Devoir de Philosophie

Tamerlan par Jean Aubin Directeur d'études à l'École pratique des Hautes Études (IVe section), Paris Homme de guerre, Tamerlan est un des plus fameux capitaines de l'histoire.

Publié le 05/04/2015

Extrait du document

histoire
Tamerlan par Jean Aubin Directeur d'études à l'École pratique des Hautes Études (IVe section), Paris Homme de guerre, Tamerlan est un des plus fameux capitaines de l'histoire. Constamment vainqueur, non point parce qu'il mène au combat des hordes féroces, mais grâce aux ressources d'une intelligence multiple, qui calcule soigneusement les plans de campagne, la convergence des forces et le rythme de leur marche, qui travaille par une habile propagande le moral de l'adversaire, qui déploie ses capacités inventives lorsque surgit une difficulté imprévue. De l'Asie centrale au Gange et à la Méditerranée, ses exploits ont pour cadre un théâtre immense, où il porte le massacre et la destruction. Il est réputé n'avoir causé que des ruines, ce qui est faux. Et n'avoir bâti qu'un empire fragile, bientôt disparu après lui, ce qui est vrai : en 1405, l'État timouride s'est disloqué à la vitesse du galop des courriers qui répandaient dans les provinces la nouvelle de la mort du " Grand Émir ". Était-il donc seulement un génie négatif, de qui les dons exceptionnels ne tournaient qu'à créer le chaos ? Tamerlan homme d'État ? Certes, si l'on ajoute qu'il était homme de son temps. Comme tous les grands conquérants, fussent-ils jugés " barbares ", il est un grand administrateur, au civil aussi bien qu'au militaire, avec les défauts du genre, qui iront s'accusant avec l'âge, hypertrophie de l'orgueil, refus des opinions contradictoires, démesure. En regard des défauts, les qualités sans lesquelles il n'y a pas de meneurs d'hommes. Non seulement l'intelligence du stratège et l'opiniâtreté du soudard, mais cette ouverture d'esprit qui a frappé le célèbre Ibn Khaldoun, lors de leur rencontre devant Damas, tandis que la troupe se livrait à ses atrocités coutumières. " Certains lui attribuent le savoir, d'autres l'hérésie, d'autres encore l'usage de la magie et de la sorcellerie ", écrit Ibn Khaldoun au terme de leurs entretiens - " mais il n'y a rien de tout cela, il y a simplement qu'il est très intelligent et très perspicace, adonné à débattre et à argumenter sur ce qu'il connaît et aussi sur ce qu'il ne connaît pas ". Illettré, mais point inculte : Tamerlan possède une vaste culture orale, entretenue par une curiosité toujours en éveil. Sa volonté, illustrée par les tueries implacables qui en ont découlé, s'est manifestée de façon moins ostentatoire dans des réussites plus difficiles sur le milieu dont il sortait, et d'abord sur lui-même ; Tamerlan, c'est-à-dire Timour Lang, " Timour le Boiteux ", est un infirme à la jambe raide, qui ne se déplace que soulevé par ses pages, et qu'on hisse sur sa monture. Au moral, frère affectueux, grand-père attentionné, ami fidèle à ceux qui le sont, - une sensibilité réservée à la famille et aux compagnons et qui, à tout prendre, ne contraste pas avec le reste du personnage. Avec une affectivité réelle, mais restreinte, et une âme profondément sceptique, peu accessible au doute ou au scrupule, l'esprit, chez Tamerlan, est tourné et tourne tout vers l'action. Des quelques anecdotes authentiques où il est pris sur le vif, presque toutes nous le montrent se divertissant à déceler la faille dans les raisonnements des hommes de pensée, théologiens compris. D'autres princes de son temps, aussi indifférents au prix de la vie humaine, plaçaient plus haut qu'il ne le faisait l'intelligence spéculative. Il était plus psychologue, ou du moins plus pragmatique. Les mécanismes de son caractère nous échappent parce que nous ne le voyons vraiment qu'arrivé, et déjà homme mûr, après 1370, et plus encore après 1380, lorsque l'entourage iranien peut rapporter sur lui, en témoignage direct, des renseignements qui seront transcrits, de vingt à cinquante ans plus tard, par les chroniqueurs persans. Dès cette époque, les débuts du grand homme et la phase besogneuse de son ascension ne sont racontés qu'en une version stéréotypée. Il naît en 1336, non loin de Samarqand, dans la tribu des Barlas, sans doute dans...
histoire

« par Jean Aubin Directeur d'études à l'École pratique des Hautes Études (IVe section), Paris. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles