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Peut-on penser la mort ?

Publié le 27/02/2008

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Et de là il nous est impossible de poser : je pense que je ne suis pas. C'est pourquoi Kant dans l'Anthropologie d'un point de vue pragmatique dira : « La peur de la mort qui est naturelle à tous les hommes, même aux plus malheureux, et fût-ce au plus sage, n'est pas un frémissement d'horreur devant le fait de périr, mais comme le dit justement Montaigne, devant la pensée d'avoir péri (d'être mort) ; cette pensée, le candidat au suicide s'imagine l'avoir encore après la mort, puisque le cadavre qui n'est plus lui, il le pense comme soi-même plongé dans l'obscurité de la tombe ou n'importe où ailleurs. L'illusion ici n'est pas à supprimer ; car elle réside dans la nature de la pensée, en tant que parole qu'on adresse à soi-même et sur soi-même. » La pensée de la mort ne nous paraît donc pas atteignable ; elle semble être un objet dépassant tout simplement les limites de notre entendement ou plus simplement de notre condition, de notre finitude. c) Dans ce cas il faut donc peut-être revenir sur une définition de la philosophie qui voulait qu'elle soit une méditation de la mort. Or quoi de plus inconséquent qu'une philosophie qui serait une pensée de la mort ne puisse pas le penser. Au mieux, on pourra atteindre un rapprochement de la mort en associant des prédicats négatifs à la vie mais il n'en reste pas moins que la mort est inaccessible pour nous. Dès lors comme le dira Spinoza en Ethique IV : « l'homme libre ne pense à rien moins qu'à la mort, et sa sagesse n'est point une méditation de la mort, mais de la vie. » En ce sens, la philosophie n'est pas une méditation de la mort mais bien sur la vie. La pensée de la mort est inséparable d'une vision en quelque sorte « égoïste » des choses, privilégiant le moi particulier au lieu de se diriger vers l'Universel, vers la vérité de l'Esprit qui ordonne le monde.

Peut-on penser la mort ? Certes l’homme est le seul animal, pense-t-on, qui sait qu’il va mourir ; mais cette pensée de la mort n’est pas une évidence et pourtant comme le remarque Jacob dans La logique du vivant : « Les limites de la vie ne peuvent être laissées au hasard. Elles sont prescrites par le programme qui, dès la fécondation dans l’ovule, fixe le destin génétique de l’individu […] la mort fait partie intégrante du système sélectionné dans le monde animal et dans son évolution. « Avant d’être une catégorie du vécu de la conscience, la mort se présente à nous comme un phénomène biologique. Mais la mort reste cet irréel, difficilement pensable. Nous n’en avons aucune expérience à part celle de la mort d’autrui mais il semble bien que la pensée que ma propre mort en tant qu’« être mort « soit impossible : ni connaissable ni pensable. Dès lors la mort serait-elle l’objet insaisissable pour la philosophie, un point aveugle de notre condition : un absolu impensable ? De dire alors de la mort ? En effet, je peux penser autour de ma mort ou à propos d’elle mais il n’en reste pas moins qu’elle me reste impénétrable.

« vie mais il n'en reste pas moins que la mort est inaccessible pour nous.

Dès lors comme le dira Spinoza en Ethique IV : « l'homme libre ne pense à rien moins qu'à la mort, et sa sagesse n'estpoint une méditation de la mort, mais de la vie.

» En ce sens, la philosophien'est pas une méditation de la mort mais bien sur la vie.

La pensée de la mortest inséparable d'une vision en quelque sorte « égoïste » des choses,privilégiant le moi particulier au lieu de se diriger vers l'Universel, vers la véritéde l'Esprit qui ordonne le monde.

La mort n'a donc pas de réalité positive.

Transition : Ainsi au-delà de ce que l'on peut dire de la mort au point de vue biologique etle fait qu'elle soit un a priori de l'existence, il apparaît que la pensée de lamort est d'une difficulté telle qu'il semble qu'elle soit inaccessible et cela enraison même de l'impossibilité de se penser « étant mort ».

La négation del'existence, de la vie, pour une conscience est impossible.

La pensée de lamort est un objet inaccessible, inintelligible.

Mais dans ce cas ne doit-on pasavoir le courage d'aller plus loin et d'assumer une pensée radicale sur la mortcar si l'on ne peut pas comprendre et penser la mort ne faut-il pas dire qu'ellen'est alors rien pour nous ? II – « La mort n'est rien pour nous » a) En effet, comme le développe Epicure dans sa Lettre à Ménécée : « La mort n'est rien pour nous ».

Nos corps sont de simples agrégats qui se dissolvent au moment de la mort.

