Les Provinciales de Pascal
Publié le 09/04/2013
Extrait du document
«
On retrouve facilement,
dans
la façon dont ce
livre est rédigé , le
physicien et le
mathématicien
que fut
Pascal.
La précision
dans l'exposé des
questions ainsi
qu'un
recours constant aux
faits
procèdent de cette
formation scientifique .
« Quoi ! mes Pères, parce que le dérèglement des hommes leur a fait aimer ce faux honneur plus que la vie que Dieu leur a donnée ( ...
) il leur sera permis de tuer pour le conserver ? »
EXTRAITS
En jouant le naïf, Pascal démontre
les contradictions de ses adversaires
Ils' agit d'examiner ce que M.
Arnauld a dit
dans la même lettre : Que la grâce, sans
laquelle on ne peut rien, a manqué à Saint
Pierre, dans sa chute.
Sur quoi nous pen
sions, vous et moi,
qu'il était question
d'examiner les plus grands principes de la
grâce, comme si elle n'est pas donnée à tous
les hommes, ou bien si elle est efficace ;
mais nous étions bien trompés.
Je suis de
venu grand théologien en peu de
temps, et vous en allez voir des
marques.
Pour savoir la chose au vrai,
je
vis M.
N., docteur de Navarre,
qui demeure près de chez moi,
qui est, comme vous le savez,
des plus zélés contre les J ansé
nistes ; et comme ma curiosité
me rendait presque aussi ardent
que lui,
je lui demandai d'abord
s'ils ne décideraient pas formel
lement que la grâce est donnée
à tous, afin qu'on n'agitât plus
ce doute.
Mais il me rebuta
rudement et me dit que ce n'était
pas là le point ;
qu'il y en avait
de ceux de son côté qui tenaient
que la grâce
n'est pas donnée
à tous ; que les examinateurs
mêmes avaient dit en pleine
Sorbonne que cette opinion est problé
matique, et
qu'il était lui-même dans ce
sentiment.
La morale des jésuites
est
à « géométrie variable »
Voici quelle est leur pensée.
Ils ont assez
bonne opinion
d'eux-mêmes pour croire
qu'il est utile et comme nécessaire au bien
de la religion que leur crédit s'étende par
tout,
et qu'ils gouvernent toutes les
consciences.
Et parce que les maximes
évangéliques et sévères sont propres pour
gouverner quelques sortes de personnes, ils
s'en servent dans ces occasions où elles leur
sont favorables.
Mais comme ces
mêmes
maximes ne s'accordent pas au dessein de
la plupart des gens, ils les laissent à l'égard
de ceux-là, afin d'avoir de quoi satisfaire
tout le monde.
C'est pour cette raison
qu'ayant à faire à des personnes de toutes
sortes de conditions et de nations si
diff é
rentes, il est nécessaire qu'ils aient des
casuistes assortis à toute cette diversité.
Tout peut s'expliquer
et
se justifier,
selon les jésuites
-Comment! mon Père,
et
n'est-ce pas là un
mensonge, et même un
parjure
? - Non, dit le
Père: Sanchez
le prouve
au
même lieu, et notre
P.
Filiutius aussi, tr.
25,
c.11,
n.
331 ; parce, dit
il, que
c'est l'intention
qui règle la qualité de
l'action.
Et il y donne
encore,
n.
328, un autre
moyen plus sûr d'éviter
le mensonge :
c'est
qu'après avoir dit tout
haut : Je jure que
je n'ai
point fait cela, on ajoute
tout bas, aujourd'hui ;
ou
qu'après avoir dit
tout
haut : Je jure, on
dise tout bas, que
je dis,
et que
l'on continue
ensuite tout haut, que
je n'ai point fait cela.
Vous voyez bien que c'est dire la vérité.
-Je
l'avoue, lui dis-je ; mais nous trouverions
peut-être que c'est dire la vérité tout bas, et
un mensonge tout
haut.( ...
)
« Voilà comment ils [les
jésuites] échappent aux condamnations de leurs plus détestables maximes, par des
soumissions feintes et imaginaires.
»
NOTES DE L'ÉDITEUR avec grâce.
» Albert Bayet, Les
Pro vinciales
de Pascal, Nizet, 1930 .
Le scientifique complète le penseur :
Pascal se révèle un véritable écrivain :
« Avec Les Provinciales, la langue qui se
cherchait se trouve, elle est désormais sûre
d'elle-même, de son esprit, de ses
ressources.
De l'humanisme, dont elle sort,
elle garde la vie, la sève.
De son génie
propre, qui est raisonnable, elle tient la
clarté, le sens du mot propre, l'ordre, les
constructions honnêtes.
De son passage
dans les salons précieux, elle garde un
souci d'élégance ; elle sait être robuste «On peut dire qu'il écrasa ses adversaires
par la souplesse, la force et la richesse de son
style, par une série d'arguments en apparence
incontestables, liés les uns aux autres avec
une rigueur d'allure souveraine et, surtout,
par un ton ironique et
magnifiquement
hautain qui ajoutait
à sa supériorité littéraire
tous les signes d'une éclatante supériorité
morale.
» Kléber Haedens, Une histoire de la
littérature française, Grasset, 1970.
1 sangu ine de Jean Domat / Edimedia 2, 3, 4 , 5 dessins de J.-P.
Meuer, Edito-Service SA, 1970
«Elles se présentent comme le modèle d'un
raisonnement conduit selon la méthode
géométrique.
Chaque résumé est défini
d'une manière claire et expressive, et
l'argumentation se développe selon une
progression savamment calculée.
Cette
rigueur permet au polémiste de découvrir
les illogismes et les faux-fuyants de ses
adversaires.
»Kurt Scharer, Dictionnaire
des littératures
de langue française, Bordas,
1984.
PASCAL02.
»
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