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Explication du texte de Spinoza "Lettre a Schuller"

Publié le 19/11/2010

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spinoza

J'appelle libre, quant à moi, une chose qui est et agit par la seule nécessité de sa nature ; contrainte, celle qui est déterminée par une autre à exister et à agir d'une certaine façon déterminée. Dieu, par exemple, existe librement bien que nécessairement parce qu'il existe par la seule nécessité de sa nature. De même aussi Dieu se connaît lui-même librement parce qu'il existe par la seule nécessité de sa nature. De même aussi Dieu se connaît lui-même et connaît toutes choses librement, parce qu'il suit de la seule nécessité de sa nature que Dieu connaisse toutes choses. Vous le voyez bien, je ne fais pas consister la liberté dans un libre décret mais dans une libre nécessité. Mais descendons aux choses créées qui sont toutes déterminées par des causes extérieures à exister et à agir d'une certaine façon déterminée. Pour rendre cela clair et intelligible, concevons une chose très simple : une pierre par exemple reçoit d'une cause extérieure qui la pousse, une certaine quantité de mouvements et, l'impulsion de la cause extérieure venant à cesser, elle continuera à se mouvoir nécessairement. Cette persistance de la pierre dans le mouvement est une contrainte, non parce qu'elle est nécessaire, mais parce qu'elle doit être définie par l'impulsion d'une cause extérieure. Et ce qui est vrai de la pierre il faut l'entendre de toute chose singulière, quelle que soit la complexité qu'il vous plaise de lui attribuer, si nombreuses que puissent être ses aptitudes, parce que toute chose singulière est nécessairement déterminée par une cause extérieure à exister et à agir d'une certaine manière déterminée. Concevez maintenant, si vous voulez bien, que la pierre, tandis qu'elle continue de se mouvoir, pense et sache qu'elle fait effort, autant qu'elle peut, pour se mouvoir. Cette pierre assurément, puisqu'elle a conscience de son effort seulement et qu'elle n'est en aucune façon indifférente, croira qu'elle est très libre et qu'elle ne persévère dans son mouvement que parce qu'elle le veut. Telle est cette liberté humaine que tous se vantent de posséder et qui consiste en cela seul que les hommes ont conscience de leurs appétits et ignorent les causes qui les déterminent. Un enfant croit librement appéter le lait, un jeune garçon irrité vouloir se venger et, s'il est poltron, vouloir fuir. Un ivrogne croit dire par un libre décret de son âme ce qu'ensuite, revenu à la sobriété, il aurait voulu taire. De même un délirant, un bavard, et bien d'autres de même farine, croient agir par un libre décret de l'âme et non se laisser contraindre.

(Spinoza, Lettre LVIII).

Spinoza s'interroge sur le libre arbitre. Il se demande s'il existe une volonté (arbitre signifie en vieux français volonté) libre en l'homme, c'est-à-dire capable de briser la chaîne des causalités qui détermine son action. Spinoza ne croit pas en l'existence d'une telle volonté et il soutient que les hommes ont l'illusion d'être libres parce qu'ils ont conscience de leurs désirs, mais ignorent les causes qui les conditionnent. Pour expliquer les raisons de cette ignorance, l'auteur utilise d'abord un exemple, celui d'une pierre, afin de montrer que toutes les choses singulières sont contraintes par des causes extérieures, puis après avoir attribué la pensée à la pierre il montre que si elle pensait son mouvement elle se croirait libre. Il la compare ensuite aux hommes pour en tirer la leçon qu'ils partagent avec elle l'illusion du libre arbitre, ce qu'il illustre de deux exemples. 

spinoza

« demande d'attribuer à la pierre une conscience pour qu'elle soit comparable à un homme.

Parce qu'elle est douée deconscience tandis qu'elle continue de se mouvoir, elle croit être libre, et être l'auteur de la poursuite du mouvement,alors qu'elle est en réalité, ignorante de la cause véritable, c'est-à-dire l'impulsion qui l'a mise en mouvement. Comme elle l'homme est pris dans une situation de ce genre, et l'illusion ( L'illusion est à la fois une erreur et unetromperie qui résiste à la connaissance rationnelle elle-même.) qui en résulte constitue ce qu'on appelle la liberté : "telle est cette liberté humaine que tous les hommes se vantent d'avoir " et qui n'est que la conscience de nos désirsdoublée de l'ignorance de leur cause véritable.

Nous sommes tous, en effet, conscients de poursuivre des fins(désirer le lait, vouloir se venger ou fuir, le mot " fin " désignant ici le motif ou le but), mais nous attribuons la causede nos désirs à notre volonté libre.

L'homme en réalité, est placé dans l'ignorance de tout autre rapport de causalitéque celui de l'objet et du désir qu'il suscite en nous, les hommes se croient donc libres parce qu'ils ont consciencede leurs désirs, mais ils ne pensent pas " même en rêve, aux causes qui les disposent à désirer et à vouloir parcequ'ils les ignorent " écrit Spinoza dans l'Éthique.

Quelles sont ces causes ? Toutes les causes qui s'enchaînent pourdéterminer chacune de nos actions renvoient en dernière analyse au " conatus ", l'effort (on dirait aujourd'hui lapulsion, la poussée) par lequel chaque être tend à continuer à exister et à augmenter sa puissance d'agir.

Cet effortn'est pas un choc physique comme dans le cas de la pierre, mais cette énergie qui est le vrai foyer de mon être, cetappétit que j'appelle, lorsque j'en ai conscience mon désir (voir les définitions du conatus, de l'appétit et du désirdans le cours).

C'est pourquoi l'enfant croit désirer librement le lait, mais ne cherche à l'atteindre que pour seconserver, ou encore le jeune garçon croit vouloir se venger ou fuir librement alors qu'il est contraint, qu'il éprouveune passion engendrée par une idée inadéquate.

Comme eux je veux ceci ou cela selon telle causalité et la causen'est jamais incausée mais toujours à la fois causante et causée. Par conséquent, Spinoza s'oppose à ceux, qui comme Descartes, sont partisans du libre arbitre.

Selon Descartes eneffet, la volonté est capable de s'opposer aux élans du désir qui poussent l'homme à agir de telle ou telle manière.

Al'impulsion des passions, Descartes oppose le choix conscient et la délibération de la volonté qui permettentl'expression d'une liberté authentique.

Spinoza pour sa part défend une conception qu'on appellera au 19ème siècle,le déterminisme.

Ce terme désigne l'inscription de l'homme dans un enchaînement strict et nécessaire de causes etd'effets, qui conditionnent son action sur le plan du corps et de l'âme.

Aussi pour Spinoza la volonté elle-même estune illusion et notre liberté véritable consiste à comprendre cette nécessité qui nous traverse, celle du conatus.

Parcette compréhension on ôte aux passions leur force destructrice, leur " tristesse ", et l'on ressent alors cecontentement qui provient de la reconnaissance du fait que la liberté est la nécessité comprise. Le libre arbitre est donc selon Spinoza une illusion inévitable, mais cela ne signifie pas que je ne peux pas conquérirma liberté.

Plus je conçois mon imbrication dans l'univers selon les tenants et les aboutissants (les causes et leseffets), plus je suis Dieu pensant et agissant par moi, tandis que je pense et agis par lui.

Le salut est lacompréhension de ma nécessité au sein de l'universelle nécessité, la suppression de la contrainte au profit de ladétermination qui ne vient que de ma nature (les désirs engendrés par idées adéquates sont des actions), lasituation exacte de ma nature au sein de la nature divine. Sujet désiré en échange : Sujet : Étudiez le thème du voyage dans les chants V à XIII de l'Odyssée. »

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