Que signifie l'expression: mon corps ?
Publié le 10/05/2012
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B. Ne faudrait-il pas dire, dès lors, que je suis mon corps et identifier mon corps au moi ? Effectivement, je ne dis pas : " mon corps est malade ou bien portant, disgracieux ou bien proportionné , mais : "je suis malade, etc. "· Toutefois, je ne dis pas davantage : " je suis mon corps , et il serait absurde de le dire, comme l'observe Gabriel Marcel (2), car cette affirmation ne saurait être le fait du corps seul.
Il n'y a donc pas d'identité entre moi et mon corps. En disant " moi ", je songe à autre chose qu'à l'organisme grâce auquel je prononce ce mot, à une réalité qui le transcende...
«
LE MONDE, L'HOMME, DIEU 277
" mère possessives "• par exemple -qui nous aideront à pren
dre une conscience plus nette de la diversité des sens du
" possessif » mon.
A.
Est
dite " possessive» la mère qui, inconsciemment et
sous le couvert de la tendresse, tend à faire de son enfant le
moyen de satisfaire ses propres besoins affectifs, le considé
rant en somme comme sa chose.
Dans ce cas, le " mon » de
" mon enfant » présente à peu près le même sens que celui
de
" mon domaine "• " mon portefeuille ».
L'adjectif exprime
alors
la possession, c'est-à-dire "Jouissance, faculté actuelle
de disposer ou de jouir d'un bien » (Acad.).
B.
Mais, observe le " Dictionnaire » de Robert, " Comme
les autres adjectifs dits " possessifs "• mon (ma, mes) peut
exprimer, outre
la possession proprement dite, des rapports de
toute sorte: qualité propre, convenance, conformité, habitude,
intérêt personnel, sympathie, déférence, etc." Relevons quel
ques-uns de ces usages de " mon ., avec une acception non
possessive.
Même quand
il accompagne un nom de chose, " mon ., mar
que souvent, non pas la possession, mais seulement un certain
rapport à moi :
" mon pays "• " mon village» ne m'appartiennent
pas, j'en suis seulement
originaire; "ma chambre "• à l'hôtel
ou chez des amis, n'est dite mienne que parce que je l'occupe ;
en disant " j'ai manqué mon train "• j'entends " le train que je
voulais prendre ...
1 plus forte raison l'idée de possession est-elle exclue
quand il s'agit de personnes.
Sans doute, l'esclave était jadis
consi.:Jéré comme la chose de son maître, et il est possible
qu'il reste quelque chose de la mentalité esclavagiste dans le
"
mon ., de certains patrons : mon domestique n'est-il pas un
individu que je puis utiliser à ce que je veux? On pourrait faire
une remarque analogue sur
le " mon " de certains parents qui
parlent de leurs enfants.
Il est vrai.
Mais il s'en faut que
patrons
et parents prétendent pouvoir traiter comme des choses
ou comme des instruments ceux qui dépendent d'eux.
Bien
plus, dans certains cas, pour les parents et même pour
quelques patrons,
le sentiment de possession est de sens
opposé :
le père et la mère se sentent possédés par leurs
enfants
plus qu'ils ne les possèdent, en ce sens qu'ils ont
conscience de devoir se dévouer à eux.
Il serait plus intéres
sant encore de réfléchir sur le " mon " d'un enfant qui parle
de son père
ou de sa mère : on verrait qu'il n'a pas grand'chose.
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