Devoir de Philosophie

devoir de philo

Publié le 04/10/2018

Extrait du document

Peut-on être en conflit avec soi même? Ce sujet pose problème, car il suppose que nous ne sommes pas en accord avec nous-même. À première vue, cela semble impossible: comment pourrait-on être en désaccord avec sa propre personne? Serais-je alors mon propre adversaire? Mais quelles seraient les causes de ce rapport conflictuel? Nous ne sommes qu’une seule personne, car soi-même n’est pas les autres or un conflit implique une opposition entre deux termes. Cela paraîtrait illogique que quelque chose en moi s’oppose à moi. N’existerait-il alors pas deux moi-même: un « je » qui m’est propre et un « moi », correspondant à la représentation de ce que je pense être? Les conflits seraient-ils donc internes, liés à l’incompréhension de mon être? Proviennent-il d’un possible décalage entre ce que je souhaite être et ce que je suis vraiment? Sommes nous gouvernés par nos pulsions animales, l’influence de la société, ou bien sommes-nous libres de choisir ce que nous souhaitons être? Pouvons nous suivre nos passions ou devons nous suivre la raison? Tout ceci nous pose problème, et nous pousse à nous remettre en question. Pouvons-nous donc être réellement nous-mêmes? Qu’est-ce qui s’oppose, chez moi, pour provoquer un conflit intérieur ? Est-il donc possible d’être en désaccord avec nous même? Dans un premier temps, nous nous pencherons sur la contradiction des désirs qu’il y a en nous et qui nous impose donc à être en conflit avec soi-même. Cela nous amène, en second lieu, à discuter du conflit des désirs et de la raison qui provoque le scandale de la déchirure. I. De la contradiction des désirs en nous au conflit avec soi-même Lorsque, dans le Gorgias, Calliclès reproche à Socrate de « toujours dire la même chose », celui-ci renchérit : il ne dit pas simplement la même chose, il dit toujours « le même du même » ; c'est Calliclès au contraire qui « ne dit jamais la même chose », c'est-à-dire qui ne cesse de se contredire. Ce sont en effet les « meilleurs », répète inlassablement ce dernier, qui méritent le pouvoir ; mais lorsqu'il s'agit de définir qui sont ces meilleurs, il proclame tantôt que ce sont les plus forts, tantôt les plus habiles, tantôt les plus courageux – trois déterminations qui à l'évidence ne se recoupent pas, puisqu'on peut avoir la force sans l'intelligence ni le courage (telle la brute qui frappe celui qui est moins fort que lui pour le seul plaisir de le frapper), le courage sans l'intelligence (c'est-à-dire la témérité qui ne pèse pas les risques), l'intelligence sans la force. Calliclès se contredit : il ne peut donc qu'avoir tort, puisque deux propositions contradictoires ne sauraient être vraies ensemble, quel que soit par ailleurs leur contenu. Et plus Socrate le lui fait remarquer, plus il s'empêtre et s'emporte : celui qui se contredit supporte rarement qu'on le contredise, c'est-à-dire qu'on lui apporte l'épreuve de la contradiction en l'amenant à comprendre que ce qu'il soutient n'est pas soutenable. Or, le mobile du conflit séparant Calliclès et Socrate n'est pas innocent : il s'agit pour Socrate d'affirmer que les meilleurs des hommes, ce sont ceux qui, avant de chercher à commander aux autres, savent se commander, c'est-à-dire « être raisonnable, se dominer, commander aux plaisirs et passions qui résident en soi-même », ceux qui sont, en somme, tout ce que C...

« contradiction en l'amenant à comprendre que ce qu'il soutient n'est pas soutenable.

Or, le mobile du conflit séparant Calliclès et Socrate n'est pas innocent : il s'agit pour Socrate d'affirmer que les meilleurs des hommes, ce sont ceux qui, avant de chercher à commander aux autres, savent se commander, c'est-à-dire « être raisonnable, se dominer, commander aux plaisirs et passions qui résident en soi-même », ceux qui sont, en somme, tout ce que Calliclès refuse d'être.

En d'autres termes, les contradictions dans lesquelles Calliclès s'enferre ne sont que le signe d'un conflit plus grave, qui n'est pas simplement d'ordre théorique, mais bien pratique : le problème, ce n'est pas tant sa relation au discours vrai que son rapport à l'action bonne.

Si le discours de Calliclès sombre ainsi dans la contradiction, c'est parce que Calliclès, loin de se dominer lui-même, est sans cesse la proie de désirs eux-mêmes contradictoires : la contradiction théorique est le signe d'un conflit pratique qui déchire un homme incapable de mettre la bride à ses appétits, et par conséquent toujours écartelé entre des inclinations opposées.

Et en effet, celui qui ne sait pas se commander lui-même devient la proie d'appétits tyranniques qui le tirent à hue et à dia : comme le remarquait Descartes, le propre du désir, c'est de nous présenter comme également désirables des satisfactions qui pourtant s'excluent mutuellement (jouir des bénéfices de la gloire tout en profitant de la tranquillité de l'anonymat, exercer le pouvoir sans avoir à en supporter les responsabilités.) ; le propre d'un désir, en d'autres termes, c'est à chaque fois de présenter sa satisfaction comme la plus indispensable à notre bonheur, quitte à entrer en conflit avec une inclination autre, qui pourtant se pose elle-même comme pareillement indispensable.

Aussi, celui qui n'écoute que ses désirs entre-t-il en permanence en conflit avec lui-même : loin d'être semblable à l'aboulique qui ne sait pas ce qu'il veut, l'intempérant ne veut pas ce qu'il veut et veut ce qu'il ne veut pas, parce qu'il veut tout et son contraire.

Or, si nos désirs peuvent à ce point se contredire entre eux, c'est parce qu'ils sont en eux-mêmes contradictoires : dans le Gorgias , Socrate compare les appétits à un tonneau percé, qui se vide à mesure qu'on le remplit ; et en effet, sitôt qu'un désir a été satisfait, il se porte sur un autre objet, et répute décevant celui qu'il avait un instant plus tôt tant cherché à posséder.

Le désir se renouvelle sans fin ni trêve, il élève aux cieux ce qu'il n'a pas pour le faire déchoir plus bas que terre sitôt obtenu : tout se passe comme si le désir ne pouvait déchirer notre volonté que parce qu'il est déjà en conflit avec lui-même – il veut être satisfait, mais est insatisfait de l'être, puisque toute satisfaction obtenue est incapable de le satisfaire (par le simple fait d'obtenir ce que je voulais, je me mets à vouloir autre chose).

Davantage même : plus je cède à mes désirs, plus j'affaiblis ma volonté, et moins je suis capable de leur résister : chacun traîne derrière soi le poids de ses mauvaises habitudes passées, qui finissent par le rendre incapable d'un choix libre et délibéré.

Aussi ce conflit qui oppose en moi des désirs contraires se double ou se redouble d'un conflit entre ce que mes désirs commandent, et ce qu'à présent je veux.

Telle est la figure de l'incontinent chez Aristote ( Éthique à Nicomaque , Livre. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles