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Un omnivore social, conscient et bavard - Y. COPPENS

Publié le 10/01/2020

Extrait du document

Yves Coppens, anthropologue qui a lui-même participé à la découverte d'un grand nombre de nos ancêtres (dont la célèbre « Lucie »), situe l'apparition du langage par rapport à celle des autres caractéristiques fondamentales de l'humanité.

L’anatomie de la base du crâne, dont le rôle dans la parole est essentiel, change quand on passe d’Australopithecus3 à Homo. (...) Mais la réflexion et le langage ne se sont pas fossilisés ; aucune démonstration scientifique n’est pour le moment suffisante à rendre définitive cette déclaration. L’aire de Broca4 avait-elle d’ailleurs chez Homo habilis3 la même fonction que celle qu’elle a aujourd’hui ? et cet accroissement évident d’activité des zones latérales du cerveau était-il suffisant pour que naisse la conscience réfléchie ? et même si, mécaniquement, la machine à parler était prête, YHomo habilis s’en est-il réellement servi ?

Disons, pour information, que la plupart des auteurs parlent de langage de manière plus confortable, à propos de la forme humaine suivante, l’Homo erectus3 (1 500 000 ans) et que certains d’entre eux souhaitent même n’en parler qu’à partir à.’Homo sapiens3. Une longue fréquentation à.’Homo habilis me fait penser cependant que c’est bien à lui que l’on doit de s’être posé la question de savoir qui nous étions, d’où nous venions et où nous allions. Son triomphe soudain dans les conditions d’existence que l’on a vues, mangeant « ingénieusement » de tout, construisant des huttes et aménageant l’outil tout en en diversifiant les formes parce qu’il diversifiait ses activités, me paraît si brillant, si extraordinaire et si nouveau que je choisirais volontiers cette espèce, cette époque et cette région du monde pour situer l’apparition de la réflexion et celle du langage.

On pourrait dire de manière schématique que ce premier homme apparaît comme un Primate supérieur des savanes sèches, bipède, omnivore opportuniste, artisan et social, malin et prudent, conscient et bavard. L’Homme, dans toutes ses caractéristiques fonctionnelles et comportementales, est là.

Yves Coppens, Le Singe, l'Afrique et l’homme, Fayard, 1983, pp. 119-120.

« région du monde pour situer l'apparition de la réflexion et celle du langage.

On pourrait dire de manière schématique que ce premier homme apparaît comme un Primate supérieur des savanes sèches, bipède, omnivore opportuniste, artisan et social, malin et prudent, conscient et bavard.

L'Homme, dans toutes ses caractéristiques fonctionnelles et comportementales, est là.

Yves COPPENS, Le Singe, l'Afrique et l'homme, Fayard, 1983, pp.

119-120.

POUR MIEUX COMPRENDRE LE TEXTE Comme ceux d'Hagège, les travaux de Coppens proposent une synthèse de ses propres découvertes, et des récents développements de la recherche sur les origines de l'homme.

Il y a consensus pour dater l'apparition du langage dans l'humanité d'un million et demi d'années environ : l'auteur explique ici pourquoi lui-même la suppose plus précoce.

S'il est impossible de dater précisément l'apparition de telle ou telle capacité spécifique, il est essentiel en revanche de se donner des critères d'identification aussi sûrs que possi­ ble des aptitudes humaines.

C'est ce que fait Coppens en dressant un portrait d' Homo habilis.

Il devient omnivore parce qu'il a compris qu'il n'avait pas le choix, il se protège des intempéries en construisant des abris, il fabrique des outils variés, adaptés à l'usage qu'il veut en faire ...

La description est celle d'un animal social et réfléchi; s'il est impossible, faute de traces, de prouver qu'en plus, cet animal parlait, il est logiquement et philosophiquement nécessaire de l'affir­ mer.

Il est en effet encore moins possible de se représenter une société d'êtres organisés et intelligents qui ne dispose­ raient pas d'un moyen d'expression et de communication très élaboré.

Illustre prédécesseur de Coppens, André Leroi-Gourhan, avait le premier attiré l'attention sur cette étape décisive de l'évolution humaine: « Il y a possibilité de langage à partir du moment où la préhistoire livre des outils, puisque outil et langage sont liés neurologiquement et puisque l'un et l'autre sont indissociables dans la structure sociale de l'huma­ nité » (Le Geste et la parole, 1, Albin Michel, 1964, p.

163).. »

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