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Les gratifications (Histoire de la littérature)

Publié le 14/12/2018

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histoire

GRATIFICATIONS. Les gratifications — c’est-à-dire, ici, les dons et subsides accordés à des écrivains par de puissants personnages — relèvent des pratiques fort anciennes du mécénat. Elles sont directement liées aux questions du statut social de l’écrivain, de la propriété littéraire et des droits d’auteur. Mais, dans l’histoire des formes du mécénat, il faut faire une place à part à l'instauration au XVIIe siècle d’un mécénat d’État et d’une politique systématique de gratification des auteurs.

 

Les gratifications, tradition du mécénat

 

La propriété littéraire est chose récente : sa première formulation date du xviie siècle, et les écrivains ne parviennent à l’imposer — et donc à obtenir de réels droits d’auteur — qu’à la fin du xviiie siècle. Jusque-là, ils ne peuvent subsister qu’en mettant leur plume au service d'un grand. Après l’apparition, au xvie siècle, de l’imprimerie et du commerce de librairie, le prix obtenu pour la cession d’un texte à un éditeur est minime, et, jusqu’à la fin du xvme siècle, les auteurs qui s’enrichissent par la vente de leurs textes constituent des exceptions remarquables.

 

Des siècles durant, l’écrivain est donc dans la dépendance des mécènes, dont il doit souvent se faire le chantre. Il peut en espérer diverses largesses. Son protecteur peut lui faire obtenir un bénéfice ecclésiastique, ou une pension au titre d’une quelconque sinécure. Souvent, il fait partie de la « maison » d’un grand, comme secrétaire ou précepteur. Mais la rétribution la plus fréquente est l’allocation d’une gratification, soit en récompense de la dédicace d’une œuvre, soit en signe de munificence. De telles pratiques font partie de l’image sociale d’eux-mêmes que doivent donner et entretenir les grands. Certains auteurs refusent d’entrer dans ce jeu (La Serre, par ex.), mais la plupart d’entre eux acceptent la dépendance qu’il implique.

 

Cette tradition de la gratification a laissé des traces de nos jours : les prix littéraires (outre leur aspect commercial) en sent le plus récent avatar.

 

Les gratifications au temps de Louis XIV

 

Au xviie siècle, le renforcement de la monarchie suscite le développement du mécénat d’Etat. Richelieu en fut le promoteur. Il était animé par son goût pour les lettres, mais aussi par un souci de propagande et de contrôle du mouvement des idées (la fondation de l'Aca-démie et du groupe des Cinq Auteurs, la protection accordée à Théophraste Renaudot relèvent de la même préoccupation). Son conseiller et intermédiaire le plus actif en ce domaine était Boisrobert. La dépense en gratifications et pensions s’élève sous son ministère à une quarantaine de milliers de livres par an.

 

Au temps de Mazarin, la plupart de ces subsides furent supprimés. Le surintendant Fouquet fut un temps le nouveau mécène. Mais le pouvoir central ne pouvait admettre des mécénats privés plus puissants que le sien, et, sous l’impulsion de Colbert, l'attribution de gratifications d’État fut érigée en système.

histoire

« tauration au xvn• siècle d'un mécénat d'État et d'une politique systématique de gratification des auteurs.

Les gratifications, tradition du mécénat La propriété littéraire est chose récente : sa première formulation date du xvu• siècle, et les écrivains ne par­ viennent à l'imposer- et donc à obtenir de réels droits d'auteur- qu'à la fin du xvm• siècle.

Jusque-là, ils ne peuvent subsister qu'en mettant leur plume au service d'un grand.

Après l'apparition, au XVI0 siècle, de l'impri­ merie et du commerce de librairie, le prix obtenu pour la cession d'un texte à un éditeur est minime, et, jusqu'à la fin du xvm• siècle, les auteurs qui s'enrichissent par la vente de leurs textes constituent des exceptions remarquables.

Des siècles durant, l'écrivain est donc dans la dépen­ dance des mécènes, dont il doit souvent se faire le chan­ tre.

Il peut en espérer diverses largesses.

Son protecteur peut lui faire obtenir un bénéfice ecclésiastique, ou une pension au titre d'une quelconque sinécure.

