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De quoi la science nous libère-t-elle ?

Publié le 22/08/2005

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Des faits « polémiques » surgissent qui les contredisent, qui obligent à des révisions. Tout succès scientifique ouvre plus de questions qu'il n'en clôt. Faut-il pour autant sombrer dans le scepticisme et affirmer qu'il n'y a rien qui vaille vraiment ? Comment distinguer, dès lors, la véritable science de la métaphysique ou des pseudo-sciences comme l'alchimie ou l'astrologie ? Et que penser des sciences humaines ? La psychanalyse, la théorie de l'histoire de Marx peuvent-elles prétendre légitimement à la scientificité ? Popper, dans « Logique de la découverte scientifique » propose un critère de démarcation, capable d'établir, de manière concluante, la nature ou le statut scientifique d'une théorie. Il écrit : «C'est la falsifiabilité et non la vérifiabilité d'un système qu'il faut prendre comme critère de démarcation. En d'autres termes, je n'exigerai pas d'un système scientifique qu'il puisse être choisi, une fois pour toutes, dans une acception positive mais j'exigerai que sa forme logique soit telle qu'il puisse être distingué, au moyen de  tests empiriques, dans une acception négative : un système faisant partie de la science empirique doit pouvoir être réfuté par l'expérience. » A l'époque de Popper, on affirmait généralement que ce qui distinguait la science des autres disciplines, c'était le caractère empirique de sa méthode.

Notre sujet part visiblement de deux postulats. Le premier selon lequel nous sommes originairement prisonniers, aliénés. Le sujet nous amène à nous poser la question de la nature et de la forme de cette aliénation – voir si elle est une ou multiple. Le second selon lequel la science est libératrice. Ces deux postulats peuvent avoir quelque chose de choquant, l'un parce que nous ne nous sentons pas forcément emprisonnés, l'autre parce que nous ne regardons pas forcément la science comme le libérateur par excellence. Il suffit de penser au nombre d'élèves qui voit comme une libération l'entrée en faculté de lettres, libération justement des sciences. Le sujet pose donc problème. Dans quelle mesure sommes-nous aliénés. Dans quelle mesure la science est-elle libératrice. Ainsi si la science est libératrice de quoi et dans quelle mesure nous libère-t-elle ? Comme la libération issue d'une science libératrice n'apparaît pas comme une évidence, cette question s'avère nécessaire.

« a) Nous sommes prisonniers de nos illusions.Texte : Platon, République , chapitre 10, l'allégorie de la caverne, traduction Robert Baccou. REMARQUE : Il serait souhaitable de lire ce passage incontournable dans son intégralité.

Voici cependant des extraits particulièrement importants pour notre propos. « Figure-toi des hommes dans une demeure souterraine, en forme de caverne, ayant sur toute sa largeurune entrée ouverte à la lumière ; ces hommes sont là depuis leur enfance, les jambes et le couenchaînés, de sorte qu'ils ne peuvent bouger ni voir ailleurs que devant eux, la chaîne les empêchant detourner la tête ; la lumière leur vient d'un feu allumé sur une hauteur, au loin derrière eux ; entre le feu etles prisonniers passe une route élevée : imagine que le long de cette route est construit un petit mur,pareil aux cloisons que les montreurs de marionnettes dressent devant eux, et au-dessus desquelles ilsfont voir leurs merveilles.

(...) Figure-toi maintenant le long de ce petit mur des hommes portant desobjets de toute sorte, qui dépassent le mur, et des statuettes d'hommes et d'animaux, en pierre, en bois,et en toute espèce de matière ; naturellement, parmi ces porteurs, les uns parlent et les autres setaisent.

(...) Ils nous ressemblent, répondis-je ; et d'abord, penses-tu que dans une telle situation ilsaient jamais vu autre chose d'eux-mêmes et de leurs voisins que les ombres projetées par le feu sur laparoi de la caverne qui leur fait face ? (...) Si donc ils pouvaient s'entretenir ensemble ne penses-tu pasqu'ils prendraient pour des objets réels les ombres qu'ils verraient ? » Dans la célèbre allégorie de la caverne (République, VII), Platon présente dans un schéma simplifié lestatut de l'homme dans le monde : la duperie du nigaud qui prend des vessies pour des lanternes.

