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A. SCHOPENHAUER, Le Monde comme volonté et comme représentation, trad. A. Burdeau, Paris, PUF

Publié le 27/02/2008

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schopenhauer

"Nous sentons la douleur, mais non l'absence de douleur ; le souci, mais non l'absence de souci ; la crainte, mais non la sécurité. Nous ressentons le désir comme nous ressentons la faim et la soif ; mais le désir est-il rempli, aussitôt il advient de lui comme de ces morceaux goûtés par nous et qui cessent d'exister pour notre sensibilité, dès le moment où nous les avalons. Nous remarquons douloureusement l'absence des jouissances et des joies, et nous les regrettons aussitôt. Seules, en effet, la douleur et la privation peuvent produire une impression positive et par là se dénoncer d'elles-mêmes ; le bien-être, au contraire, n'est que pure négation. Aussi n'apprécions-nous pas les trois plus grands biens de la vie, la santé, la jeunesse et la liberté, tant que nous les possédons ; pour en comprendre la valeur, il faut que nous les ayons perdus, car ils sont aussi négatifs. Que notre vie était heureuse, c'est ce dont nous ne nous apercevons qu'au moment où ces jours heureux ont fait place à des jours malheureux. Autant les jouissances augmentent, autant diminue l'aptitude à les goûter : le plaisir devenu habitude n'est plus éprouvé comme tel. Mais par là-même grandit la faculté de ressentir la souffrance ; car la disparition d'un plaisir habituel cause une impression douloureuse. Ainsi la possession accroît la mesure de nos besoins, et du même coup la capacité de ressentir la douleur." A. SCHOPENHAUER, Le Monde comme volonté et comme représentation, trad. A. Burdeau, Paris, PUF, 1966, p. 1337.

Schopenhauer a été pendant longtemps ignoré des philosophes et du public. Pendant sa vie, ses œuvres ont eu énormément de mal à être diffusées et il se consolait en affirmant écrire pour la postérité. Selon lui, ses contemporains ne pouvaient pas réellement comprendre ses œuvres. Il est vrai que la période de sa vie a surtout été marquée, en Allemagne, par la philosophie d’Hegel qu’il reconnaissait comme son principal ennemi. On peut peut-être penser que sa théorie effraie. Le monde que construit Schopenhauer n’est pas un monde parfait, loin de là. C’est pour cela que le philosophe a été étiqueté pessimiste. Il est vrai que ces vues sur l’existence humaines sont très noires, comme nous en avons un exemple dans ce texte. La phrase la plus célèbre de Schopenhauer a d’ailleurs été pendant longtemps : «  la vie oscille, comme un pendule, de droite à gauche, de la souffrance à l’ennui. « Pourtant, il ne s’agit pas là d’une conception non fondée ou provocante. Elle repose sur un système philosophique ample et cohérent, fondé sur la théorie de la volonté. En effet, pour le philosophe, le monde est l’effet, l’objectivation d’une volonté unique et première qui se manifeste autant dans la croissance de la plante que dans les actions humaines. Il subordonne donc par suite l’existence humaine, non à l’intellect comme ont pu le faire les philosophes avant lui, mais à la volonté. De fait, l’homme est poussé à toujours désirer et à toujours souffrir. Ici, Schopenhauer s’interroge sur la nature de la douleur et sur celle du plaisir. Dans un univers comme celui de Schopenhauer, le bonheur est-il possible ? Comment ressentons-nous la joie ? Pouvons-nous prendre conscience de la joie quand elle est là ? Ou, c’est simplement par contraste, que le bon se conçoit ? Pour répondre à ces questions, Schopenhauer passe par une analyse de la sensibilité. Ce texte se décompose en trois parties : la première étudie la sensation de douleur, la seconde met en exergue la négativité du plaisir et de la satisfaction et la dernière étudie les conséquences du désir transformé en habitude.

 

 

schopenhauer

« douleur n'apportent pas de sensation.

Ils sont perçus seulement dans l'optique d'arrêter le souffrance.

La sensibiliténe ressent aucun plaisir particulier une fois cette étape effectuée.C'est d'ailleurs pour cela que Schopenhauer développera une théorie négative du désir.

Il reprend la comparaison dePlaton : le désir est comme le tonneau percé des Danaïdes.

Il ne peut jamais être rempli puisqu'il est percé.Rappelons que l'épisode du tonneau était un châtiment éternel.

Les Danaïdes étaient condamnés à faire cela pourl'éternité dans les enfers.

D'emblée, donc le désir est considéré comme un châtiment pour l'homme, châtimentauquel il ne peut pas réellement mettre fin dans ce monde.- De fait, le philosophe nous dit que seule la souffrance est « positive ».

Ce mot peut étonner si on n'en comprendpas le sens.

Il ne s'agit pas de dire que seule la souffrance est « bonne ».

Le terme « positif » désigne une réalitéqui tire son existence d'elle-même, qui n'est dépendante à aucune autre réalité pour exister.

La douleur se fait« sentir par elle-même ».

Cela signifie que la douleur n'a pas besoin du bonheur pour exister.

Nous la ressentons dèsqu'elle apparaît, par elle-même.

Le bonheur est négatif et se définit comme absence de douleur- A l'inverse, nous dit Schopenhauer, la joie et le plaisir ne sont pas ressentis par eux-mêmes.

Quand ils sont, notresensibilité ne les perçoit pas, comme si cela constituait la situation normale.

