'homme, il faudrait déterminer en quoi une telle utilité de l'inconscience est possible : Descartes, à travers le cogito, posait ainsi la conscience, par sa clarté et sa distinction, comme le geste fondamental pour la conduite d'une existence humaine. Par conséquent, de quelle origine et de quelle légitimité pourrait se réclamer l'inconscience humaine ? Et quels effets bénéfiques pourrait-elle avoir sur l'existence ?

« -Nietzsche peut nous permettre d'aller plus loin, au-delà d'une insuffisance dela conscience humaine, pour affirmer une nécessité de redescendre auxniveaux inconscients du psychisme.

Dans La Généalogie de la morale , il fait l'éloge de l'oubli : l'oubli est ce qui permet d'éviter d'investir trop fortementnotre puissance de vie sur les difficultés que nous fait rencontrer l'existence,ce qui aurait pour effet d'affaiblir cette puissance.

Il insiste en donnant unstatut positif à la faculté d'oublier : on quitte donc le simple manque de laconscience, et le besoin d'inconscience qui s'y trouve fondé, pour atteindreune réelle force bénéfique de l'inconscience.

NIETZSCHE : la nécessité de l'oubli Si l'animal jouit d'un bonheur que l'homme jalouse, c'est parce qu'il n'a pas demémoire supérieure.

Seul l'homme dit « je me souviens » et pour cela il lui estimpossible de vivre heureux et pleinement.

En effet :1) C'est par la mémoire, conscience du passé, que l'homme acquiert laconscience du temps et donc celle de la fugitivité et de l'inconsistance detoutes choses, y compris de son être propre.

Il sait que ce qui a été n'estplus, et que ce qui est est destiné à avoir été, à n'être plus.

Cette présencedu passé l'empêche de goûter l'instant pur, et par conséquent le vraibonheur.2) Le passé apparaît à l'homme comme l'irréversible et l'irrémédiable.

Il marque la limite de sa volonté de puissance.L'instant présent, ouvert sur l'avenir, est le lieu du possible où peut s'exercer sa volonté de puissance.

Le passé, aucontraire, change et fige la contingence du présent en la nécessité du « cela a été ».

Dès lors la volonté ne peutque se briser sur cette pétrification du passé qui se donne comme le contre-vouloir de cette volonté.

C'est pourquoi« l'homme s'arc-boute contre le poids de plus en plus lourd du passé qui l'écrase ou le dévie, qui alourdit sadémarche comme un invisible fardeau de ténèbres ».3) Sans l'oubli l'homme ne peut pleinement vouloir ni agir : il est un être malade, il est l'homme du ressentiment.

La «santé » psychique dépend de la faculté de l'oubli, faculté active et positive dont le rôle est d'empêcherl'envahissement de la conscience par les traces mnésiques (les souvenirs).

Car alors l'homme réagit à ces traces etcette réaction entrave l'action.

Par elles l'homme re-sent, et tant qu'elles sont présentes à la conscience, l'hommen'en finit pas de ressentir, « il n'en finit avec rien ».

Englué dans sa mémoire, l'homme s'en prend à l'objet de cestraces dont il subit l'effet avec un retard infini et veut en tirer vengeance: « On n'arrive à se débarrasser de rien, onn'arrive à rien rejeter.

Tout blesse.

Les hommes et les choses s'approchent indiscrètement de trop près, tous lesévénements laissent des traces; le souvenir est une plaie purulente.

» Le désir de vengeance et le ressentimentCette tension de la vie pour se surmonter elle-même sous la forme de la volonté de puissance peut-elle aller à l'infini? Une ascension infinie n'est pas possible parce que la volonté vient se heurter au temps : la volonté de puissancevient achopper sur l'essence du temps comme sur sa limite.

Elle peut bien vouloir l'avenir mais non pas le passé.

Sil'avenir est le domaine qui lui est ouvert, le passé semble lui échapper pour toujours : « En arrière ne peut vouloir lavolonté.

»La volonté ne peut vouloir en arrière que sous les formes morbides du désir de vengeance et du ressentiment.

Cettevolonté réactive ne veut pas simplement abolir ou annuler ceci ou cela, c'est contre le devenir lui-même dans cequ'il a d'irréversible et d'inexorable qu'elle s'exerce, parce que c'est à sa propre impuissance à vouloir pour le passéqu'elle se trouve confrontée.

-Reste à préciser quels moyens l'homme peut utiliser pour déconstruire sa conscience, atteindre des niveaux infra-conscients, et atteindre ainsi un lien avec son monde plus libre et plus dynamique.

Cette question a été exploréetrès souvent dans le domaine de l'art : certains procédés littéraires (l'écriture automatique des Champs magnétiques de Breton), chimiques (les drogues chez Baudelaire ou Michaux), ou encore psychologiques (l'hypnose chez Desnos) permettent ainsi de libérer les possibilités de la sensibilité humaine, recouvertes par les rigidités de laconscience.

Conclusion -Le besoin de conscience est indispensable et nécessaire à l'existence humaine : elle assure le confort de celle-ci,et l'établissement d'une méthode pour bâtir un savoir de cette existence (Descartes).

-Cependant, il ne faut pas oublier que cette conscience est susceptible de dissimuler son origine qui estinconsciente (Freud) : la conscience empêche alors de saisir la relation réelle de l'homme à son monde, elle perd safonction critique en se prétendant extérieure et surplombante par rapport à ce monde (Heidegger) -Par conséquent, l'homme a parfois besoin de déconstruire les édifices raisonnés de la conscience, afin d'en mieuxsaisir la nécessité : d'où un usage local, ponctuel de procédés de retour à l'inconscience, que l'homme doit utiliseravec discernement et prudence pour remettre en cause la conscience et en actualiser les effets bénéfiques.. »

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