Il fautimaginer une caverne profonde dans laquelle les hommes sont enchaînés face à la paroi du fond.

Nepouvant tourner la tête, la réalité est pour eux ce mur sur lequel se déploient des jeux d'ombres.

Al'entrée de la caverne brûle un feu qui dispense une lumière suffisante pour découper sur ce mur lessilhouettes des figurines que manipulent des montreurs de marionnettes, interposés entre le feu et lacloison.

Lorsqu'ils parlent, l'écho produit donne l'illusion aux captifs que ce sont les ombres projetées quiprononcent ces paroles.

L'illusion est parfaite et peut ainsi durer toute une vie.

Mais si on en débarrasseun de ses chaînes - et c'est la mission du philosophe que de délivrer l'homme de l'erreur pour le conduireà la vérité -, qu'on le force à tourner la tête pour découvrir le stratagème, il sera frappéd'étourdissement.

Par la force de l'habitude, les ombres de la paroi lui paraîtront plus réelles que cettenouvelle vision des figurines manipulées devant le feu.

Il lui faudra un certain temps pour s'accoutumer àl'éblouissement du feu et convenir qu'il ne voyait que l'ombre projetée des silhouettes qu'il voit désormaisen réalité.

Si maintenant on conduit cet affranchi hors de la caverne, l'éblouissement sera encore plusgrand, et il faudra encore plus de temps pour voir les vrais hommes et les vrais objets, dont les figurinesn'étaient que les imitations.

Plus grande encore sera la volonté de retourner dans le confort ténébreux desa caverne.

A l'extérieur, il ne pourra d'abord observer que les ombres naturelles tant l'éclat est grand,puis les reflets des choses dans l'eau, puis les choses et les êtres en eux-mêmes.

C'est à la faveur de lanuit qu'il pourra lever la tête aux cieux pour contempler les astres, et après une longue et patienteéducation regarder ce dont quoi toute réalité procède, ce qui donne l'être et la vie, la lumière solaire.Le peu de réalité auquel il avait accès dans la caverne procédait donc de cela : cette réalité unique etlumineuse, cause universelle de toute consistance et de toute réalité.Ce sera alors son tour de descendre dans la caverne pour en avertir ses camarades.

Sous l'éblouissementdu soleil, il est plongé de nouveau dans les ténèbres, il passera pour un maladroit, un égaré ou un fou,tant il est vrai que nous préférons nos chimères et nos faux-semblants à l'effort pénible d'ouvrir les yeuxet de nous retourner pour gravir la pente qui nous achemine vers la vérité à laquelle nous ne sommes paspréparés.Cette allégorie illustre parfaitement la métaphysique platonicienne.

Nous sommes plongés, par noshabitudes qui sont celles du commun des mortels, dans un monde de l'apparence et du faux-semblant.

Cemonde n'est pas entièrement faux (il suffirait alors d'en prendre le contre-pied pour accéder à la vérité),mais illusoire.

L'illusion n'est donc pas une erreur, mais une imitation lointaine du vrai.

Il existe un arrière-monde véridique et consistant dont toutes nos illusions tirent leur semblant d'être.

Ce monde est celuides Idées, immuables et universelles dont toutes les choses existantes sont des imitations grossières etapproximatives.

Pour saisir la vérité, il faut se détourner du sensible et penser.

Ce monde vrai tire sonêtre propre d'une seule et unique réalité qui est le Bien (le soleil, raison pour laquelle on présente la véritécomme une lumière qui dissipe les ténèbres.) b) Comment nous en débarrasser ? Il faut remettre en doute tout ce qui n'est pas certain. Texte : Descartes, Discours de la méthode , 4e partie. « J'avais dès longtemps remarqué que, pour les moeurs, il est besoin quelquefois de suivre des opinionsqu'on sait fort incertaines, tout de même que si elles étaient indubitables, ainsi qu'il a été dit ci-dessus ;mais pource qu'alors je désirais vaquer seulement à la recherche de la vérité, je pensais qu'il fallait que jefisse tout le contraire, et que je rejetasse, comme absolument faux, tout ce en quoi je pourrais imaginerle moindre doute, afin de voir s'il ne resterait point, après cela, quelque chose en ma créance, qui futindubitable.

Ainsi, à cause que nos sens nous trompent quelquefois, je voulus supposer qu'il n'y avait. »

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