En ce sens, nous ne devons pas craindre la mortcar sans corps nous n'aurons plus de sensation ; la peur de la mort est donc infondée.

Tant que je suis en vis jesens mais une fois mort toute sensation disparaît.

Alors nous n'avons à redouter nulle survie au-delà de la mort.Ainsi la mort n'est rien : il y a une contradiction logique entre la mort et le vivant, entre être et non-être.

Plusexactement il s'agit d'une incompatibilité d'être : tant que j'existe la mort ne me concerne pas et une fois mort jen'ai plus à m'en soucier car une fois la mort advenue se sera moi qui n'existerait plus.

La vie est une contradictionde la mort même au niveau temporel.

Autrement dit, on peut dire que la mort est pour nous un fantôme, unechimère qui n'existe que quand je ne suis plus.

Il n'y a donc pas d'angoisse à avoir à ce propos : la mort n'a aucunrapport avec les vivants hormis par l'effet de l'imagination et de la crainte qu'il faut dissiper ; et c'est bien ce quedit Epicure : « Habitue-toi avec l'idée que la mort n'est rien pour nous, car tout bien et tout mal résident dans la sensation ; or la sensation est la privation complète de cette dernière […]Ainsi, celui des maux qui fait le plus frémir n'est rien pour nous, puisque tantque nous existons la mort n'est pas, et que, quand la mort est là, nous nesommes plus.

La mort n'a, par conséquent, aucun rapport ni avec les vivantsni avec les morts, étant donné qu'elle n'est rien pour les premiers et que lesderniers ne sont plus.

»b) La mort n'est donc rien pour et c'est pour cela que l'on ne peut la penser :elle ne nous concerne pas.

Dès lors la crainte de la mort résulte bien d'uneffet de l'imagination et c'est bien ce que poursuit Lucrèce dans le De Natura , livre III, v.

870 à 909 : « Désormais il n'y aura plus de maison joyeuse pour t'accueillir, plus d'épouse excellente, plus d'enfants chéris pour courir àta rencontre, se disputer tes baisers et pénétrer ton cœur d'une douceursecrète.

Tu ne pourras plus assurer la prospérité de tes affaires et la sécuritédes tiens.

"O malheur" disent-ils, ô malheureux, tant de joies de la vie il a suffid'un seul jour funeste pour te les arracher toutes".

Cependant ils se gardentbien d'ajouter : "mais le regret de tous ces biens ne te suit pas, et ne pèseplus sur toi dans la mort".

Si l'on avait pleine conscience de cette vérité, sil'on y conformait ses paroles, on libérerait son esprit d'une angoisse et d'unecrainte bien grandes.

».

La pensée de la mort est une pensée qui va au-delàde la vie elle-même et ne prend en compte la radicalité de la mort c'est-à-dire la « fin ».

Craindre la mort c'est supposer une vie dans l'au-delà où l'onpourrait regretter ce que l'on a perdu, mais il s'agit d'une inconséquencelogique.

La seule que nous pourrions craindre alors ce serait de mourir trop vite mais cette pensée n'est pas nonplus conséquente puisque la finitude du corps est intrinsèque à la nature de l'homme et cela nous reconduirait dansl'inconséquence de la première clause : « Aussi, quand tu vois un homme se lamenter sur lui-même, à la penséequ'après la mort il pourrira, une fois son corps abandonné, ou qu'il sera dévoré par les flammes, ou par la mâchoiredes bêtes sauvages, tu peux dire que sa voix sonne faux, et que se cache dans son cœur quelque aiguillon secret,malgré son refus de croire qu'aucun sentiment puisse subsister en lui dans la mort.

A mon avis, il n'accorde pas cequ'il annonce, il ne donne pas ses véritables raisons : ce n'est pas radicalement qu'il s'arrache et se retranche de lavie mais à son insu même, il suppose qu'il survit quelque chose de lui.

Le vivant, en effet, qui se représente que soncorps, après la mort, sera déchiré par les oiseaux et les bêtes de proie, s'apitoie sur sa propre personne : c'est qu'ilne se sépare pas de cet objet, il ne se distingue pas assez de ce cadavre étendu, il se confond avec lui, et, deboutà ses côtés, il lui prête sa sensibilité.

Voilà pourquoi il s'indigne d'avoir été créé mortel, sans voir que, dans la mortvéritable, il n'y aura pas d'autre lui-même qui demeuré vivant puisse déplorer sa propre perte, et resté debout, gémirde se voir gisant à terre en proie aux bêtes ou aux flammes.

Car si dans l'état de la mort c'est un malheur que d'êtrebroyé par les mâchoires et la morsure des fauves, je ne vois pas pourquoi il n'est pas douloureux de prendre place. »

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