Souvent, il fait partie de la« maison » d'un grand, comme secrétaire ou précepteur.

Mais la rétribution la plus fréquente est l'allocation d'une gratification, soit en récompense de la dédicace d'une œuvre, soit en signe de munificence.

De telles pratiques font partie de l'image sociale d'eux­ mêmes que doivent donner et entretenir les grands.

Cer­ tains auteurs refusent d'entrer dans ce jeu (La Serre, par ex.), mais la plupart d'entre eux acceptent la dépendance qu'il implique.

Cette tradition de la gratification a laissé des traces de nos jours : les prix littéraires (outre leur aspect com­ mercial) en sont le plus récent avatar.

Les gratifications au temps de Louis XIV Au xvn• siècle, le renforcement de la monarchie sus­ cite le développement du mécénat d'État.

Richelieu en fut le promoteur.

Il était animé par son goût pour les lettres, mais aussi par un souci de propagande et de contrôle du mouvement des idées (la fondation de l' Aca­ démie et du groupe des Cinq Auteurs [Voir ACADÉMIE FRANÇAISE, ÜNQ AUTEURS), la protection accordée à Théophraste Renaudot relèvent de la même préoccupa­ tion).

Son conseiller et intermédiaire le plus actif en ce domaine était Boisrobert.

La dépense en gratifications et pensions s'élève sous son ministère à une quarantaine de milliers de livres par an.

Au temps de Mazarin, la plupart de ces subsides furent supprimés.

Le surintendant Fouquet fut un temps le nou­ veau mécène.

Mais le pouvoir central ne pouvait admet­ tre des mécénats privés plus puissants que le sien, et, sous l'impulsion de Colbert, l'attribution de gratifica­ tions d'État fut érigée en système.

En 1655, Yfazarin avait fait dresser par Costar un inventaire des écrivains « grat if ia b le s », mais aucune suite n'y fut donnée.

En 1662, Colbert fit préparer par Chapelain un nouveau projet, et, en 1663, une liste de bénéficiaires fut établie, et des gratifications annuelles furent ensuite versées.

Dès ses origines, 1 'entreprise a suscité des polémiques et fut diversement interprétée : générosité et amour de 1' art, ou favoritisme et volonté d'inféodation des écrivains? On peut constater en premier lieu, dans la correspon­ dance entre Colbert et Chapelain, que le but principal était de recenser les thuriféraires possibles du roi.

En second lieu, il s'agissait bien de gratifications : elles n'étaient pas acquises une fois pour toutes.

et l'on atten­ dait des écrivains qu'ils agissent de façon à en mériter la reconduction- en fait, les écrits de louange furent assez minces.

D'autre part, seul un petit nombre d'écrivains -une quarantaine -en bénéficièrent.

A côté d'auteurs de premier plan (Corneille, Molière, Racine ...

), d'autres figurent parce qu'ils sont bien en cour (Boyer, Cotin ...

) ou parce qu'ils sont considérés comme politiquement utiles : tels les historiens Mézeray et Godefroy, qui sont parmi les mieux lotis (4 000 et 3 660 livres).

Les« indo ­ ciles >> ou réputés tels sont exclus (par ex.

La Fontaine et, au début, Boileau).

A côté des écrivains, figuraient aussi des savants et des traducteurs-interprètes, le total des noms s'élevant à environ soixante chaque année.

Les sommes allouées (4 000 livres au plus -mais, en géné­ ral, entre 600 et 1 600), quoique appréciables, ne suffi­ saient pas à faire vivre leurs bénéficiaires.

Le système des gratifications représenta une dépense d'environ 100 000 livres par an, de 1664 à 1672.

Ensuite, les guerres épuisant le Trésor royal, il déclina, et il dispa­ rut en 1690.

(Voir INSTITUTION LITTÉRAIRE].

BIBLIOGRAPHIE Peu de travaux méthodiques.

Un éclairage utile : G.

Couton, « Effort publicitaire et Organisation de la recherche.

Les gra tifi ­ cations aux gens de lettres sous Louis XlV », dams Actes du V' colloque du C.M.R.

17 (Marseille, 1976), revue Marseille.

n• spécial.

1977.. »

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