Il est d'ailleurs possible de contestercette idée.

Nous avons conscience de notre joie dans certaines situations.

Après avoir gagner un match ou envoyant quelqu'un que nous aimons beaucoup.

Mais en réalité, il nous faut réfléchir.

Est-ce que sur le moment, nousnous disons : « je suis heureux » ? Cela n'advient-il pas après, une fois que la situation est passée et que nous yrepensons.

Nous pouvons nous dire aussi que la chose désirée une fois obtenue, nous ressentons un vif plaisir àl'utiliser et à la découvrir.

De même, comme dit Rousseau, "on jouit moins de ce qu'on obtient que de ce qu'onespère, et l'on n'est heureux qu'avant d'être heureux." Les moyens que nous mettons en œuvre pour satisfaire notredésir peuvent nous mettre en joie, parce que nous oeuvrons pour notre bien être.

Il est vrai que Schopenhauer n'apas vu cet aspect du désir.

Il considère que tous les efforts en vue de satisfaire nos désirs sont douloureux.Pourtant, cela n'enlève pas de crédit aux propos de ce texte.

Il est vrai que nous avons de la joie quand nouspossédons enfin notre nouvelle voiture.

Pourtant, cela n'est vrai que dans les premiers temps.

Par la suite, nousnous habituons et cela nous semble normal.

Il n'y a que quand elle nous est enlevée que nous prenons consciencede l'avantage qu'elle nous procurait.

La sensibilité s'émousserait donc et le plaisir disparaît assez rapidement auxregards de la somme des efforts effectués.- C'est pour cela que Schopenhauer écrit que le bien-être est « négatif ».

Cela signifie que son existence tient àautre chose que lui-même, qui est la douleur.

Nous savons que notre situation précédente était heureuse parceque, maintenant dans la douleur, nous nous rendons compte de la chance que nous avions.

Ce serait donc parcomparaison avec les douleurs présentes que le bien-être apparaîtrait, par contraste.

Il ne se définirait alors que paropposition avec la douleur.

Pour Schopenhauer, la satisfaction ne passe pas directement par la sensibilité, mais est le résultat d'une activité, d'un effort de la conscience.

Pour ainsi dire, il faut ramener le souvenir des souffrancespour, par contraste, jouir de leur absence.

La chose n'est pas naturelle.

C'est pour cette raison aussi que lesouvenir des douleurs passées et dépassées donnent du plaisir à l'esprit, parce qu'elle met en relief l'avantage d'unesituation présente.- De fait, nous ne savourons pas les biens les plus essentiels de notre vie.

Pour le philosophe, ces biens sont lajeunesse, la santé et la liberté.

Or, quand nous sommes jeunes, nous ne pouvons pas encore avoir connu ce quesignifiait la vieillesse, la perte des moyens de notre corps.

Nous vivons de manière insouciante et ce n'est qu'unefois celle-ci passée, que nous dirons que nous avions le bel âge.

De même pour la santé, généralement, nous n'yfaisons pas attention.

Plus même, nous accomplissons des actes qui la mettent en danger.

Par contre, une fois quela maladie est là, nous regrettons ce bien-être du corps et nous aimerions pouvoir revenir en arrière pour toutmettre en œuvre pour la conserver.

On peut alors se demander, à partir de cette théorie, si les personnes qui ontdéjà été malades mais on retrouvait la santé, ne jouissent pas plus que nous de cet état, s'ils en n'ont pas plusconscients.

Il est courant d'affirmer que les personnes qui ont souffert profitent plus de la vie.

Pourtant, dans lathéorie schopenhaurienne, il n'est pas sûr que cela soit vrai puisque l'homme est Volonté.

Sa sensibilité ne ressenttrès vite, plus ce qui pourrait être un bien.

Nous voulons toujours plus pour apaiser notre souffrance- Dans la dernière partie du texte, Schopenhauer expose la conséquence de l'insensibilité au bien-être, à cetteinconscience des bonnes choses.

Elle est très intéressante appliquée à notre société actuelle.Nous avons sans cesse des désirs.

Reprenons l'exemple de la voiture.

Comme ceux-ci nous font souffrir, nousfaisons tout pour les satisfaire.

Pourtant, une fois, satisfaction obtenue, notre sensibilité s'émousse et la voituredevient pour nous un bien normal, auquel nous ne faisons plus attention.

Notre désir renaît pour un autre objet.Nous voulons une fois de plus l'obtenir mais une fois que nous l'avons, il cesse d'exister comme plaisir.

En continuantcette chaîne, nous nous retrouvons avec de nombreux objets dont la possession nous semble normale et auxquelsnous n'accordons plus notre attention et notre admiration.

L'habitude détruit le plaisir et il affirme même que plusnous avons de jouissances, moins de les ressentons.

La sensibilité s'émousse pour les bonnes choses.

C'est d'ailleurspour cela que pour le philosophe allemand, les gens qui ont énormément d'argent et qui peuvent assouvir tous leursdésirs, sont très vite rattrapés par l'ennui.

Plus rien n'arrive à leur donner des sensations de plaisir ou de jouissance.Aucun objet n'est à la hauteur et de fait, ils ne ressentent plus rien et s'ennuient.Pourtant, nous dit Schopenhauer, une fois que les objets nous sont enlevés, nous ressentons de la douleur.

Si nousavons beaucoup d'objets en notre possession, cela peut amener à beaucoup d'inquiétude.

Les choses dont nous. »

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